Jusqu'au 10 décembre, des actions de sensibilisation auront lieu dans différentes régions
Une loi pour les femmes, par les femmes
LE MATIN
28 Novembre 2007
À 13:20
Les chiffres faisant état de violence à l'égard des femmes sont alarmants. Selon une étude réalisée dernièrement par une association des droits des femmes, la violence économique vient au premier rang avec un taux de 37,31%, suivie par la violence physique (22,75%), juridique (20,66%) et enfin psychique avec un taux de 16,16%.
Et c'est pour justement mettre fin à ce fléau que cette année, à l'occasion de la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes, une campagne nationale de mobilisation communautaire et de consultation a été lancée.
Les initiateurs de cette manifestation ne sont autres que le bureau de terrain à Rabat de Global Rights et des ONG partenaires à travers le Maroc, soutenus par l'Ambassade du Royaume des Pays-Bas à Rabat. Lors de cette campagne, qui durera jusqu'au 10 décembre, une dizaine d'ONG locales mèneront une série de consultations avec des groupes de femmes de base pour solliciter leurs opinions, priorités et suggestions pour une loi sur les violences faites aux femmes.
« C'est très important dans ce processus de plaidoyer législatif que les voix des femmes soient exprimées pour que les reformes répondent véritablement à leurs réalités et à leurs besoins», a expliqué Mariam Zemouri de l'association Tawaza pour le plaidoyer de la femme à Martil. Ainsi, sur la base de ces consultations communautaires, chaque ONG partenaire créera avec les participantes un dessin illustrant les réformes demandées par les femmes elles-mêmes. De son côté, Global Rights réunira toutes les illustrations dans un poster « Promouvoir une loi contre les violences faites aux femmes». Celui-ci sera distribué au niveau national et servira d'outil pour les ONG locales dans leur travail de sensibilisation et de plaidoyer dans des réunions publiques avec des décideurs locaux.
Parallèlement, une tente de sensibilisation et de consultation sur la violence domestique sera organisée pendant trois jours à Sidi Youssef Ben Ali. «Cette action aura pour objectif d'utiliser les instruments internationaux de droits humains pour dresser les violences faites aux femmes comme une violation aux droits humains», souligne Halima Oulami de l'association El Amane pour le développement de la femme à Marrakech. C'est en septembre dernier que cette initiative de douze mois a démarré. La première action a été la tenue d'un atelier de formation à Fès, organisé par Global Rights au profit des ONG locales.
Lors de cet atelier, des activistes contre les violences faites aux femmes venant des Etats-Unis, de l'Inde, du Maroc et de l'Europe de l'Est ont partagé leurs pratiques, stratégies, et leurs expériences quant à l'élaboration de lois sur les violences faites aux femmes et à l'organisation des campagnes de plaidoyer législatif. De la même manière, les participants ont analysé des dispositions sur les violences faites aux femmes dans diverses législations à travers le monde et les obstacles rencontrés. Payal Saksena, militante des droits des femmes en Inde, a souligné l'importance des réformes compréhensives qui incluent à la fois le plan pénal et le plan civil et décrit le remède unique des « Ordres de protection » pour des cas de violence domestique.
Cheryl Thomas, de Minnesota Advocates for Human Rights, a rappelé aux participantes que toute loi sur les violences faites aux femmes doit accomplir trois objectifs: fournir de la sécurité pour la victime et ses enfants, tenir l'auteur de la violence responsable pour ses actes et donner un message public de zéro tolérance pour la violence faite aux femmes. -----------------------------------------------------------------
Le combat au niveau international
C'est en 1975, lors de la conférence de Mexico City, que pour la première fois, la violence à l'égard des femmes a été dénoncée internationalement. Le phénomène est désormais considéré comme un fait socioculturel "préjudiciable à l'égalité, au développement et à la paix". La violence faite aux femmes dans la famille est soulignée aux côtés d'autres formes de violence (viol, excision, rapt, enlèvement, travail forcé des enfants, prostitution,...) comme préoccupation devant faire appel à une prise de conscience du public.
Ensuite, en 1993, la violence à l'égard des femmes fait l'objet d'une déclaration adoptée lors de l'Assemblée générale des Nations unies en 1993. Cette déclaration consolidera l'appel antérieur de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (CEDAW, 1979). Ainsi, de cette façon, tous les Etats membres sont appelés à éliminer ce fléau.
Cette déclaration reconnaît par ailleurs que la violence à l'égard des femmes est une manifestation des rapports de force historiquement inégaux entre l'homme et la femme. La CEDAW se verra par la suite soutenue par un Protocole facultatif, approuvé par l'Assemblée générale des Nations unies (1999) et qui reconnaît au Comité de cette convention, la compétence d'examiner et de traiter les plaintes des femmes violentées après épuisement de tous les recours internes possibles. Le Maroc a adhéré à toutes ces conventions. Une stratégie nationale a même été lancée. Mais malheureusement, ce fléau continue à sévir. Et les chiffres des femmes victimes de violences ne font que croître !