Le tissage traditionnel dans la région : une activité que toutes les femmes du village d'Aït Hamza exercent
Le village d'Aït Hamza appartient à la province de Boulemane, dans la région du Moyen-Atlas.
Les atouts qu'offre cette région sont essentiellement de nature pastorale et forestière favorisant l'existence d'un élevage extensif très développé qui constitue la principale activité de ses habitants ruraux. L'élevage permet d'obtenir la laine, utilisée comme matière première dans la fabrication des produits de tissage traditionnel.
Le tissage est une activité que toutes les femmes du village d'Aït Hamza exercent au quotidien notamment pour produire les tentures murales appelées hanbels, connus également sous le nom de tapis à poil ras.
Avant les années soixante, et à l'instar des autres régions berbères, les produits de tissage, et en particulier le hanbel n'étaient pas commercialisés. Aujourd'hui, le hanbel est devenu l'un des produits artisanaux les plus prisés par les touristes étrangers.
Conscientes de ce changement, les femmes du village d'Aït Hamza ont décidé de mettre en place une coopérative de tissage : ATMA.
Cette dernière a été créée avec l'appui de l'Organisation des Nations unies pour le développement industriel (ONUDI), la coopération du ministère du Commerce et de l'Industrie du Maroc et la province de Boulemane et la mise à disposition des fonds financiers par le gouvernement espagnol.
La coopération associe plus de 100 femmes tisseuses qui s'occupent de toutes la chaine de production : la recherche de la laine, le lavage, le cardage et le filage manuels, l'ourdissage et le tissage sur des métiers à tisser verticaux. Grâce à ce projet, ces femmes peuvent améliorer leur revenu familial.
On peut dire que les femmes tisseuses sont de véritables artistes, car elles font preuve de beaucoup d'imagination et d'un grand sens de créativité lors de la conception de chaque nouvel article. C'est à travers leurs œuvres qu'elles expriment leurs pensées et leurs émotions en s'inspirant de leur environnement naturel.
La coopération bénéficie d'une large réputation à l'échelle nationale. Elle œuvre aujourd'hui pour exporter ses produits vers des marchés internationaux.
Le tissage d'un tapis s'effectue en plusieurs étapes, allant de la préparation de la laine au tissage.
Après la tonte, la laine est lavée, elle est ensuite teinte puis ourdie. Les tisseuses accompagnent chaque opération de prières pour éloigner de la laine, les esprits maléfiques.
La coloration se fait à base de colorants naturels, dont les tisseuses maîtrisent encore la technique : au jaune orangé du henné, s'allient le bleu d'indigo, le rouge de garance, le noir bleuté naturel et le vert.
L'apprentissage du tissage demeure éminemment traditionnel. La transmission de ce savoir s'effectue à domicile et au sein de la famille. La mère initie sa fille à la confection d'un tapis de même qu'elle lui apprend à préparer un mets.
Parmi tous les produits, les tapis, y compris le hanbel, peuvent être considérés comme étant la pièce maîtresse de l'activité du tissage.
Le tapis marocain est attesté dans les chroniques depuis l'époque Mérinide. Il y est mentionné comme meuble précieux des palais et des espaces sacrés zaouias, mausolées…. Mais aussi comme cadeau princier.
Le tapis est un présent de choix offert aux personnalités de haut rang. Joint à la couverture et à la tenture, il occupe une place importante dans le trousseau de la mariée et, dans l'histoire, le tapis figure parmi les cadeaux ramenés par les ambassades étrangères.
En langue berbère le tapis est appelé Tazerbit.
Les chroniqueurs marocains soulignent la beauté des tapis ou encore des tentures murales ou hanbel, tapis à poil ras, et la place que cette production occupe au Maroc.
A la différence des tapis, les hanbels sont le résultat d'un croisement simple entre les fils de chaîne et les fils de trame en pure laine en employant l'armure drap.
Au moment du tissage, la femme implique des dessins ou des motifs de couleurs. Les dessins les plus connus sont : la serpentine ou dents-de-scie, les losanges, la tortue, le talon, le cœur, les croix, les arêtes de poisson, les pattes de lion et les pattes de tigre. Chaque motif représente une signification d'après les légendes.
Le hanbel est considéré comme l'un des grands héritages qui ont été précieusement conservés durant plusieurs siècles par les tribus berbères du Moyen et du Haut Atlas.
Quant à sa signification socioculturelle, le hanbel est un symbole de patience, de sagesse, de fierté et d'honneur. Il a toujours été parmi les objets les plus précieux de la maison berbère. Sa valeur a même dépassé celle des bijoux chez les femmes.
Le hanbel est utilisé non seulement pour la décoration intérieure, mais aussi comme matelas ou comme couverture.
L'élaboration d'un hanbel exige de la tisseuse énormément de temps et de patience. A titre d'exemple, un hanbel de 1 m sur 1,50 m nécessite 12 à 15 jours de travail, selon la compétence de la tisseuse.