Gisèle Halimi présente La Kahina à Rabat
Pour un engagement formel dans la défense des causes justes
LE MATIN
14 Février 2007
À 15:29
C'est devant une assistance de diplomates, d'intellectuels et de nombreux étudiants de l'Institut supérieur de l'information et de la communication (ISIC) entre autres, que s'est déroulée la rencontre avec Gisèle Halimi autour du thème «Engagements et «La Kahina».
Une conférence où l'essayiste et romancière a présenté son dernier ouvrage historique «La Kahina».
Publié en 2006 aux éditions Plon, ce roman raconte l'histoire de cette reine berbère de l'Aurès qui a bouleversé les troupes du général Hassan au VIIe siècle.
Célèbre, également, par sa loyauté, sa sagesse et sa clémence, son règne a connu la réunification des tribus
berbères. Chose qui ne s'est jamais produite ni avant ni après sa gouvernance, selon les textes historiques où a puisé l'auteur. Mais, en dehors de sa réputation de guerrière sans égale, on lui prêtait aussi des dons surnaturels, d'où son surnom de «Kahina».
Ayant adopté une technique de guerre particulière avec comme loi fondamentale de ne jamais constituer de prisonniers, cette reine berbère a mené une bataille de résistance et non de religion. Son but était de défendre ses terres et ses traditions berbères. Dans son ouvrage, Gisèle Halimi a su mettre en exergue la face cachée de cette femme, symbole de l'engagement et de la résistance, à travers des recherches très poussées dans des ouvrages d'histoires où elle s'est basée sur des constantes qui ont prévalu dans la majorité des écrits.
Sa conférence a été, aussi, l'occasion de dévoiler à l'assistance les grandes causes auxquelles elle a pris part durant son parcours professionnel, dont celles qui ont secoué la France depuis la guerre d'Algérie, en défendant les combattants du FLN, comme elle a participé dans les luttes féministes du XXe siècle en fondant le mouvement «La cause des femmes» avec Simone de Beauvoir.
Son engagement pour la défense des causes justes et son ambition fulgurante l'ont amenée à occuper des postes de grande importance, ayant toujours une relation avec ses combats quotidiens, cristallisés dans différents procès qu'elle a pris en mains, dont le célèbre épisode de sa vie, récemment mis en scène et porté à l'écran sous le titre de «Le Procès de Bobigny».
Actuellement, Gisèle Halimi assure la défense du leader palestinien Marwan Barghouti, détenu par les israéliens.
REPÈRES
Ses fonctions
Députée à l'Assemblée nationale (1981-1984).
Ambassadrice déléguée permanente de la France auprès de l'Unesco (avril 1985 - septembre 1986).
Représentante de la France au Conseil exécutif de l'Unesco (jusqu'en octobre 1987).
Conseiller spécial de la délégation française à l'Assemblée générale de l'Onu (octobre 1989).
Rapporteur pour la parité entre femmes et hommes dans la vie politique (Observatoire de la Parité - Décret du 18 octobre 1995).
En mission culturelle dans les universités américaines et canadiennes (septembre/octobre 2002).
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«J'ai tout le temps lancé "C'est injuste”»
111VIEW • Gisèle Halimi
L'écrivaine parle de son parcours professionnel
Votre choix du personnage de La Kahina n'est pas un pur hasard, car il reflète un peu votre identité et vos engagements. Mais, pourquoi avoir attendu tout ce temps avant d'écrire cet ouvrage?
En effet, depuis mon jeune âge, je me suis identifiée à ce personnage que mon grand-père me décrivait comme une femme magnifique et un grand stratège militaire. Et depuis, j'ai porté ce nom en moi. Mais il a fallu du temps pour entamer beaucoup de recherches historiques rigoureuses, pour ne pas commettre d'anachronisme. Donc, je me suis orientée vers les écrits historiques les plus fiables, puis j'ai mené une étude très poussée aux côtés de sociologues et d'anthropologues qui ont pu éclairer certains mystères de la vie de cette femme.
Quels sont les points communs que vous avez tout de suite ressentis entre vous et La Kahina ?
Déjà notre venue au monde fut ressentie comme une malédiction pour nous deux. Moi, parce que mon père n'était pas fier d'avoir une fille et a caché ma naissance pendant toute une semaine avant de le dire aux voisins. Et elle, parce qu'elle était la fille d'un roi qui aurait préférait un héritier mâle. Donc, nos destinées se regroupent déjà sur ce point, sans parler de l'engagement pour la même cause, celle de la liberté du choix de vie.
Votre choix du métier d'avocate engagée a-t-il été guidé par un quelconque comportement dans votre vie ?
Depuis mon jeune âge, j'ai été contre l'injustice. J'ai tout le temps lancé la phrase «C'est injuste». Donc, ce refus de l'injustice dans toutes ses formes m'a poussée à choisir le métier d'avocate engagée. Mes batailles ont toujours été menées pour les mêmes causes, car pour moi, il n'y a rien de plus facile que de rester fidèle à ce qu'on a choisi au départ.
J'ai opté pour défendre la cause des femmes, dans le but de changer la vie discriminatoire qu'ont menée ma mère et ma grand-mère et que j'ai refusée depuis que j'étais enfant. Ces comportements que j'ai subis moi aussi lorsque j'ai été jeune sont pour quelque chose dans ma lutte continue pour les combattre.