Spécial Marche verte

Six cent millions de dirhams au secours des orphelins

28 Avril 2005 À 18:10

Les associations de bienfaisance doivent en principe assurer aux orphelins une protection matérielle et affective, en leur servant de refuge et de foyer. Pour accomplir cette mission, elles bénéficient d'une assistance financière et matérielle de l'Entraide Nationale. Seulement, Il ressort d'une enquête réalisée par ce département que 37 institutions de bienfaisance nécessitent une intervention immédiate. La mise à niveau de ces établissements devra absorber plus de 200 millions de DH en plus de 400 millions de DH pour l'amélioration des conditions de vie des pensionnaires.

Il y d'abord celles qui nécessitent une intervention urgente évaluée à plus de 60 millions de DH pour la période allant jusqu'à 2007. D'autres établissements demanderont la mobilisation de plusieurs millions de DH pour la réhabilitation des locaux et des équipements. L'enquête souligne qu'un établissement en " état préoccupant " nécessite une mise à niveau qui pourra coûter entre un million et plus de 3 millions de DH. Environ 127 centres caritatifs dont trente sont très délabrés ont besoin de rénovations importantes. Le coût global des travaux nécessaires est estimé à 121 millions de dirhams.

La rénovation de ces centres, qui hébergent quelque 50.000 jeunes pensionnaires, a démarré le 2 avril après une visite surprise effectuée par S.M. le Roi Mohammed VI dans l'un de ces centres particulièrement mal gérés à Casablanca. Le Souverain avait alors ordonné l'ouverture immédiate d'une enquête et donné ses Hautes instructions pour que l'on procède à un audit. Le calvaire quotidien vécu par les pensionnaires de l'Association musulmane de bienfaisance de Ain Chock a mis à nu la mauvaise gestion des ressources.
Aujourd'hui, la mise en place d'un cadre juridique régissant l'organisation des structures de bienfaisance prend son chemin. Le ministre du Développement social, de la Famille et de la Solidarité, Abderrahim Harouchi vient d'en exposer les grandes lignes lors du Conseil de gouvernement réuni hier à Rabat.

Le ministre avait annoncé, début avril, qu'une étude globale sur ces institutions est en cours d'élaboration et ses résultats seront bientôt disponibles. L'enquête lancée le 5 avril dernier par l'Entraide nationale a permis d'identifier et de quantifier les besoins en matière d'aménagement des bâtiments, d'équipements et de personnel d'encadrement psycho-éducatif. Sur le plan des locaux et des équipements, 25% des établissements ont besoin d'une intervention rapide. Quant à l'encadrement, les besoins immédiats sont d'environ 280 cadres. Pour ce qui est du montage financier, il faut préciser que la mise à niveau de l'ensemble des établissements est évaluée à environ 230 millions de DH et devrait prendre 3 à 4 ans, en fonction des ressources mobilisables.

Aussi, les dépenses de fonctionnement qui sont, pour le moment de 9 DH par pensionnaire et par jour doivent-elles être doublées, dans un premier temps. Le ministre a souligné que la création d'un fonds de soutien aux orphelinats permettrait à tous les citoyens d'y participer. Pour cela, l'Entraide nationale a déjà prévu l'augmentation, à hauteur de 20%, de ses subventions aux établissements de bienfaisance, qui se sont élevées l'année dernière à 60 millions de DH.

Selon Mohamed Talbi, directeur de l'Entraide nationale, qui a récemment présenté à Bouznika, son département compte «débloquer un autre budget de 10 millions de DH, à des actions urgentes. Ceci, en plus du déblocage de 4 millions de DH auquel va procéder le ministère du Développement social, de la Famille et de la solidarité». Le service général d'inspection sera aussi régionalisé. Ce chantier est accompagné par des opérations de formation et de mise à niveau des compétences du personnel oeuvrant dans les établissements d'accueil. C'est ainsi que 250 institutions seront auditées au courant de cette année, et à partir de 2006. L'audit doit être généralisé à toutes les institutions concernées.

Pour Najib Bensbeâ, directeur du cabinet du ministre du Développement social, de la Famille et de la Solidarité, «il faut noter qu'au niveau de l'encadrement pédagogique, 7 agents seulement encadrent 100 personnes dans les institutions de bienfaisance à travers tout le pays, alors que la moyenne minimale est de 21 agents pour 200 personnes.

Il est donc question dans cette étude de relever le niveau d'encadrement et de prise en charge des pensionnaires qui est de 5 DH par personne et par jour pour qu'elle soit de 15 DH par personne et par jour». «Ces mesures sont destinées à améliorer la gestion de ces structures, à en assurer la transparence et rassurer les bienfaiteurs et les bénévoles, a souligné le Dr. Harouchi. Pour mener à bien ce travail, une commission ministérielle a été chargée de l'élaboration d'une loi relative aux centres de bienfaisance. Elle a pour mission essentielle de mettre en place de nouvelles normes de gestion des 500 associations musulmanes de bienfaisance qui existent au Maroc. De même, une Fédération nationale des associations de bienfaisance a été créée, à l'initiative de l'Entraide nationale qui a entamé un vaste chantier de réformes visant la mise à niveau des procédures financières, comptables et pédagogiques.

Sur le plan réglementaire, la mise en place d'un cadre juridique régissant l'organisation des structures de bienfaisance prend son chemin. En attendant la promulgation d'une nouvelle législation régissant ces institutions caritatives, l'action de bienfaisance dans le Royaume est toujours régie par la loi de 1958 relative aux libertés publiques.
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Les jeunes pensionnaires refusent la marginalisation
La visite de S.M. le Roi Mohammed VI à l'association musulmane de bienfaisance de Aïn Chock à Casablanca a fait bouger les choses dans le sens de l'amélioration des conditions d'entretien et d'hébergement des pensionnaires. La visite Royale qui a relevé la précarité des conditions de vie de 700 jeunes résidants a suscité beaucoup de remous ces derniers jours.

Sur place, nous avons pu constater le remue-ménage opéré au sein de cette association créée en 1927. Les personnes chargées de faire l'inventaire des besoins se succèdent à l'orphelinat tous les jours. " On a reçu la visite de plusieurs responsables, tous nous ont fait des promesses, mais jusqu'à présent rien n'a été concrétisé " affirme HE, 27 ans qui vit depuis 18 ans dans cette institution. M.S, un autre pensionnaire un peu plus âgé, enchaîne : " certes les travaux de rénovation ont démarré et nous ne pouvons que nous réjouir de cette initiative, mais en dénonçant la précarité dans laquelle vivent les enfants de l'orphelinat, nous avons voulu tirer la sonnette d'alarme sur notre existence et sur le fait qu'on ne peut plus vivre en marge de la société", précise MB.

Malgré les souffrances psychologiques et financières, de nombreux pensionnaires ont pu faire des études et obtenir des diplômes, malheureusement, la plupart d'entre eux ne travaillent toujours pas. "On a surmonté tous les obstacles pour décrocher nos diplômes car nous aspirons à une vie meilleure, nous voulons fonder une famille et goûter à ce plaisir de la vie dont on a été privé. Aujourd'hui, on se demande si notre rêve va se réaliser un jour ", s'exclame M.B. Il est grand temps que les responsables élaborent des programmes pour faciliter notre intégration sociale", ajoute-il. Le Matin n'a pas pu connaître la version du directeur de l'orphelinat. Celui-ci n'a pas répondu aux demandes d'interview de notre journaliste. Souad Ghazi

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