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Arrestation de l'ex-dictateur Juan Maria Bordaberry

Agé de 78 ans, il est inculpé pour des crimes perpétrés de 1973 à 1976

18 Novembre 2006 À 22:20

L'ex-dictateur uruguayen Juan Maria Bordaberry, inculpé pour des crimes commis sous son régime autoritaire (1973-1976), a été arrêté vendredi à Montevideo, une étape ouvrant un nouveau chapitre dans la transition démocratique de ce petit pays d'Amérique du Sud.

La justice avait annoncé dès jeudi soir avoir ordonné l'arrestation de l'ex-dirigeant, âgé de 78 ans, et de son ministre des Affaires étrangères, Juan Carlos Blanco, 72 ans, dans l'enquête sur l'assassinat d'opposants en 1976 en Argentine, à Buenos Aires.L'ancien dictateur s'est présenté lui-même vendredi dans la matinée à la préfecture de police de Montevideo où il a été interpellé, a indiqué le chef de la police, Sidney Ribeiro.

Bordaberry et l'ex-chef de la diplomatie, détenus à la prison centrale de la capitale, ont été inculpés par le juge uruguayen Roberto Timbal. Le parquet avait demandé en octobre que l'ancien dictateur uruguayen soit traduit en justice pour "attentat à la Constitution, homicide et disparitions forcées".

Bordaberry et son ministre sont mis en cause dans l'assassinat à Buenos Aires en 1976 du sénateur uruguayen Zelmar Michelini, du président de la Chambre des députés Hector Gutierrez Ruiz et des militants tupamaros (guérilla de l'époque) William Whitelaw et Rosario Barredo.

Cette affaire avait été déclarée prescrite en septembre 2005 avant d'être rouverte en mars 2006, une Cour d'appel ayant estimé que la prescription devait courir à partir du retour de la démocratie, faute de garantie pour les enquêtes menées auparavant.

Si l'ex-dictateur était traduit en justice, ce serait la première fois qu'un des responsables du régime serait jugé en Uruguay où a été voté en 1986, sous le premier gouvernement de Julio Sanguinetti, une loi d'amnistie dite de "Caducité", exemptant de poursuites militaires et policiers.

Toutefois, cette loi, qui engage le gouvernement à effectuer des recherches sur le sort des disparus, exclut du champ de l'amnistie les enlèvements à l'étranger ainsi que les délits d'ordre économique.
En tant que civil, Bordaberry, auteur du coup d'Etat du 17 juin 1973, n'est pas non plus protégé par cette loi, qui fut ratifiée en 1989 par un référendum populaire. "Bordaberry en prison", titre "El Pais", le principal quotidien uruguayen.

Sa détention constitue un nouveau chapitre de l'ère post-démocratique de ce pays de plus de trois millions d'habitants, où les débats demeurent vifs autour de la dictature, installée entre 1973 et 1985.

"La justice a parlé", s'est réjoui le Président uruguayen Tabaré Vasquez, premier chef d'Etat de gauche du pays, élu en mars 2005, dont le gouvernement a décidé de se pencher de nouveau sur les blessures du passé.

Le fils de l'ex-dictateur, Pedro Brodaberry, a en revanche dénoncé une "persécution politique", craignant que la société n'aille "de vengeance en vengeance".
L'ex-Président Sanguinetti a aussi toujours affirmé que le but de la loi d'amnistie était "de connaître la vérité" au nom de la réconciliation nationale, soulignant que "l'idée était de ne pas juger".
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