Naissance de SAR Lalla Khadija

La chicha de plus en plus prisée

Le bec du tuyau dans la bouche, la fumée sortant des narines... Le tableau est devenu très familier à Casablanca. La consommation du narguilé n'a jamais été aussi répandue comme elle l'est aujourd'hui.

12 Décembre 2007 À 13:05

Pourtant, il y a trois ans, la wilaya du Grand Casablanca avait sorti un arrêté municipal n° 5 du 22 septembre 2004 interdisant la chicha dans les cafés et autres lieux publics. Cette mesure prise par l'ex-wali du Grand Casablanca, M'hamed Dreyf, et qui a été très saluée à l'époque, n'a pas freiné l'expansion de cette pratique. L'engouement pour ce tabac à sensation de fruits ne cesse de se propager. Au point où certains propriétaires de salons de thé et de restaurants ont reconverti leurs locaux en cafés à chicha. Des jeunes et moins jeunes, des garçons et des filles se donnent rendez-vous chaque après-midi dans un lieu servant la chicha pour soi-disant passer un moment de plaisir.

"On vient souvent ici après les cours pour bavarder pendant des heures, en se passant le tuyau. C'est un passe-temps sans plus", souligne un jeune étudiant. Une fille assise à ses côtés y voit, en revanche, un instant de plaisir à partager entre amis. "J'attends ce moment avec impatience chaque jour. C'est essentiel pour se reposer après une journée d'étude très chargée. Un pur moment de bonheur", a-t-elle précisé. Au fil de la conversation, on s'aperçoit que ces jeunes adeptes du narguilé minimisent ses effets néfastes sur la santé.

Beaucoup pensent qu'il est moins nocif que la cigarette. Ils avancent que l'eau filtre les substances nocives de la fumée. "Il n'y a aucun danger pour la santé puisqu'il ne contient pas de substances nocives. Le tabac utilisé est aromatisé", se défend un autre jeune. Changement de décor. Destination un café populaire à Derb Sultan. Ici, l'odeur du narguilé change également. Ce n'est plus l'odeur aromatisée qui se dégage du foyer de la pipe, mais plutôt celle de substance prohibée : haschich. Tout le monde au tour du narguilé est complètement concentré. Chacun attend sa tournée. Les hommes assis autour de la chicha sont ailleurs. Ici, se sont des accros de chit qui "tuent" le temps.

Entre les jeunes qui s'amusent et ceux qui prennent leurs doses de drogue, il y a un point commun : l'ignorance des risques encourus. " Il n'y a aucun danger. Cela fait des années qu'on fume ensemble. Et on est toujours là. Aucun de nous n'est tombé malade", lance avec défi un homme d'une cinquantaine d'années. La croissance du nombre d'adeptes de la pipe à eau constitue un véritable danger pour la santé publique. Les risques sont les mêmes que pour un fumeur de cigarettes en raison de la quantité de goudron et de nicotine aussi élevée dans la chicha que dans la cigarette. Elle cause les mêmes maladies que celles dues à la cigarette : cancer du poumon, du larynx, bronchites chroniques, maladies cardiovasculaires… En dépit de tous ces dangers, le ministère de la Santé, le garant de la santé publique, semble aux abonnés absents comme si le phénomène ne le concernait pas. Pas une action de sensibilisation à l'égard des risques encourus. Heureusement que le projet "collèges, lycées et entreprises sans tabac" est venu tirer la sonnette d'alarme contre le tabagisme qui mine la jeunesse marocaine.

Cette opération, parrainée par "l'Association Lalla Salma de lutte contre le cancer" (ALSC), intéresse dans une première phase 31 établissements scolaires des régions de Rabat, de Casablanca et du Souss (centre sud). Vivement d'autres actions et surtout d'autres mesures répressives à l'encontre des cafés et restaurants qui servent la chicha. Casablanca, où les consommateurs sont nombreux, le narguilé est offert à des prix qui varient selon la catégorie du café ou du restaurant-café, ou encore des hôtels, entre 20, 30, 40, 50, 60, 70 et 100 DH. N
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Le danger guette...

Selon une étude réalisée par l'OMS, une heure de la chicha est l'équivalent de 100 à 200 cigarettes par jour. L'étude révèle également que le fumeur de narguilé est exposé à d'importantes quantités de nicotine, de monoxyde de carbone et d'autres toxines que le fumeur de cigarettes. Elle dévoile aussi que la force nécessaire pour aspirer l'air à travers le tuyau permet à la fumée de pénétrer plus profondément dans les poumons.

Il est à signaler que le narguilé est vendu entre 20 à 40 DH, alors que le petit paquet de tabac utilisé dans la chicha est à 18 DH, le grand à 68 DH. Faites vos calculs et vous verrez combien gagnent les cafés qui vendent ce produit. On comprend bien leur grogne quand M'hamed Dreyf a interdit cette pratique.
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