Grande manifestation à Beyrouth en mémoire d'Hariri
14 Février 2006
À 14:57
Quelque 250.000 Libanais munis de drapeaux se sont rassemblés hier dans le centre de Beyrouth pour saluer la mémoire de l'ancien Premier ministre Rafic Hariri, assassiné il y a un an jour pour jour.
Ce décès a provoqué un séisme politique au Liban, où des manifestations monstres ont réclamé la fin de 30 ans de présence militaire syrienne et où les élections ont amené au pouvoir une coalition anti-syrienne pour la première fois depuis la fin de la guerre civile (1975-1990).
Des milliers de soldats et de policiers libanais ont été déployés dans Beyrouth et ses environs, où les manifestants ont convergé vers la place des Martyrs, dans le centre-ville, où Hariri est enterré.
Les mesures de sécurité ont été renforcées après les incidents liés à la vague de protestations née de la publication de caricatures du prophète Mahomet. La mission diplomatique du Danemark, premier pays où les dessins ont été publiés, a été incendiée et une église a été vandalisée au début du mois à Beyrouth. «Tu nous manques», pouvait-on lire hier sur une grande photo de Rafic Hariri souriant brandie par des manifestants. «Ils avaient peur de toi, alors ils t'ont tué», était-il écrit sur une autre pancarte.
La manifestation était organisée à l'appel de la coalition anti-syrienne emmenée par le fils et héritier politique d'Hariri, Saad, qui réclame que les responsables de la mort de son père soient traduits en justice. «Je suis venue ici pour dire que le régime terroriste syrien qui tue n'échappera à la punition», a déclaré Amal Yassine, une mère de famille brandissant un drapeau aux couleurs de son pays.
Beaucoup au Liban soupçonnent la Syrie d'avoir fomenté cet assassinat. La commission d'enquête de l'Onu créée pour faire la lumière sur ce meurtre a d'ailleurs mis en cause des responsables de la sécurité syrienne et leurs alliés libanais. Damas a toujours nié toute implication.
Quatre généraux pro-syriens ont été arrêtés pour leur rôle présumé dans cette affaire, mais aucune mise en examen formelle ne leur a été signifiée. «Quatre sont tombés, il en reste un», pouvait-on lire sous une banderole montrant les photos des quatre généraux aux côtés de celle du Président pro-syrien Emile Lahoud, dont la coalition anti-syrienne réclame la démission. L'assassinat d'Hariri, un milliardaire ayant fait fortune dans le bâtiment devenu Premier ministre pendant dix ans entre entre 1992 et 2004, a soulevé une vague de sympathie de la communauté internationale envers le Liban et mis la pression sur son voisin syrien.
Le Président français Jacques Chirac, ami personnel de Rafic Hariri, a pesé de tout son poids pour obtenir que le Conseil de sécurité de l'Onu se penche sur cette affaire en votant plusieurs résolutions. «Je peux vous dire que la détermination de la communauté internationale tout entière pour trouver et punir les coupables, d'une part, et pour donner au Liban tous les moyens de l'indépendance, de la sécurité, de la démocratie et de la liberté, d'autre part, n'a pas bougé du tout», a déclaré le chef de l'Etat dans un entretien accordé à la télévision libanaise Futur TV. Malgré le départ des troupes syriennes en avril, une série d'attentats, l'assassinat de trois personnalités anti-syriennes et la résurgence de tensions politiques et communautaires font craindre que le Liban n'entre dans une nouvelle ère d'instabilité.