Sous le Haut patronage de S.M. le Roi, inauguration à Beni Ansar du Musée Maréchal Mezian
L'inauguration, samedi 27 mai, du Musée Maréchal Mezian à Nador, a constitué le prolongement des grandes manifestations célébrant le 50e anniversaire de la création des Forces Armées Royales.
LE MATIN
28 Mai 2006
À 16:13
Placée sous le Haut patronage de S.M. le Roi Mohammed VI, une importante cérémonie a eu pour cadre la petite bourgade de Beni Ansar, à une douzaine de kilomètres de Nador, symbole de ce Rif fier et élevé où Mohamed Ben Kacem Az-Zahraoui – qui deviendra plus tard Maréchal Mezian – avait grandi et fait ses premiers pas de jeune homme. Une délégation officielle, en provenance de Rabat et de Casablanca et d'autres régions, s'y est rendue en force.
Elle était composée entre autres de MM. Fathallah Oualalou, ministre des Finances et de la Privatisation, Habib El Malki, ministre de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur, de la Formation des cadres et de la Recherche scientifique, Mustapha Mansouri, ministre de l'Emploi et de la Formation professionnelle, Mahjoubi Aherdane, ancien ministre de la Défense , Moulay Ismaïl Alaoui, secrétaire général du PPS, M'Hamed Diouri, membre du comité dirigeant du Parti de l'Istiqlal, Abdelouahab Benmansour, historiographe du Royaume, Mansouri Benali, chargé de mission au Cabinet Royal, Noureddine Chmâou, Mme Bahija Simou, historienne et chargée de mission du Cabinet Royal. La délégation comprenait par ailleurs des officiers supérieurs des FAR dont notamment le général Bouchaïb Arroub, le général Abdelhak Kadiri et le général Mohamed Belbachir, Othman Benjelloun, président du groupe BMCE Bank, le Dr. Leila Benjelloun Mezian, présidente de la Fondation Benjelloun et fille du maréchal Mezian, accompagnée au demeurant des membres de la famille Mezian – petits-fils et petites-filles -, des officiers supérieurs des forces armées d'Espagne, l'ambassadeur d'Espagne Luis Planas Puchadas, le gouverneur de la province de Nador, Abdallah Bendhaïba, les autorités et les représentants de la ville ainsi que des membres du groupe BMCE Bank. Une cérémonie familiale, à dimension nationale où, l'émotion mêlée au souvenir, l'histoire d'un soldat au long cours a été retracée, décrite par des témoins, une destinée individuelle confondue souvent avec un destin national. Le souvenir parcourait la salle de conférence du Musée, certes, mais allait au-delà de cette mer méditerranéenne qui, à quelques centaines de mètres, constitue la symbolique frontière avec l'Espagne qui est de tout temps, non pas uniquement notre voisine immédiate, mais notre miroir aussi. Le ton a été donné immédiatement avec un long témoignage de Mme Bahija Simou, historienne militaire si l'on peut dire, dont la voix faite de conviction et de chaleur communicative emplissait d'échos la salle du Musée et résonnait telle un fond de musique. Elle a parcouru à travers quelques pages passionnantes la carrière d'un homme appelé très tôt à faire l'Histoire, à relier deux destins, celui du Maroc et de l'Espagne, à jouer le rôle de vecteur d'une amitié que l'épreuve et la guerre n'avaient fait que renforcer. Son témoignage d'une grande richesse a mis en exergue le Haut patronage par Sa Majesté le Roi Mohammed VI de l'inauguration du Musée qui constitue, dit-elle, un événement majeur à la mémoire du Maréchal Mezian, héros d'une époque, soldat fidèle, figure emblématique de l'armée marocaine et espagnole. Mme Simou a souligné que Mohamed Mezian a été, aux côtés de feu S.M. Hassan II, alors Prince Héritier, l'un des fondateurs des FAR.
