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Le Maroc et la Bulgarie souhaitent aller au-delà des simples proclamations

17 Mars 2005 À 18:53

Siméon de Saxe-Cobourg Gotha, rebaptisé Siméon Saxecobourgotski, ancien monarque de Bulgarie et aujourd'hui Premier ministre actif au service de son pays, a quitté hier le Maroc au terme d'une visite officielle de trois jours au cours de laquelle il a été reçu par S.A.R. le Prince Moulay Rachid.

Arrivé dimanche dernier à la tête d'une importante délégation bulgare comprenant les ministres des Affaires étrangères, de la Justice, de la Jeunesse et des Sports, le Premier ministre bulgare a eu avec son homologue marocain Driss Jettou, Abdelouahed Radi, président de la Chambre des représentants, Mustapha Oukacha, président de la Chambre des conseillers et avec plusieurs responsables marocains une série d'entretiens relatifs au renforcement de la coopération maroco-bulgare.
Au Mausolée Mohammed V, Il s'est également recueilli sur la tombe de feu S.M. Hassan II.

Six accords de coopération ont été signés à cette occasion, portant notamment sur les échanges diplomatiques, la justice, la jeunesse et les sports. C'est la première fois, en effet, que l'ancien Souverain de Bulgarie se rend au Maroc à titre officiel, représentant la Bulgarie en qualité de chef de gouvernement.
En revanche, avant juin 2001, date à laquelle il a été désigné Premier ministre après un vote massif des électeurs bulgares qui l'ont quasiment plébiscité, il s'était rendu au Maroc de très nombreuses fois. Pendant des années, il avait noué une amitié profonde avec feu S.M. Hassan II ; S.M. le Roi Mohammed VI, alors Prince Héritier, avait assisté en personne au mariage du Prince Kyril de Bulgarie, organisé en 1989 aux Baléares.

C'est dire que sa relation avec le Royaume du Maroc ne date pas d'hier, elle est enracinée dans une réelle affection réciproque. L'ancien Roi de Bulgarie, aujourd'hui Premier ministre, se sentait d'autant plus chez lui, au Maroc, ainsi que sa femme Margarita et leurs enfants, qu'ils étaient associés à toutes les fêtes nationales marocaines. Les cérémonies officielles, présentations de vœux ou inaugurations de grands projets, s'étaient habituées à sa présence. Terre d'accueil et de tolérance, le Maroc lui procurait sérénité et fraternité.

L'homme du consensus

Sept ans après la chute du Mur de Berlin et l'effondrement de l'empire soviétique, il a déployé une intense activité pour assurer en 1996 son retour triomphal à Sofia. C'est une véritable ferveur qui avait, on s'en souvient, accompagné son retour dans son pays après des décennies d'exil, la Bulgarie s'étant transformée au lendemain de la seconde guerre mondiale en Etat communiste et était devenue membre du Pacte de Varsovie. Quarante-six ans d'exil ont trempé un homme de sa fibre dans une énergie hors du commun, convaincu qu'il fut toujours que l'histoire tournera la sombre page du stalinisme soviétique.

Alliant la sagesse à une détermination politique, il n'avait de cesse de conseiller son peuple -dont les jeunes générations ne l'ont découvert qu'à la télévision des décennies après, d'être l'infatigable militant international pour son pays. Siméon de Saxe-Cobourg Gotha, comme son nom l'indique, descend d'une lignée prestigieuse, au croisement de ces grands empires qui ont façonné l'Europe centrale, c'est-à-dire cette Mitteleuropa qui a donné au monde occidental le meilleur de lui-même.

Homme de consensus, Siméon II de Bulgarie a été appelé à la barre, parce que sa sagesse et son expérience politique, son aura auprès de ses compatriotes lui conféraient toutes les qualités requises pour diriger son pays, ravagé par quarante-cinq ans de communisme et de gabegie.

Les Bulgares « voulaient autre chose » que le lancinant débat entre ci-devant communistes convertis au pire en businessmen et au mieux en sociaux-démocrates et les néo-libéraux. Entre ces deux forces, dans un débat lassant sur la légitimité, Siméon II est apparu curieusement comme l'homme du renouveau. Elu Premier ministre, il mettra en œuvre des réformes, maîtrisera l'inflation, se battra -il se bat toujours- pour faire accéder son pays à l'Union européenne, mais se heurtera aussi à des problèmes de chômage, véritable goulot d'étranglement, à la corruption rampante et à l'exode de ces concitoyens. 1 million de Bulgares sur 8 sont en exil…

Convergence maroco-bulgare

Renouer avec les pays européens qu'il connaît parfaitement, renforcer la coopération entre son pays et le Maroc : assurément, Siméon de Saxe-Cobourg Gotha ne perd jamais de vue les objectifs assignés à sa mission. Les six accords de coopération signés lors de sa visite officielle viennent, en effet, renforcer un arsenal de conventions assez riche déjà. En avril 2003 déjà, la 7e session de la Commission maroco-bulgare, réunie à Rabat, avait donné une forte impulsion aux échanges entre les deux pays et le communiqué, publié à l'issue de cette session, mettait en exergue
« les liens d'amitié profonds entre S.M. le Roi Mohammed VI et le Premier ministre Siméon de Saxe ».

Dans le même esprit, les deux parties soulignent aujourd'hui leur volonté d'approfondir leur coopération. L'expérience du Maroc au plan de l'équipement et des infrastructures de base constitue un exemple aux yeux du Premier ministre bulgare qui salue, également, « l'esprit réformateur qui parcourt le Maroc, dont celui du Code de la famille, les institutions, le champ social, etc. » Il n'a pas hésité à saluer les efforts d'ouverture de l'économie marocaine et les accords liant le Maroc à l'Union européenne et aux Etats-Unis.

« La Bulgarie, a-t-il indiqué, qui prépare son entrée en 2007 à l'Union européenne sera d'un grand soutien au Maroc dans son aspiration à occuper une place privilégiée dans ses relations avec l'Europe et un associé essentiel, compte tenu de la position du Royaume, de son rôle et des pas audacieux franchis sur la voie de l'édification d'un Etat de droit et de justice ».

La visite du Premier ministre bulgare a été, en réalité, marquée par une double volonté : renforcer le dialogue politique, avec un agenda d'échanges d'expériences législatives et interparlementaires, hisser les relations économiques et culturelles au niveau de la convergence politique. Les deux parties souhaitent enfin aller au-delà des simples proclamations.
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