Les femmes divorcées toujours au ban de la société
En 2003, ils ont été plus de 40.000 couples à divorcer. Après l'entrée en vigueur du Code de la famille, le chiffre est passé à 29.668 en 2005. Il est vrai que le Code de la famille constitue une révolution sur le plan juridique. Cependant, la société mar
LE MATIN
23 Septembre 2006
À 17:48
«Ma vie de couple est un malheur quotidien, mais je refuse de divorcer. Le fardeau sera bien plus lourd à porter», témoigne Nawal, 26 ans. Comme beaucoup d'autres femmes, elle préfère vivre l'enfer de la vie en couple plutôt que de faire face à une société «intolérante et sans pitié», selon elle. Mohamed, 40 ans, avoue qu'il n'accepte pas le divorce. «Une femme est censée tout sacrifier pour garder son foyer stable. Elle n'a qu'à éviter les problèmes inutiles pour conserver son mariage!», Témoigne-t-il.
Dans le même cadre, Houssein, propriétaire d'un immeuble, ne loue jamais à une femme divorcée. Selon lui «Elles sont toujours source de problèmes, elles sont une menace pour les familles…». Lamia se souvient : «Lorsque j'ai annoncé à mes parents que je suis en instance de divorce, ils m'ont clairement fait comprendre qu'ils ne voulaient pas de moi sous leur toit». Frustrée, elle cherche du loyer. «Cela a été une nouvelle épreuve, on ne loue pas facilement à une femme seule», explique-t-elle.
Elle ajoute qu'une fois le loyer trouvé, un autre problème se pointe : les voisins. Ils ne lui adressent pas la parole, l'évitent et lui créent des problèmes. «Quand je tarde au boulot, quand je reçois des visites, j'ai toujours droit à des remarques déplacées… Ils font tout pour que je quitte l'immeuble». raconte-t-elle, les larmes aux yeux.
Nadia, elle, est retournée vivre chez ses parents. «Je n'ai pas pu trouver de loyer et, en plus, j'avais besoin d'aide», explique-t-elle.
Elle avait cru que retourner chez elle, ce serait retrouver le soutien et l'aide de sa famille durant une telle épreuve psychologique. Cependant, ses parents qui ont toujours fait preuve de compréhension et d'ouverture d'esprit lui rendent la vie difficile. «Je n'ai pas le droit de sortir seule, c'est à croire que j'ai commis l'irréparable», s'indigne-t-elle. Elle ajoute que ses parents ont aussi tenu à ne parler à personne de son divorce. Cela ne fait qu'accentuer son sentiment de culpabilité. «Ils disent que mon échec risque de limiter les demandes en mariage pour mes jeunes sœurs, je commence à regretter de ne pas être restée mariée», ajoute Nadia.
«Le divorce n'est pas un crime. Il est prévu par le Coran, je ne vois donc pas pourquoi on ne tolérerait pas une telle erreur», explique Karima, une jeune fille de 20 ans.
Si les femmes divorcées se retrouvent dans une situation de détresse, les hommes, eux, sont plus chanceux. La société comprend l'homme qui «s'est trompé», et l'aide même à surmonter son divorce.
«Normal, la fautive c'est toujours l'épouse. L'homme lui, est victime d'une femme qui n'a pas su le garder», témoigne Hassna, 28 ans, elle-même divorcée depuis 3 ans. Samir partage le même avis que Hassna. «La vie de couple a été un échec car mon ex-femme et moi étions incompatibles, ce n'est pas la faute à personne. Mais tout le monde autour de moi traite mon ex-femme de tous les noms, ça me rend malade», confie-t-il. Il ajoute que le divorce a été de commun accord, et que tous deux ont le droit de refaire leurs vies.
L'homme retrouve une vie normale de célibataire endurci, avec ou sans enfants. Fouad, divorcé depuis 8 mois avoue n'avoir eu aucun problème, ni avec sa famille, ni dans son travail. «C'était un nouveau départ, j'en ai profité pour me donner à fond dans mon travail et pour prendre le temps de m'amuser», témoigne-t-il. La dissolution du mariage reste un problème juridique, financier et surtout social.
Le poids des traditions, le regard des autres et les problèmes familiaux constituent une nouvelle épreuve. Le divorce est censé réparer une erreur de vie et non en créer d'autres. Les mentalités sont donc à revoir.