L'historienne militaire qu'elle est a choisi expressément de décrire cette période, 1956 à 1975, parce qu'elle focalise l'engagement d'un homme, qui avait déjà derrière un demi-siècle de faits d'armes, qui était chamarré de plusieurs décorations, qui à la tête d'un corps d'armée espagnol de moins de 20.000 soldats d'origine marocaine, montés du Rif, avait porté un rude coup aux républicains – à la bataille de Oued El Jarar –, à Teruel, à la bataille de l'Ebro, bref un homme vertueux célébré par l'Espagne et par le Maroc. Il avait rejoint en 1956 les Forces Armées Royales et avait servi le Trône avec fidélité jusqu'à sa mort en 1975, après avoir connu un parcours à la fois singulier et diversifié. C'est à ce parcours riche et diversifié que Mahjoubi Aherdane, le langage libre et ému, a tenu à rendre hommage. D'abord en tant qu'ancien soldat, ensuite en tant qu'ancien ministre de la Défense ayant connu le maréchal Mezian et en tant que témoin d'une période décisive de l'histoire du Maroc. " Il avait, dit-il, la pureté de l'âme et incarnait la figure du grand soldat. Il a fait la guerre d'Espagne dans la peau d'un Marocain, pour un pays ibère en tant que berbère.
Il a combattu en héros." Et d'ajouter " qu'un ministre de la défense comme moi, avec des grands comme le maréchal Mezian, c'était plus que la grandeur…Il restera une référence ". Evoquant l'autre figure des FAR, le général Kettani, Mahjoubi Aherdane, subtil et accrochant la salle, rappela ainsi " deux grands destins de l'armée, l'un issu des rangs d'Espagne, l'autre des rangs français mais tous deux engagés en 1956 pour l'idéal du Maroc, deux volontés, deux cultures et deux fiertés, l'un berbère et l'autre fassi. Il fallait les réunir. Ils avaient fini par s'embrasser… ", a-t-il souligné.
Ils avaient fini par se réunir et s'embrasser… En concluant son témoignage, qu'une mémoire phénoménale parcourait, Mahjoub Aherdane a quitté le podium, toujours aussi altier, Aherdane le berbère ! Et Othman Benjelloun, non moins ému, l'originaire de Fès s'est aussitôt levé et, avec l'orateur, se sont donné l'accolade. Ainsi l'histoire, celle d'un même destin, celle du Maroc berbère et arabe, a-t-elle continué au fil de la mémoire qui célèbre une continuité sous le regard d'un maréchal, serviteur de la nation, que l'artiste espagnol Escartin a immortalisé en 1970.
L'inauguration du Musée, cérémonie familiale nationale, a comporté plusieurs enseignements : celui du lien tissé entre la Monarchie et le peuple, celui du fond du Rif étant à l'honneur, celui ensuite de la réhabilitation de ce même Rif reclus des années durant et que S.M. le Roi Mohammed VI, dès son accession au Trône en juillet 1999, a tenu à visiter. L'enseignement ensuite d'une réconciliation nationale célébrée à travers une figure militaire, enfin celui de l'irréversible destin commun qui unit le Maroc et l'Espagne, séparés par un plan d'eau certes mais unis fortement et organiquement par des hommes comme Mohamed Bel Kacem Az-Zahraoui, issu d'un petit village mais dont l'histoire du XXe siècle a projeté deux peuples et deux nations dans un même destin collectif et partagé. Lui-même, visionnaire et d'une suprême sagesse, n'avait-il pas proclamé à Madrid en 1966 que " les Espagnols et les Marocains entretiennent des relations amicales très profondes et forment une famille. Il est vrai que le détroit de Gibraltar les sépare mais il les réunit en tout ce qu'ils ont en partage... " ?
Perpétuer sa mémoire et désenclaver culturellement une histoire mise aux oubliettes. On pourrait ainsi en conclure ! Cependant, nul mieux que sa propre fille, Leïla Mezian Benjelloun, ne saurait si bien le faire : "A travers la création de ce Musée, dit-elle, aménagé au sein de notre demeure familiale, construite au début du siècle dernier et restaurée dans le strict respect de son architecture et de sa décoration initiales, se perpétue la mémoire d'une personnalité militaire marquante qui, toute sa vie durant, a été défenseur des valeurs et institutions sacrées du Royaume, en même temps qu'il a symbolisé la proximité et la fraternité d'armes maroco-espagnoles. "