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Le Kurde Jalal Talabani élu Président de l'Irak

L'Irak s'est choisi mercredi pour la première fois de son histoire un président kurde en la personne du vieux combattant Jalal Talabani, qui a passé une grande partie de sa vie à lutter contre le pouvoir central de Bagdad.
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06 Avril 2005 À 15:57

Autre nouveauté dans l'histoire de l'Irak moderne: le chef de l'Etat sortant, le sunnite Ghazi al-Yaouar, a accepté de quitter son poste pour celui de vice-président sans en être chassé par la force ou être exécuté, comme ce fut le cas de tous ses prédécesseurs depuis l'instauration de la république en 1958.

L'autre vice-président élu mercredi est le ministre sortant des Finances, le chiite Adel Abdel Mahdi, ancien maoïste devenu partisan de la révolution iranienne puis converti à l'économie de marché. Elus par le Parlement, MM. Talabani, Yaouar et Mahdi ont obtenu les voix de 228 des 275 députés. Leur candidature avait fait mardi l'objet d'un accord entre chiites, Kurdes et sunnites. Il y avait 257 députés présents lors du vote, dont 29 ont voté blanc.

Jalal Talabani, qui à 72 ans devient le premier président kurde de l'histoire moderne de l'Irak, a passé la plus grande partie de sa vie à lutter contre le pouvoir central mais aussi contre les vieux féodaux de son ethnie.

Celui que ses camarades surnomment affectueusement "Oncle Jalal" est né dans le village de Kalkan, perché dans la montagne à 400 km au nord-est de Bagdad, avant de rejoindre très jeune le combat pour les droits des Kurdes, par admiration pour la figure légendaire du combat nationaliste, Mollah Moustafa Barzani.

"C'est la première fois dans l'histoire de l'Irak qu'un kurde va être élu et accepté comme président. C'est historique", a affirmé le ministre kurde sortant des Affaires étrangères Hoshyar Zebari.
S'il réussit à la magistrature suprême, cela rapprochera grandement le Kurdistan autonome du cadre irakien, mais un échec pourrait relancer les aspirations indépendantistes de ce peuple irréductible.

Elève à Kirkouk, il rêve à 15 ans de devenir médecin mais opte finalement pour le droit afin de se consacrer à la politique. Sa participation en 1952 à une manifestation anti-colonialiste à Bagdad l'oblige à interrompre ses études, avant de les reprendre après la chute de la royauté en 1958.

Pendant cette interruption, il effectue son service militaire dans l'artillerie et les blindés, tout en conservant une passion pour la politique. Il rejoint le Parti démocratique du Kurdistan (PDK), fondé en août 1946 et combat dans les montagnes quand éclate la première grande révolte kurde en 1961 et 1963.
Il sera toujours un opposant au sein du PDK, et lorsque le chef charismatique Barzani signe en février 1964 un accord de paix avec Bagdad qui ne mentionne pas l'autonomie du Kurdistan, il entre en dissidence et part pour l'Iran. Il voit d'un bon oeil l'arrivée du parti Baas au pouvoir en 1968, mais la lune de miel ne dure pas. Après la violation de l'accord d'autonomie de 1974 et la guerre qui s'ensuit, M. Talabani rompt avec le PDK et annonce le 1er juin 1975 à Damas la formation de l'Union patriotique du Kurdistan (UPK), qui se veut plus à gauche que son rival.

La rivalité entre ces deux partis va marquer la vie politique kurde. Une nouvelle révolte a lieu dans les années 1980 et l'homme fort du pays, Saddam Hussein, va raser des centaines de villages et déplacer des populations kurdes dans sa campagne surnommé "Anfal" en 1988.
Le pire est encore à venir, avec la guerre du Golfe en 1991, quand l'armée irakienne, défaite par les troupes de la coalition, lance une offensive dans le nord en poussant des centaines de milliers de kurdes sur les routes de l'exil vers l'Iran et la Turquie.

