Spécial Marche verte

Le lait maternel a-t-il encore la cote ?

26 Novembre 2005 À 16:05

Les scientifiques sont unanimes pour dire que le lait maternel apporte tout ce dont le bébé a normalement besoin pendant ses six premiers mois, et aucun aliment complémentaire n'est nécessaire pendant cette période.

Le Dr Afif Said, pédiatre à Casablanca affirme que le lait maternel contient plusieurs centaines de molécules, enzymes, protéines et hormones bénéfiques à la santé. C'est une arme efficace pour protéger les nourrissons de la diarrhée et des infections respiratoires aiguës, stimuler leur système immunitaire et améliorer la réaction de leur organisme aux vaccinations.

En effet, selon les études « un enfant qui n'est pas nourri au sein pendant les deux premières années de sa vie a plus de 25 fois plus de risque de mourir à la suite d'une diarrhée et quatre fois plus de mourir d'une pneumonie qu'un enfant nourri au sein. Sa taille et son développement vont stagner et l'enfant présentera des risques d'obésité, de maladies cardiaques et problèmes gastro-intestinaux dans les années à venir». L'allaitement au sein renforce également, le lien affectif entre la mère et le bébé. En effet, le Dr Afif précise que ce type d'alimentation constitue un lien fort car la mère et l'enfant forment un bloc. Allaiter peut aussi être bénéfique pour la maman.

De nombreuses études ont montré que l'allaitement diminue le risque de cancer du sein. Mais attention, il ne suffit pas de nourrir quinze jours son bébé, il faut attendre un an pour que la diminution du risque soit significative. Un autre avantage pour la maman, l'allaitement est une contraception naturelle.

Malheureusement l'allaitement exclusif devient de plus en plus rare ces dernières années. Le phénomène qui ne concernait que les pays occidentaux a tendance (quoiqu'il revient en force dans ces pays), à se généraliser également dans les pays en voie de développement.

Dans ces derniers pays, seulement 39% des bébés sont exclusivement nourris au sein pendant leurs six premiers mois. Le Dr Afif explique que les causes de ce déclin en faveur de l'allaitement artificiel sont imputables au développement de l'industrie alimentaire avec l'avènement des laits pasteurisés et au fait que de plus en plus de femmes travaillent et par conséquent elles ont une certaine appréhension.

En effet, contrairement aux préparations pour biberon, il n'y a pas de mode d'emploi fourni pour les tétées. Toutefois, il est essentiel de savoir que chaque bébé à sa personnalité bien marquée, du passionné qui se jette sur le sein, en passant par le capricieux qui ne se décide pas à prendre le sein, jusqu'au somnolant qui utilise le sein comme une tétine. Tous ces types de réactions sont normaux et ne devraient pas inquiéter les mamans. Ce qui importe le plus, c'est que le bébé soit nourri avec l'un des seins jusqu'au moment où son intérêt faiblit, puis l'autre sein jusqu'au moment où il ne tète plus et s'endort.

Ceci peut paraître pour certaines mamans parfois difficile. En effet, l'allaitement exclusif pendant les six premiers mois, peut parfois sembler aux mamans une éternité surtout quand elles sont fatiguées et qu'elles doivent s'occuper du nouveau-né. Mais la force, elles peuvent la trouver en pensant qu'il faut simplement se concentrer sur le bien-être de l'enfant et se dire qu'il faut lui donner ainsi le meilleur départ possible. Il faut également profiter de ses enfants quand ils sont petits.

Cela dure si peu de temps. Pourtant, certaines résistances sont difficiles à vaincre. Le Dr Afif affirme que c'est dû au fait que les femmes manquent de conseils et d'encouragements pendant la grossesse et l'accouchement. Donc, les gynécologues, les sages femmes, les infirmiers, le pédiatre se doivent de les préparer psychologiquement et de les aider à comprendre ce qu'est l'allaitement maternel exclusif, de croire en ses bénéfices afin de les soutenir et de les encourager à le mettre en pratique.

On ne peut progresser qu'en menant davantage d'activités de plaidoyer pour améliorer la prise de conscience et en soutenant des programmes d'action en faveur de l'allaitement maternel. L'initiative «Hôpitaux Amis des bébés», lancée en 1992 n'a pas donné de résultat. Malgré l'interdiction de la distribution gratuite des aliments pour nourrisson depuis cette date, les résultats escomptés n'ont pas été obtenus comme l'atteste l'évaluation réalisée en 2003.
Le déclin de l'allaitement maternel est en nette augmentation et constitue aujourd'hui un problème de santé publique.

Pour améliorer la situation, il est temps de mener davantage d'actions (ministères, acteurs de santé, associations….) en faveur de l'allaitement exclusivement au sein de la naissance à l'âge de six mois, puis au sein en association avec une alimentation diversifiée jusqu'à l'âge de deux ans au moins.
Copyright Groupe le Matin © 2024