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Riquelme ou l'impossible succession de Maradona

15 Septembre 2006 À 15:51

Le meneur de jeu Juan Roman Riquelme, qui a pris sa retraite internationale à 28 ans seulement, a eu la trop lourde tâche de devoir succéder à Maradona dans l'équipe d'Argentine de football où son talent n'a brillé que par éclats, comme une promesse inassouvie.

«Depuis la fin du Mondial, ma maman a été hospitalisée deux fois, elle s'est fait du mauvais sang avec tout ce qu'elle a entendu sur mon compte, et dès lors ce fut très clair pour moi», a expliqué Riquelme pour motiver sa décision. Argentinos Juniors, Boca Juniors, FC Barcelone et les distinctions personnelles (meilleur joueur d'Argentine 1999 et d'Amérique du Sud 2001) : le parcours se calque sur celui de Maradona. Et porter le numéro dix sur le maillot albiceleste n'est pas anodin.

A tel point que la pression qui en découle a semblé réprimer la classe naturelle du maître à jouer lors de la dernière Coupe du monde. De fait, beaucoup d'Argentins ne lui pardonnent pas l'élimination contre l'Allemagne (1-1 a.p., 4-2 t.a.b.) en quart de finale où il n'a pas su «porter l'équipe à bout de bras». C'est sur ce thème que les critiques ont fleuri depuis le mois de juin jusqu'à en rendre sa mère malade.

Et comme un symbole de sa carrière internationale (37 capes, 8 buts) empreinte d'un frustrant leadership, il fut capitaine lors de son dernier match en bleu et ciel, une défaite 3-0 dans le grand classique sud-américain face au Brésil le 3 septembre à Londres. Son histoire en sélection a pourtant démarré en trombe, avec un titre mondial des moins de 20 ans en Malaisie (1997). L'année suivante, il étrenne le maillot des A dans son jardin de la Bombonera contre la Colombie (1-1) pour les éliminatoires au Mondial-1998. La vista, le coup de patte chirurgical, il a tout d'un grand.

Doublé par Messi Avec son club de Boca Juniors et sous la houlette de Carlos Bianchi, il fait chavirer Buenos Aires en battant notamment le Real Madrid (2-1) dans la Coupe intercontinentale à Tokyo, en novembre 2000. Le jeune meneur de jeu tape dans l'oeil des recruteurs du FC Barcelone. Il ne reste qu'un an en Catalogne, faute de s'adapter au jeu blaugrana. Le sélectionneur Marcelo Bielsa le range sur le banc parce qu'il ralentit le jeu, alors que le technicien compte sur des mouvements offensifs rapides. La nomination de José Perkerman en 2004 change la donne : le joueur devient titulaire indiscutable et dépositaire du jeu. «L'Argentine, c'est Riquelme», proclame même alors le nouveau sélectionneur.

La responsabilité ne sera assumée que partiellement, tellement les performances du N.10 se révèlent cyclothymiques. Il alterne en effet le bon, avec son club du «Sous-marin jaune» de Villarreal, demi-finaliste espagnol surprise de la Ligue des champions 2006, et le moins bon, comme au Mondial-2006 où il finit par sombrer.

Inspiré au premier tour de la Coupe du monde en Allemagne, au diapason de son équipe surclassant son groupe (avec le fameux 6-0 contre la Servie-Monténégro en point d'orgue), Riquelme disparaît ensuite de la circulation argentine. Il n'est pas le sauveur espéré, et le peuple argentin se rabat sur Lionel Messi, le jeune prodige barcelonais. Un messie officiellement adoubé, lui, par le dieu Maradona.
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