Jazz Fusion : une quête de nouvelles sensibilités
LE MATIN
22 Décembre 2005
À 15:29
Lionel Haas et Majid Bekkas donnaient, hier au Goethe Institut à Rabat, un concert de Jazz Fusion. Un spectacle inédit, fruit d'une rencontre singulière entre deux artistes venus d'horizons différents, offert au public de la capitale. Un artiste franco-allemand, qui se dit marqué par Right Time, Scott Joplin et un artiste marocain qui a fait se rejoindre la musique marocaine traditionnelle des Ganouas avec les sons internationaux de la musique Jazz. Une rencontre sans à priori qui donne sa pleine expression à la musique.
Lionel Haas, qui a reçu sa première leçon de piano à 9 ans, et a puisé ses premières inspirations dans la tradition du jazz noir, s'imprégnant de blues, de Gospel et de Swing, ne trouve aucun mal à s'ouvrir sur le monde pour épouser les multiples influences musicales. Dans son registre, le jazz «classique» noir américain, rencontre les rythmes latinos. Il se produira ainsi à Berlin avec des artistes latino-américains et notamment de Salsa. «Une des philosophies du jazz est de s'ouvrir aux autres cultures», soutient ce jeune pianiste de 34 ans qui travaille patiemment à asseoir sa carrière internationale.
C'est aux Etats-Unis que Lionel Haas va acquérir sa première expérience internationale musicale. Il y vivra entre 1991 et 1995 et fera partie de la «Federal Focus Jazzband» à Washington. Guidé par sa passion, il s'installera dans le pays qui a vu la naissance de cette musique, sortie des complaintes des noirs américains, traduisant d'abord leur quotidien fait de douleurs et de souffrances, de la marginalisation et de la pauvreté, avant de conquérir l'Amérique puis le monde.
Cette passion de la musique, qui dictera au jeune pianiste d'aller puiser à l'origine du jazz pour perfectionner son jeu et acquérir une meilleure connaissance de son instrument, lui imposera à un carrefour de sa vie de faire un choix de carrière. Moment délicat, car le jeune homme devait faire ses adieux à sa carrière de journaliste, après un cursus universitaire bien rempli, couronnée par un diplôme en sciences politiques et en communication. La nostalgie du journalisme de radio, qu'il a exercé pendant un temps, est intacte même si la passion de la musique est toujours la plus forte.
Dans ce registre, Lionel Haas ne se contente pas du peu. Depuis qu'il s'est installé à Berlin comme artiste professionnel du jazz, il est engagé dans une quête permanente, à la fois des sensations et émotions personnelle, d'énergie et d'inspiration musicale, comme des techniques nouvelles d'interprétation et de composition. Il y a deux ans, la sortie d'un premier CD avec son Quintet (Groupe avec deux cuivres, batteur et basse et piano), révélera le côté compositeur de Lionel Haas. Un côté qu'il souhaite cultiver.
Aujourd'hui, il travaille depuis un an à perfectionner sa musique dans le cadre d'un trio. Un cadre plus limité qui lui offre l'occasion de mieux exprimer sa musique. Lionel Haas estime que dans le quintet il n'est qu'un pianiste qui joue au sein d'un bon groupe et que le trio offre une meilleure visibilité à son art, lui permettant de mieux s'exprimer.
S'il pousse sa musique aux limites du perfectionnement à travers une interprétation plus recherchée, Lionel Haas répugne à s'enfermer dans une catégorie précise. Il s'ouvre au monde, laissant libre court à son imagination, puisant dans les variétés du monde des sensations et des émotions chaque fois nouvelles.
«Je me sens chez-moi dans tous les styles à peu près», dira le pianiste qui s'essaye à une exploration de tous les registres. Ainsi, sa rencontre avec Majid Bekkas, un autre artiste qui a prouvé sa capacité à l'ouverture en jouant avec des musiciens venus de contrées lointaines, a été un moment de rencontre, de dialogue et aussi de grand art.
Lionel Haas suit son émotion et son jeu n'en est que plus apprécié. Celui à qui s'offrira une première tournée en Chine avant d'aller se produire en Irlande et en France est aujourd'hui programmé pour deux festivals en Allemagne en 2006. Il avait déjà participé l'été à un festival de Blues et compte multiplie ses occasions de rencontres avec le public. «Je veux jouer tout simplement», confie pudiquement l'artiste-compositeur.
Le 27 décembre, Lionel Haas en concert privé à Rabat.