Spécial Marche verte

Hadaf, une association œuvrant pour l'insertion des jeunes handicapés mentaux

" Dans le futur, j'aimerai être directeur d'entreprise. J'ai envie de travailler pour construire mon avenir, gagner ma vie et subvenir aux besoins de ma famille. Ceux qui se définissent comme normaux doivent prendre en considération les personnes handicap

10 Juin 2006 À 13:50

Je suis tout à fait capable de tenir une conversation sur des sujets sérieux, je peux travailler exactement comme n'importe qui.

En fait, peu importe ce que pensent les autres, moi je sais ce dont je suis capable et c'est le plus important. Après tout, nous sommes tous handicapés mais chacun à sa manière ! ", témoigne Hassan. Agé de 28 ans, Hassan est un jeune handicapé mental qui, après avoir passé de nombreuses années dans un petit cocon familial composé d'éducateurs spécialisés et d'amis, a été contraint de quitter le centre médico-pédagogique et s'est retrouvé du jour au lendemain privé de repères.

Son seul tort : avoir dix-huit ans ! Normalement, dans un autre pays, Hassan aurait été automatiquement pris en charge par une institution spécialisée qui aurait œuvré pour son insertion au sein de la société.

Cependant au Maroc, ces institutions sont rares. Au-delà de 18 ans, les centres médico-pédagogiques et les classes intégrées n'admettent plus de jeunes handicapés mentaux. Par ailleurs, l'absence de structures de prise en charge et le rejet de la société marocaine les marginalisent, sous-estimant leurs capacités à travailler.

Pourtant ils sont nombreux à vouloir faire quelque chose de leur vie. Conscients que le travail est un facteur indispensable pour l'intégration de tout individu dans la société, ces jeunes ont l'espoir de voir un jour leur rêve se réaliser: Choukri, un jeune handicapé de 25 ans, souhaiterait travailler dans l'administration afin de pourvoir subvenir aux besoins de sa famille ; pour Amine (21 ans), ouvrir un restaurant ferait son bonheur ; Loubna, elle, rêve de travailler dans une pâtisserie ; Taoufik, plus fantaisiste, voudrait être acteur… Malheureusement, sans une prise de conscience collective et sans la mise en place d'une structure qui permettra l'intégration des personnes handicapées, la plupart de ces jeunes ne pourront jamais voir leurs projets se concrétiser.

Un objectif à atteindre

Face à cette situation, des parents et amis de personnes handicapées, armés de leur amour et de leur volonté de lutter pour que leurs enfants et proches aient les mêmes chances que tous et pour que la société leur reconnaisse le droit à la différence, ont donné naissance, en octobre 1997, à l'association Hadaf, dont les objectifs sont d'œuvrer pour l'insertion sociale et professionnelle des personnes handicapées mentales âgées de plus de 18 ans, de les aider à faire face à leur handicap en leur permettant, par des activités créatives et productives, de renforcer leur confiance dans leurs potentialités et développer celles-ci, d'accompagner leurs parents et être à leur écoute, et de sensibiliser l'opinion publique afin de transformer l'attitude négative en une attitude intégrante, positive et de respect vis-à-vis de la personne handicapée mentale. " En arabe, Hadaf signifie objectif et le but de Hadaf est justement l'insertion socioprofessionnelle de ces jeunes pour les aider à sortir de l'isolement.

La personne handicapée doit non seulement être aidée ou protégée mais parvenir à un développement maximal de ses possibilités, avoir un travail convenable et digne d'elle et tenir une place à part entière dans la société ", expliquent les fondateurs de l'association. " La société doit bien comprendre le problème de l'handicap mental. Un handicapé est capable de faire beaucoup de choses, il comprend tout et aimerait avoir la possibilité de s'exprimer ", poursuit Fatiha Karzabi, éducatrice. Pour cela, l'association a tout mis en œuvre pour la réhabilitation, l'éducation et la formation des handicapés.

Par la même occasion et face à l'absence de loi en leur faveur, les membres de Hadaf ont sensibilisé la société civile, l'Etat, les collectivités locales, les établissements publics et les organismes de sécurité sociale pour qu'ils unissent leurs efforts afin de lever toutes les barrières au-devant de la personne handicapée. Les premiers pas de l'association ont été plus que satisfaisants : 14 jeunes ont intégré un atelier de formation professionnelle à la Ligue marocaine pour la protection de l'enfance (LMPE) à Rabat, et un local a été mis à sa disposition par la commune de Agdal Ryad, permettant la création de quelques ateliers de formation professionnelle, en particulier l'atelier bijoux et un atelier de soutien. Cependant, le manque d'espace prive plusieurs jeunes de ces formations.

Ainsi, à partir de l'année 2000, grâce aux différentes expositions de bijoux et aux diverses manifestations, Hadaf change de locaux pour s'installer au quartier Hay Ryad dans un petit appartement. L'association est reconnue d'utilité publique et est placée sous la Présidence d'Honneur de Son Altesse Royale la Princesse Lalla Amina.

