Petits métiers : revenu maigre et instable
Les petits métiers continuent encore d'être le gagne-pain de bon nombre de personnes à Rabat. Des plombiers, des soudeurs, des maçons, des peintres en bâtiment… se regroupent à Bab El Had. Ils appréhendent l'avenir avec inquiétude. Leur revenu a nettement diminué au cours de ces dernières années. Ils peinent à l'heure actuelle à prendre en charge leurs familles.
A Bab El Had, à côté de la mosquée Sidi Al Ghandour, une dizaine d'hommes attendent chaque jour la providence de Dieu. Ils continuent d'exercer les métiers traditionnels d'une autre époque.
A sept heure, ils sont déjà sur leur lieu de travail appréhendant ce que leur réserve le jour qui commence. Chaque matin leur apporte un nouvel espoir. C'est la foi en Dieu qui les incite à garder espoir et à survivre malgré la dureté de leur existence. Ils se connaissent depuis des années. Leurs yeux scrutent attentivement les passants. "Peut-être que quelqu'un veut réparer quelque chose", se disent-ils toujours. Agé de 44 ans, Mohammed exerce le métier de plombier depuis 24 ans. " Je viens ici chaque jour ne sachant pas ce que me réserve le destin. Notre revenu a diminué depuis des années. Nous survivons à peine. Mais nous gardons tout de même foi en Dieu ", s'exclame-t-il avec un brin d'espoir mélangé d'amertume.
Il est marié et père de trois enfants. Pour diminuer les charges, il a préféré habiter à Salé où le loyer est moins cher qu'à Rabat. D'ailleurs, la plupart d'entre ceux qui exercent des petits métiers à Bab Al Had viennent chaque jour de Salé. Ils sont, en effet, incapables de trouver un logement à Rabat avec leur maigre revenu instable. Dans les années 90, ils arrivaient à faire vivre leurs familles. Mais, aujourd'hui, les choses ont beaucoup changé. Trente ou cinquante dirhams par jour fait actuellement leur bonheur.
Il leur arrive de rester sans revenu pendant des semaines. Aujourd'hui, peu de personnes recourent à leur service. " Ce n'est pas suffisant pour entretenir une famille. Seules la mort ou une grave maladie peuvent empêcher quelqu'un de venir occuper sa place. Ils n'ont, bien sûr comme tous ceux qui évoluent dans le secteur informel, ni allocations familiales, ni aide sanitaire familiale, ni indemnités journalières en cas de maladie ni pensions d'invalidité ou de vieillesse. En outre, ils savent très bien que leurs petits métiers sont voués à la disparition à cause de la modernisation. Mais, ils nourrissent un vif espoir quotidien de pouvoir continuer ce travail pendant encore quelques années.
Ils auraient tant aimé changer de métier. Mais, ils ne connaissent pas autre chose. Apprendre ? Ils sont déjà grands. Ils souhaitent du fond de leur cœur que l'avenir de leurs enfants soit meilleurs. Hajji Mohammed, maçon, affirme avec espoir : " J'espère que mon fils aura un travail stable dans la fonction publique. C'est mon vœu le plus cher.
De cette manière, il ne souffrira pas et pourra m'aider ne serait-ce qu'en me donnant 500 dirhams par mois ". A l'instar de ses collègues, Mohammed doit ainsi pendant longtemps subir les affres de la vie. " Je suis toujours obligé de m'endetter. Cela fait trente ans que je travaille ici. En contrepartie, je ne récolte que malheur et pauvreté ", se plaint Allal. Il ajoute que depuis longtemps, il daigne de tout faire pour gagner quelques malheureux dirhams. Pour lui, tous les travaux sont bons, l'essentiel c'est de parvenir à " assurer à ses enfants le pain ". Il clame haut et fort que sa situation même si elle est on ne peut plus difficile est mille fois meilleure que la mendicité. " Je ne pourrais jamais faire la manche même si je mourrais de faim.
C'est vrai qu'aujourd'hui, je n'arrive pas à acheter à mes enfants et à ma femme ce dont ils sont besoin, mais, nous n'avons dans cette vie que notre dignité ", ajoute-t-il avec défi.
Par ailleurs, ces hommes, qui semblent défier le temps et les difficultés, sont fort optimistes. Leur espoir les pousse à venir chaque jour attendre pendant d'interminables heures un " bricole " même insignifiant.
Quand ils reviennent bredouilles le soir chez eux, ils se sentent abattus. Mais il est à noter que bon nombre d'entre eux n'ont pu supporter leur dure existence. Ils espèrent qu'un jour, leur métier sera réglementé.