L'humain au centre de l'action future

L'histoire passionnante du cinéma espagnol

08 Novembre 2005 À 16:17

La naissance du cinéma espagnol est liée à l'adaptation des oeuvres littéraires. C'est le cas de La Malquerida, de Ricardo de Baños (1915), et La Aldea maldita de Florian Rey (1930). Après le cinéma muet, l'Espagne connaîtra le surréalisme, le néo-réalisme, les innovations des années 60, la modernité et la post-modernité.

Luis Buñuel engagera le cinéma espagnol dans la modernité. Dès 1929, il sera colonisé par Hollywood, qui lui imposera son œil commercial. C'est l'époque de Imperio Argentina, Carlos Gardel et d'une résistance, qui se traduit par le langage innovateur du Chien Andalou de Buñuel.

La guerre impose un cinéma bondé de clichés. Le franquisme, vainqueur, s'exprime par un langage glorificateur du national catholicisme. La Raza et Franco, ese hombre de José Luis Sáenz ; A mí la légion de Juan de Orduña font l'exemple. Joselito, le rossignol prodige du régime, et Sara Montiel dominent les comédies musicales où l'on pleure et on ne pense pas.

Bardem et Berlanga lui apporteront l'humour. Bardem le considérait comme politiquement inefficace, socialement faux, intellectuellement infirme et esthétiquement nul. Aux côtés de Berlanga, il initie un parcours néo-réaliste. Cómicos (1954) et Bienvenido Mr. Marshall (1953) ont signé cette époque.
Le nouveau cinéma espagnol débute à la fin des années 60. Il voulait approfondir la leçon avortée de la génération antérieure.

Malgré la censure, il s'enracine dans le réel d´une Espagne assoiffée de liberté. Les films de Saura Peppermint frappé et Stress es tres tres en témoignent.
La mort de Franco inaugure une époque de libération. La Movida madrilène constitue l'expression de ce désir longuement bâillonné. Sur un fond de crise économique, on assiste à l'émergence de nouveaux talents, et d'une perception nouvelle de l'individualité.

Pedro Almodóvar en est le centre. D´abord, par son approche iconoclaste. Son style joue avec le référentiel et le caricatural, la fusion des genres et une dérision corrosive. La transgression est palpable dans Le Labyrinthe des passions, La Loi du désir et Talons aiguilles. Almodovar déploie une esthétique mure et rigoureuse. Dans ses derniers films, il n'abandonne pas son baroquisme caractéristique, mais l´exercice technique et narratif deviennent cliniques. Son regard évolue vers un mysticisme centré sur la douleur : Tout sur ma mère, La Fleur de mon secret et En chair et en os.

Le pouvoir démystificateur de Almodovar a affranchi le cinéma espagnol. Ce qui se fait aujourd´hui, malgré la pression du produit américain, est dynamique et courageux. Il fait cohabiter de vieux créateurs comme Saura, qui vient de sortir son film Iberia et des metteurs en scènes comme Alejandro Amenabar, l´auteur de Mar adentro (Oscar du meilleur film étranger) ou Alex de la Iglesia, vertueux de l'humour noir. El Crimen Perfecto en est la preuve.

Ce cinéma de jeunes, revendique l'engagement avec la vie et l'art. Il est conscient que seul l'art bien fait est capable d´explorer nos zones de lumières et nos obscures et vastes tentations destructives.

L'Institut Cervantès de Rabat rend hommage à ce parcours. Il en présente une rétrospective a la salle 7e Art, du 9 au 16 novembre. Les 7 longs-métrages sont sous-titrés en arabe et en français. Les débats seront animés par Diego Galán, ex directeur du Festival de San Sébastien et critique d´EL PAIS.
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