D'autres ateliers voient le jour : cuisine, horticulture, informatique, groupes de paroles, soutien scolaire… Leurs objectifs : offrir une possibilité à ces jeunes de s'épanouir et une formation afin de leur donner confiance en eux-mêmes et de leur enseigner la responsabilité et l'autonomie que leur octroie un travail. " Au centre, nous essayons de leur expliquer que le travail est nécessaire et que cela implique une responsabilité, des compétences et surtout une discipline à suivre. Nous les préparons pour le jour où ils auront à travailler ", dit Fatiha Karzabi. En effet, l'insertion sociale dans le milieu ordinaire du travail n'est pas évidente pour la plupart d'entre eux.

Même si leur handicap n'empêche en aucun cas ces jeunes de travailler, la société n'est pas encore prête à les accueillir. Leur insertion doit être très bien étudiée sinon tout le travail éducatif, réalisé auprès de ces personnes, risque de tomber à l'eau. D'où l'importance de sensibiliser aussi bien les parents que l'employeur et les collègues de travail.

Un rêve qui peut devenir réalité

Actuellement, quatre jeunes travaillent déjà à mi-temps soit dans des entreprises soit dans des pharmacies. Ceux qui ont intégré l'association sont déjà en bonne voie.

Et d'ici un an au plus tard, deux autres jeunes intégreront le milieu de la restauration. Cependant l'association ne compte pas s'arrêter en si bon chemin. D'autres jeunes intégreront Hadaf et bénéficieront des formations. De nouveaux ateliers seront créés, et ceux déjà existants seront développés. " De plus en plus de personnes, et notamment des parents, commencent à s'investir et à apporter un plus. Ils ont compris que sans eux l'association ne pourra pas évoluer. Nous travaillons aussi en étroite collaboration avec des psychologues et des psychiatres et tout un réseau de médecins.

Mais il nous reste encore un long chemin à parcourir. La société doit croire en la personne handicapée mentale et lui donner sa chance. Et surtout il faut se dire que cela peut arriver à n'importe qui.

Nous pouvons tous un jour ou l'autre devenir handicapés ! " Nombreux sont ceux qui voient en Hadaf un avenir et ils se sentent prêts à participer à la réalisation de ce projet. Et comme le dit si bien Hassan : " Nous souhaitons tous que Hadaf aille de l'avant. Ainsi, nous pourrons tous travailler, acheter, avoir un salaire et réaliser nos rêves exactement comme les autres. "
Pour les aider et les soutenir, rendez-vous le 30 juin 2006 à 21 h à l'hôtel Rabat Hilton pour leur soirée de gala annuelle avec la participation de l'Orchestre Chabab Al andalous et de El Haj Mohamed Bajeddoub.

Hadaf : BP 8224, Poste des Nations unies, Agdal, Rabat, Maroc. Tél. / Fax : 037.65.21.38 Compte bancaire n° 138 00 050 117 27 - SGMB Beni Znassen, Rabat
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h2>Hadaf, un espoir pour les jeunesS'inscrivant dans la politique marocaine dont la détermination est de mettre l'accent sur l'amélioration de la qualité de vie des populations défavorisées, et dans l'objectif de réussir l'insertion socioprofessionnelle des personnes handicapées mentales, l'association Hadaf a depuis 2002 entamé, dans le cadre d'une convention signée entre elle-même, les secrétariats d'Etat chargés respectivement de l'Habitat et des Handicapés, et l'Erac Nord-Ouest, pour l'octroi d'un terrain d'une superficie de 1.447 m2, la construction d'un centre socioprofessionnel générateur de revenus à Hay Ennahda, à Rabat, qui permettra d'accueillir 100 jeunes handicapés.

Ses objectifs : orienter les personnes handicapées mentales selon leurs possibilités mentales et physiques ; leur proposer des prestations en matière d'accueil, de formation et de travail adaptées à leurs possibilités tout en leur garantissant un suivi social, psychologique et professionnel ; contribuer à la réalisation d'un projet formation-insertion individualisé soit en les insérant dans le milieu ordinaire du travail soit en leur offrant une activité dans les ateliers du centre ; les faire participer à la production dans les ateliers professionnels et utiliser le produit des ventes pour leur assurer une rémunération.

Le centre comprend deux parties : des ateliers de formation professionnelle et de soutien et une maison d'accueil (Dar Diaf), unité d'adaptation à une vie autonome conçue sous forme de chambres indépendantes et d'un appartement thérapeutique. Et pour assurer la pérennité du projet et pousser le centre vers une plus grande autonomie financière, un espace commercial abritera des stands proposant à la vente les produits réalisés par les jeunes dans les ateliers du Centre Hadaf.
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