L'intervention des puissances occidentales va stopper l'offensive et permettre aux kurdes d'instaurer un gouvernement autonome dans leurs régions. Mais la rivalité entre le PDK et l'UPK est latente. Le conflit éclate en 1993 quand Jalal Talabani use de la force pour casser le monopole du PDK sur la perception des taxes avec la Turquie. En 1996, les deux formations concluent un cessez-le-feu puis un accord de paix en 1998, mais le véritable rapprochement intervient en 2002 alors que l'invasion de l'Irak par les forces de la coalition semble inévitable.
M. Talabani contrôle la région de Souleimaniyah alors que Massoud Barzani, fils du Mollah Moustafa, régit les province d'Erbil et Dohouk.

Depuis la chute de Saddam Hussein, les deux chefs kurdes ont enterré la hache de guerre pour présenter un front uni dans le nouvel Irak. Lors des élections générales du 30 janvier, ils ont présenté une liste commune qui contrôle 77 sièges, soit le deuxième groupe parlementaire à l'Assemblée nationale.
Mais les deux hommes restent assez différents. Jalal Talabani, toujours soigné en costume cravate, a préféré la présidence de l'Etat et son rival Massoud Barzani, en pantalon bouffant traditionnel et keffieh sur la tête, a opté pour diriger le Parlement autonome kurde.

1535 Américains tués en deux ans
Un soldat américain a été tué lors d'une attaque à la bombe et à l'arme légère menée par la guérilla mercredi matin à Bagdad, a annoncé l'armée américaine, alors que trois policiers irakiens ont été grièvement blessés dans une attaque à Kirkouk (nord), selon la police.

Le soldat américain "a été tué lorsque sa patrouille a été touchée par un engin explosif et pris pour cible par des tirs d'armes légères provenant des forces anti-irakiennes", indique un communiqué de l'armée américaine.
Selon les chiffres du Pentagone, ce décès porte à 1.535 le nombre de soldats américains morts en Irak depuis que les Etats-Unis ont envahi ce pays en mars 2003.

D'autre part, selon le général Tourhan Youssef, chef de la police de Kirkouk (250 km au nord de Bagdad) trois policiers ont été attaqués par des hommes armés alors qu'ils étaient en patrouille dans leur véhicule.
Les trois hommes "ont été grièvement blessés par plusieurs balles et sont dans un état critique", a dit le docteur Moustapha Mahmoud, médecin à l'hôpital général de Kirkouk.

Saddam Hussein a suivi l'élection à la télévision
L'ancien président irakien Saddam Hussein et onze dignitaires de son régime déchu devaient pouvoir regarder mercredi à la télévision l'élection du nouveau chef de l'Etat irakien, le Kurde Jalal Talabani, a affirmé à l'AFP le ministre des droits de l'Homme, Bakhtiar Amine.

"J'ai décidé d'installer aujourd'hui une télévision dans la prison pour que Saddam Hussein et onze de ses hommes puissent assister à l'élection du président et de ses deux vice-présidents, afin qu'ils comprennent que leur temps est révolu et qu'un nouvel Irak est né, qui est celui de la démocratie et non des coups d'Etat", a-t-il dit.
C'est la première fois depuis leur arrestation que ces douze personnes inculpées par le Tribunal spécial irakien vont pouvoir regarder la télévision, a précisé le ministre.

Lors de son interrogatoire, le 1er juillet 2004, l'ancien dictateur avait affirmé à plusieurs reprises au magistrat qui l'interrogeait: "Je suis Saddam Hussein, président de la République d'Irak".

Saddam Hussein "saura ainsi qu'il y a eu des élections démocratiques pour choisir un Parlement et que la dictature est finie", a dit M. Amine, alors que le Parlement issu des élections du 30 janvier était réuni pour élire le chef de l'Etat et ses deux adjoints.
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