Spécial Marche verte

Punition violente : pour ou contre ?

Au Maroc, les convictions demeurent aussi contradictoires que logiques
>Au Maroc, où les mœurs ont beaucoup de valeurs, l'éducation des enfants est souvent marquée par les châtiments corporels. Ce genre de punitions fait partie aujourd'hui du quo

01 Novembre 2007 À 15:23

Qu'elles soient d'ordres 116iaux ou psychiques, elles demeurent (avouons le) aussi contradictoires que convaincantes. Zoom sur une polémique qui préoccupe les parents en matière d'éducation enfantine.

Il se peut que de nombreux "jeunes" parents soient opposés aux châtiments corporels, mais quelquefois, il arrive que la main dérape. Premier accusé: la provocation des enfants. Ces derniers sont rois en matière de vacarme, de cri et d'exigences capricieuses. Selon les spécialistes en pédopsychiatrie, les réactions farouches des parents ont pour origine leur impuissance, le surmenage quotidien et le stress.

"Garder son calme dans de telles situations ne s'avère pas une chose aisée. Souvent, mes deux chipounets me chauffent à blanc, je ne me maîtrise plus et je leur inflige une très bonne fessée. Cela les calme et je réussis facilement à m'imposer", témoigne Nada, jeune maman de 28 ans. Elle continue : "Certes, je suis pour l'éducation avec punition corporelle, mais il est primordial de savoir distinguer entre des bêtises simples et des conduites indisciplinées. Il faut aussi savoir où taper. Pour moi, c'est toujours une claque ou une fessée".
En effet, on peut engueuler l'enfant lorsqu'il se comporte incorrectement. Ensuite, si rien ne change et qu'il répète la bêtise, il faut le taper sans outrance. Cela veut dire dans la mesure de lui rappeler ce qui peut lui arriver s'il réagit de la même sorte. "Toutefois, si engueuler veut dire lui crier dessus, lui dire qu'il est mal élevé, indique qu'on n'est pas fier de lui, qu'il est nul… Je suis tout à fait contre et je préfère une bonne fessée à une humiliation verbale qui laisse l'enfant plus meurtri dans son estime de lui-même", précise le docteur Ghizlaine Benjelloun. Et de poursuivre : "Il faut savoir que les châtiments corporels de grands degrés ne sont pas un moyen d'éducation efficace, même s'ils peuvent servir momentanément à une personne adulte pour s'imposer. Les châtiments corporels tels que gifles ou coups sont une forme de violence infligée aux enfants".

Pour Mourad, 35 ans, père d'un seul garçon, l'éducation a un autre sens: "Pour moi, c'est souvent difficile, je n'ai qu'un seul garçon et je l'aime aussi fort à tel point de ne pas vouloir le punir ou le blesser psychiquement.
J'ai peur qu'il ne m'aime plus si je le tape. En même temps, je veux l'éduquer convenablement".
Or, l'éducation ne va pas sans punition. Une punition que certaines personnes la préfèrent verbale. "Je ne tape jamais mes enfants. Pour moi, c'est un acte barbare loin d'être utile pour l'éducation de l'enfant. Les tentatives ratées d'éduquer les enfants sans recourir aux châtiments corporels ne sont pas une raison pour mettre en doute l'éducation non violente. Il faut juste savoir comment punir", argue Mounia, ingénieur et mère de 4 garçons.

Pour les défendeurs des droits de l'enfant et les psychologues occidentaux, les coups sont à bannir. Pour eux, les enfants ont besoin d'amour et de respect. Ils ont une personnalité et cela dès leur naissance. Ils ont aussi une dignité et ce du simple fait qu'ils existent. Ces deux choses doivent ainsi être respectées pour que les petits bouts de chou ne se referment pas sur eux!

Savoir définir les vraies limites
Les enfants ont besoin de bien connaître leurs limites. Il ne s'agit pas de les protéger seulement contre les plaques brûlantes de la cuisinière, contre des escaliers raides ou contre les dangers de la circulation routière mais aussi contre l'absence des repères 116iaux. En effet, "les enfants qui grandissent sans avoir de limites à respecter ne savent pas ce qui compte vraiment. Ils ne savent pas ce qui est valable et ce qui ne l'est pas, ni à quoi ils peuvent se fier. Cependant, les règles et les limites signifient pour les enfants l'appui, la certitude et le sentiment de sécurité", explique notre spécialiste. Néanmoins, les limites à respecter ne sont pas là pour étouffer les capricieux, pour exiger d'eux obéissance et soumission mais pour les initier.

Par ailleurs, il ne faut surtout pas oublier que les enfants doivent s'épanouir et s'exprimer. Ils n'ont donc pas seulement besoin de règles, mais aussi de liberté et d'espace. Ainsi, les règles et les limites ne sont pas, pour les enfants, des panneaux d'111diction mais plutôt des "indicateurs ". "Les règles et les limites doivent être claires, directes et concrètes. Elles doivent indiquer à l'enfant comment se comporter, comment agir.

Si nous leur expliquons ces règles et que nous leur servons d'exemple par nos comportements, ils comprendront les règles et les limites et les respecteront, même si nous sommes absents", précise le pédopsychiatre.
Aussi, les limites doivent être respectées de manière cohérente et pérenne, car les limites ne servent à rien si on les respecte qu'une seule fois.
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La violence en école

Qui parmi nous ne se rappelle du cas de la petite Nihad Afroun. Cette écolière de 6 ans agressée dans une école à Tétouan par son instituteur. Ce cas en est un parmi d'autres qui reflètent la gravité des actes violents au sein de nos institutions scolaires. Il paraît que l'ambiguïté règne toujours entre le fait de sanctionner et punir. Chose qui devrait être éclaircie: sanctionner c'est faire preuve d'autorité en confrontant l'enfant à la réalité qui l'entoure. Quant à punir, c'est faire preuve de pouvoir et de puissance, en plaçant l'enfant dans l'impuissance et la soumission.
Du coup, les parents renient les comportements barbares subis par leurs enfants en école et n'acceptent pas que quelqu'un d'autres les touche.

Ce qui est paradoxal, c'est que depuis toujours, ils avaient recours au bâton, à la ceinture et aux pincements pour les sanctionner. Or, tant que cette punition n'émanait pas d'eux, ils la considèrent comme un mal grave et inacceptable.
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