Spécial Marche verte

Qui s'occupe de nos amies les bêtes ?

Des institutions mènent un vrai combat pour elles alors que le citoyen persévère dans leur maltraitance

15 Avril 2007 À 18:08

Que ce soit au souk, au village ou au beau milieu de la rue, de nombreuses espèces animales se croisent au Maroc et leur utilisation s'avère indispensable depuis la nuit des temps. Pourtant, elles continuent à être maltraitées, brutalisées ou abandonnées.
Pas plus tard que la semaine dernière, au quartier de Derb Ghalef, des poussins colorés étaient entassés dans des cartons et proposés à la vente.

Ces nouveaux jouets organiques coûtent un dirham la pièce.
Une passante en fait le constat «Les parents, souhaitant faire plaisir à leurs enfants, leur achètent, en guise de joujoux, des poussins vivants, qui meurent au bout de quelques jours.

Un dirham, ce n'est même pas le prix d'un simple jouet en plastique… C'est barbare !». Une autre forme de maltraitance se constate au Maroc, celle des animaux de trait. Les chevaux, mulets et ânes sont partout.

Certes, les équidés semblent encore indispensables à notre société insuffisamment mécanisée, mais ces bêtes souffrent souvent d'un traitement inadéquat face à leurs lourdes tâches.

Elles souffrent de diverses maladies, notamment de blessures, de parasitoses et de carence nutritionnelle. Heureusement, il existe quelques institutions qui s'occupent de la protection des animaux,
surtout dans les milieux défavorisés. Elles s'activent depuis des années et leur prodiguent des soins vétérinaires.

La pauvreté et l'ignorance étant les principaux facteurs de cette situation, ces organismes entreprennent d'éduquer les propriétaires pour leur faire prendre conscience de l'importance de maintenir leurs animaux en bonne santé.

C'est le cas de l'Union marocaine pour la protection des animaux (UMPA). Martine, Pauline et Elise sont trois Françaises, assistantes bénévoles au refuge animalier de Bouskoura, qui s'étend sur 6000m2. Le Dr Rachid Bagachoul, vétérinaire et également président de l'Union, y effectue ses interventions à titre gracieux.

Cet abri est équipé de locaux pour les équidés, les chiens, les chats et les oiseaux. L'UMPA utilise une «Fiat Uno» pour ramasser les petits animaux. Quant aux gros chiens et équidés, vu leur taille, ils sont transportés dans des «Honda» louées.

Concernant les objectifs du refuge, Mme Elise Baron explique que cet abri vise «l'amélioration du sort des animaux, notamment par le traitement des animaux blessés, souffrants ou malades, à titre gratuit».

En effet, le centre est ouvert uniquement aux personnes démunies dont l'animal (cheval, chien, chat, oiseau…) peut bénéficier de soins et d'une hospitalisation gratuite.
D'autres personnes rendent visite au refuge, pour se débarrasser de leur animal.

Ces personnes donnent des arguments, du genre «Ma femme est enceinte, mon enfant est allergique ou est parti pour un long voyage, mon animal est devenu agressif, etc.).

Au sujet du fonctionnement du refuge, Elise Baron qui est là depuis 1994, explique que «les bénévoles de l'Union ramassent les animaux abandonnées et les font examiner par le vétérinaire.
Ils seront placés chez un maître attentionné et auront droit au vaccin contre la rage. Le délai de garde en vue de l'adoption est de 4 mois.

Si l'animal est adopté, il sera automatiquement stérilisé. À défaut, c'est l'euthanasie». En effet, l'UMPA a réussi à prendre en charge l'euthanasie des animaux errants de la fourrière. Avant, les animaux étaient euthanasiés avec de la strychnine, un puissant poison. Les chiens mettaient parfois 3 à 4 jours pour mourir dans des souffrances atroces. Elise Baron explique : «Notre activité humanitaire consiste à euthanasier, sous le contrôle de notre vétérinaire, les animaux avec le "doléthal", un puissant anesthésique. L'animal s'endort, puis part sans souffrance».

L'euthanasie représente une lourde charge dans le budget annuel du refuge. Une bouteille de doléthal coûte 650 dirhams et permet d'euthanasier entre 20 à 30 chiens. Malgré toutes les difficultés et les rudes conditions de travail, les bénévoles de l'UMPAcontinuent à être animés par leur devise «Les aimer pour les comprendre, les comprendre pour les défendre». La Société protectrice des animaux et de la nature œuvre également dans ce domaine.

Affiliée à la SPANA de la Grande Bretagne, elle a été créée pour protéger les animaux de trait et de compagnie. Pour atteindre ses objectifs, elle opère à partir de ses dix centres régionaux. L'un d'eux se trouve sur la route reliant Bouskoura à Lissasfa. Un grand bâtiment neuf, des blocs parfaitement bâtis, des chenils et des chatteries servant de refuge aux animaux abandonnés. C'est le même principe qu'au refuge de l'UMPA.

Mais loin du bénévolat de l'UMPA, dans la SPANA, tout le personnel est salarié. Tous les matins, la clinique mobile de l'établissement se rend dans les souks pour soigner les ânes ou les mulets. Abdelhak, responsable du site de Ain Djemaa, précise que «les animaux sont examinés sur place ou ramenés au centre s'il y a urgence.

Ces bêtes sont les moyens de travail indispensables, la survie de nombreuses personnes en dépend». Tous les services de la SPANA sont entièrement gratuits et sont destinés aux animaux dont les propriétaires sont démunis. Un troisième pôle casablancais, s'active au côté des animaux. Il est généralement perçu de façon négative. Il s'agit de la fourrière municipale de Casablanca.

Son principal rôle est le ramassage des animaux errants. Au bout de quatre jours de capture, les bêtes non réclamées” sont euthanasiées, au quartier général du service, dans les anciens abattoirs, par les soins de l'UMPA. Les cadavres sont ensuite acheminés vers l'incinérateur où ils sont carbonisés.

Pourtant, l'euthanasie à but «humanitaire» crée encore la polémique. Ceci dit, si ces organisations oeuvrent pour défendre les différents animaux de trait, domestiques ou même errants, quelques citoyens continuent à maltraiter et à abandonner leurs bêtes. Ces efforts risquent d'être des coups d'épée dans l'eau, face au vide juridique et éducationnel relatif à la protection animale.

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L'adoption à l'UMPA ?

La procédure est simple. Il suffit d'un coup de téléphone. Une visite sur place est programmée. L'adopteur doit remplir un questionnaire. En effet, des critères sont requis pour pouvoir adopter un animal. Les membres de l'association s'assurent que l'acte ne répond pas à un simple caprice.

Car prendre soin d'un animal engendre beaucoup de contraintes et d'abnégation. L'association effectue également un contrôle pour s'assurer que ce dernier n'est pas maltraité. L'animal est adopté lorsque le demandeur fait preuve d'une bonne attitude vis à vis de l'animal.
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