L'humain au centre de l'action future

La nature et la femme inspirent Karim Bennani

La galerie Memoarts de Casablanca abrite du 8 décembre au 9 janvier prochain, une exposition des œuvres des dix dernières années de Karim Bennani.
>Après une absence relativement longue, il a choisi l'espace de Memoarts parce qu'il est «très intéressan

08 Décembre 2005 À 15:41

Il n'y a pas un autre espace à Casablanca où je pouvais exposer soixante pièces», explique-t-il. L'artiste peintre est né à Fès en 1938. Après l'Académie de Fès (1951-53), il suit les cours de l'Ecole des Beaux Arts de Paris (1954-59). Académie Julian.

Ateliers Charpentier. Sur ce parcours purement culturel, K. Bennai confie : « Débarqué à Paris en 1954, alors en pleine effervescence contestataire, j'ai pu mettre à profit un champ d'exploitation offert par un grand climat de liberté (…) J'ai été charmé par la modernité, séduit par l'imprévu, et je me suis nourri des œuvres de Cézanne, Kandinsky, Klée, Man Ray, et bien d'autres artistes emblématiques.

Leur fréquentation a enrichi mon imaginaire et infléchi le cours de ma destinée». Membre fondateur de l'Union des Artistes Maghrébins et de l'AMAP (Association Marocaine des Arts Plastiques), qu'il préside de 1973 à 1977. Sa première exposition remonte à l'année 1957 à la galerie du Bac de Paris. Depuis cette date, Karim Bennani a exposé au Maroc, en France, en Tunisie, aux USA, en Algérie, en Irak, au Koweït, au Qatar, en Egypte… Il a utilisé la peinture à l'huile jusqu'aux années 70 pour l'abandonner pour l'acrylique sur toile. D'après lui, la manipulation de ce genre de peinture est beaucoup plus confortable.

Ses œuvres partagent deux thèmes : la nature et la femme. «Dans la nature, il n'y a pas d'ongle droit aigu. Je fais toujours la liaison entre la femme et la nature. Quand je marie les deux, je trouve mon bonheur. Ce n'est pas la femme qui m'intéresse, c'est son aspect idéologique, invisible, celui qu'on ne voit pas chez la femme», souligne-t-il. Au fait, toutes ses toiles sont un vibrant hommage rendu à la femme et à la féminité. Dans sa peinture, le corps féminin est l'essence même de la vie et sa valeur esthétique est mise infiniment en relief pour une nouvelle lecture.

Karim Bennani décrit ses œuvres : «véritable réceptacle, mes toiles subissent des soubresauts, des inversions sous l'assaut d'une lumière infuse, un élan intérieur en concert avec mon inconscient pour répondre à des sensations originelles. La nature demeure ma force. Et cette force m'appelle, me déchire, m'ébranle et m'entraîne en définitive dans un monde merveilleux de cette aura fluide qui symbolise mon univers». Cet artiste a toujours l'impression de faire les choses à moitié. «J'ai l'impression que toutes mes œuvres sont inachevées», martèle-t-il.

A la question de savoir s'il a un moment bien précis pour réaliser ses toiles, Il répond qu'il travaille pratiquement tous les jours. Ses doigts ont besoin d'être quotidiennement manipulés. «Souvent, lorsque je me trouve attablé à la terrasse d'un café ou dans un bistrot, je m'oublie et mes doigts se plient et se lâchent, me poussant à dessiner sur la nappe ou sur une quelconque serviette en papier», dit-il.

Pour la réalisation de ses toiles, l'artiste peintre emploie beaucoup de bleu parce qu'il est rattaché à la nature. Deux teintes dominent son exposition. Le bleu et le marron. Ces deux couleurs dominantes sont celles du ciel et de la terre. Cette dernière symbolise la vie. Ces couleurs invitent à la sérénité et à la détente. «A un discours laborieux, long et manquant de sincérité, je préfère l'esthétisme des formes et le vocabulaire des couleurs, car je crois à la magie de l'image», insiste-t-il. «Je peins pour partager mes sentiments, mes angoisses, mes rêves, mes espoirs, et permettre à chacun de pénétrer un monde au delà de la normalité…Mais, je peins également pour besoin de liberté».

Sur la situation de l'art au Maroc, il a une opinion très claire et avance que le Maroc manque de critiques d'arts attitrés. Il révèle que «la plupart du temps, ce sont les journalistes qui font l'effort d'étudier et d'analyser les différentes créations artistiques. Mais, il faudrait qu'on soit plus grivois, parce qu'un artiste a besoin d'être secoué pour faire mieux». Pour lui, un travail artistique ne meurt jamais, il se transmet de génération en génération pour que survive une tradition ancestrale en donnant vie à de nouvelles expressions.
Casablanca, galerie Mémoarts, jusqu'au 9 janvier.
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