«The assassination of Richard Nixon», de Niels Mueller Descente aux enfers
Nous somme en 1974, dans la période qui prélude au scandale du Watergate et aboutira à la démission de Richard Nixon. Sam Bicke a décidé de détourner un avion pour le faire s'écraser sur la Maison …
Le film, qui commence par la fin, nous montre, en remontant le temps, comment ce petit blanc au chômage, complexé et scrupuleux, abandonné par sa femme, rejeté par son frère et ses amis, hanté par les mensonges de la vie, va basculer dans la dépression et se fixer pour but l'assassinat de celui qu'il considère comme responsable de tous les mots, «le plus puissant des menteurs», le président des Etats-Unis. L'intérêt de ce récit vient de sa dénonciation très convaincante du mensonge dominant le monde commercial, économique et politique. Sam Bicke se fait le héraut de cette dénonciation en la refusant tout d'abord à l'intérieur de son travail.
Cette obligation qui lui y est faite de mentir et de faire semblant est la partie la plus intéressante du film, celle où l'on voit à quel point tous ceux qui l'entourent ont accepté au contraire ces règles du jeu, avec parfois des arguments très convaincants,, que ce soit sa femme (obligée de travailler pour subvenir aux besoins de la famille) ou Bonny, son ami noir garagiste (qui supporte le plus sereinement possible les comportements racistes de ses clients). En parallèle à la prise de conscience de cette oppression a lieu la révélation du scandale du Watergate.
Ceci conduit Sam Bicke à son projet d'assassinat de Richard Nixon... Sam Bicke vit seul dans son appartement depuis qu'il s'est séparé de sa femme, il y a plus d'un an de cela. Elle vit avec leurs trois enfants et leur chien et a visiblement le projet de refaire sa vie sans lui. Au contraire, Sam semble toujours amoureux d'elle et tente tant bien que mal de la reconquérir, de lui prouver qu'il est capable de réussir. Justement, il vient d'être embauché dans une entreprise qui vend des meubles. Son précédent boulot, il l'avait quitté parce que son patron, son frère, lui demandait de mentir à ses clients quant aux rabais qu'il pouvait leur faire, pour le profit bien sûr.
On avait vu dernièrement Sean Penn dans 21 Grammes ainsi que dans Mystic River, deux films excellents dans lesquels il jouait à merveille. Ce film-là ne peut que nous faire aimer ce fabuleux acteur un peu plus. Parce que si The assassination of Richard Nixon est un si bon film, c'est probablement avant tout grâce à Sean Penn, personnage principal (Sam Bicke). Sean Penn pourrait être seul dans ce film tant la façon dont il joue est puissante. L'émotion est au rendez-vous grâce à lui, parfois même jusqu'aux larmes, tout au long de sa lente chute, jusqu'à sa décision finale.
Ce film est une véritable réussite. Inspiré d'un fait réel (mais après tout, ça ne change rien), il remonte à l'origine de ce qui peut pousser un homme à vouloir tuer le président des Etats-Unis. Mais, malgré le titre, ce n'est pas sur cet assassinat lui-même que se concentre le film. C'est justement sur cette descente progressive aux enfers. Alors, plutôt à la vie, à la souffrance.
The assassination of Richard Nixon est un film poignant, qui prend aux tripes et met vraiment mal à l'aise. A chaque claque que reçoit Sam Bicke, on en reçoit une avec lui. Le tout est d'autant plus touchant que cet homme n'est pas quelqu'un de mauvais, quelqu'un qui voudrait changer les choses en faisant le mal. S'il veut tuer, on sent que c'est parce qu'il est à bout, parce qu'il ne peut plus rien faire d'autre. On est ému par ce personnage, assassin ou non, ce loser dont la naïveté va parfois jusqu'à l'idiotie.
The assassination of Richard Nixon a également une résonance politique aujourd'hui. Un dépressif n'est qu'un grain de sable sur des millions, et pourtant il peut détruire les puissants. En particulier le président des USA, un des plus grands menteurs du point de vue de Sam. Toute similitude avec l'Amérique d'aujourd'hui serait-elle fortuite ?
The assassination of Richard Nixon de Niels Mueller. Avec : Sean Penn, Naomi Watts, Don Cheadle, Jack Thompson… Durée : 1h35