Un attentat à la bombe a fait dix morts et 39 blessés lundi sur un marché fréquenté de Moscou. L'explosion s'est produite le matin dans un des nombreux cafés que compte le quartier de Tcherkizovskï, connu pour ses marchés tenus par des commerçants caucasi
AFP
22 Août 2006
À 18:29
Les suspects sont deux jeunes hommes appartenant à un groupe nationaliste d'extrême droite, avait indiqué la veille une source informée au sein des services de sécurité.
En déplacement au Tadjikistan, le Procureur général russe Iouri Tchaïka a de son côté affirmé hier que les enquêteurs examinaient deux versions : l'attentat et le règlement de compte criminel.
«Selon les premières informations, il s'agit d'un attentat terroriste, cela peut aussi être un règlement de compte criminel», a déclaré M. Tchaïka à la presse à Douchanbé. Huit personnes ont été tuées sur le coup et deux ont succombé à leurs blessures à l'hôpital, a déclaré le procureur adjoint de Moscou Alexeï Grigoriev. Le ministère des Situations d'urgence a confirmé ce bilan en précisant que deux enfants figuraient parmi les morts. Et le parquet de Moscou, cité par les agences russes, a indiqué dans la soirée qu'il y avait cinq Chinois et un Vietnamien parmi les morts, les autres ne pouvant pas être identifiés dans l'immédiat «faute de papiers» prouvant leur nationalité. Trente-neuf blessés étaient toujours hospitalisés, selon le procureur adjoint.
«L'engin explosif de conception artisanale d'une puissance équivalente à 1-1,2 kg de TNT» a «endommagé un espace important», avait déclaré plus tôt le procureur de Moscou, Iouri Semine.
Nouriï, un vendeur de chaussures azerbaïdjanais de 37 ans, se trouvait tout près de l'endroit de l'explosion quand «le toit s'est envolé». «J'ai tout de suite compris que c'était une bombe à cause de l'odeur de la poudre», explique-t-il. «Les gens se sont mis à hurler et à se ruer en dehors du pavillon», raconte le marchand dont un compatriote, Jalal, a été hospitalisé avec une blessure au ventre.
Dans un premier temps, les autorités ont fait état de bilans contradictoires et évoqué tour à tour un accident à la bonbonne de gaz et l'explosion d'une bombe. Pour le procureur de Moscou, «l'hypothèse la plus vraisemblable est celle d'une explosion ayant pour motif la concurrence commerciale ou un conflit entre des groupes criminels».
«L'hypothèse de l'acte terroriste n'est pas complètement écartée» et l'enquête doit déterminer s'il s'agit d'un «acte prémédité», a indiqué M. Semine. Il y a bien eu deux détonations, «une première avec l'explosion de l'engin explosif, puis celle d'une bonbonne de gaz» toute proche, a-t-il précisé. Le Parquet et le FSB, les services spéciaux russes, ont confirmé dans la soirée que deux suspects qui avaient posé un sac près du café, avaient été arrêtés rapidement après l'attentat.
Pendant de longues minutes, les secours ont tardé à gagner les lieux de l'attentat en raison d'embouteillages crées par le flux de vendeurs fuyant en emportant leurs marchandises.
«La foule s'est précipitée vers la sortie, on a cru à des explosions de gaz», déclare Artiom, un marchand de 25 ans. Galina, une vendeuse de vêtements n'est arrivée qu'après l'explosion.
«Nous continuerons à travailler ici, de toute façon, à Moscou on a peur partout. On a peur de prendre le métro, on a peur de sortir de sa maison», affirme-t-elle. Le marché est «complètement ouvert» et il y a «partout des bonbonnes de gaz» utilisées par les vendeurs pour se préparer à manger ou se réchauffer, explique-t-elle. «Les riches ne viennent jamais ici. C'est sale et dangereux, mais tu peux acheter des produits cinq fois moins chers que dans les magasins», dit-elle. Interrogée sur l'hypothèse d'un attentat terroriste, elle répond que les «basanés (nom péjoratif donné aux Caucasiens et aux Asiatiques) ne se font pas exploser entre eux».
Depuis 1999, huit explosions dans des marchés de Russie ont fait des dizaines de morts et des centaines de blessés.
La plupart ont été attribuées à des rivalités entre commerçants ou mafieux pour le contrôle des marchés. En juin 2004, un attentat à l'explosif avait ainsi fait onze morts et près de 60 blessés sur un marché de Samara, dans la région de la Volga, et la piste d'un règlement de comptes criminel avait été privilégiée.