Redoubler : les vrais risques
L'année scolaire vient de s'achever. Pour certains élèves, c'est la fête ; pour d'autres, c'est le cauchemar!
LE MATIN
14 Juin 2007
À 15:47
Va-t-il réussir ou non? Telle est la question qui taraude, à chaque fin d'année, la majorité des parents, soucieux du cursus scolaire de leur progéniture.
Il va sans dire que le redoublement d'un niveau est bénéfique pour les enfants incapables de passer à la classe supérieure, mais cet échec, ne présente-t-il pas une source de démotivation pour l'élève ? Ce passage douloureux peut-il avoir des conséquences négatives sur le psychisme de l'enfant ? Comment réagir face à un désarroi qui dépasse souvent le cadre de l'école.
Démotivation, perte de confiance, mauvaise estime de soi, ce sont les principaux symptômes développés par la majorité des jeunes redoublants. Cette situation est le plus souvent difficile à accepter par l'élève. Ce dernier se retranche derrière une attitude butée et refuse en bloc tout conseil, marquant par là son mécontentement face à un événement qu'il ne maîtrise pas.
En effet, l'enfant ou l'adolescent ne réussit pas à se projeter d'une année à l'autre, il ne voit donc pas à long terme les bénéfices d'un redoublement.
Un élève qui rate son année scolaire, a très souvent le moral dans les talons et à force d'essayer de comprendre les causes de son échec, il risque de sombrer dans la détresse.
Le Dr Ghizlane Benjelloune, pédopsychiatre, explique que «La bonne attitude des parents ne peut qu'être bénéfique pour que l'enfant traverse ce passage sans crise profonde et sans souffrir de troubles psychiques graves». Toutefois, pour que le redoublement soit bien vécu par l'élève, ce dernier doit comprendre sa part de responsabilité dans l'échec, ce qui va l'amener à réfléchir sur les nouvelles mesures à prendre pour ne pas reproduire les erreurs de l'année passée. Pour cela, il doit sentir que ses parents eux-mêmes sont convaincus que c'est une décision bénéfique pour lui.
En effet, fragilisé par ce qu'il vit comme un échec personnel, le jeune «redoublant» s'attend au soutien de ses parents. Ces derniers doivent lui montrer qu'ils lui font toujours confiance, car ça ne fera que l'aider à retrouver son estime de soi. Il ne faut surtout pas que les parents fassent part de leur sentiment de déception, ou de leur anxiété. Cela risque de culpabiliser l'enfant, qui pensera qu'il n'est pas à la hauteur des attendes de ses père et mère.
Il doit comprendre qu'il travaille pour lui-même, et non pas pour leur faire plaisir.
A défaut, un enfant stigmatisé aura du mal à s'adapter en classe: «Les élèves redoublants ne se comportent pas de la même façon», constate Abdelilah, professeur dans une école primaire publique. «ce qui fait que ceux qui ont redoublé ont souvent moins d'ambition scolaire. Le redoublement marque les élèves et les atteint dans leur estime de soi, il y a un sentiment de honte.
L'échec est toujours mal vécu dans nos institutions», estimet-il, désabusé. Certes, les déboires sont souvent durs à accepter, mais le degré de culpabilité n'est pas toujours identique. Pour les enfants ou les adolescents, les réactions sont la plupart du temps différentes.
Tout d'abord, il y a des différences au niveau des classes : Dans le primaire, il n'y a pas de paresseux. A cet âge-là, un enfant veut de toute façon faire plaisir à ses parents. S'il est en difficulté scolaire, il ne le fait pas exprès, car il existe toujours une cause qui l'empêche d'avoir de bons résultats.
Quant au collège, l'élève doit s'investir plus personnellement. C'est aussi le temps de la puberté et de ses bouleversements, qui font que la scolarité est un peu désinvestie.
Cependant, le désir de faire plaisir aux parents est moins présent. Enfin, il y a le lycée, et là c'est encore différent ? car l'obtention du diplôme est la seule issue. C'est le moment où le jeune doit se prendre en charge. Généralement, cette phase constitue un moment d'intense stress scolaire, surtout dans les milieux favorisés, où les enjeux autour de la réussite sont extrêmement forts.
Cependant, l'échec scolaire n'est pas la fin du monde! Les grandes vacances constituent en effet un moment opportun pour mener une action à double détente: d'abord dresser le bilan de l'année sanctionnée par l'échec, ensuite, mettre les batteries en marche en vue de mieux aborder l'année suivante.
Bien qu' il existe plusieurs causes de redoublement, chaque élève est unique et l'échec prend un sens différent pour chacun d'entre eux.
Il ne faut pas hésiter à dialoguer avec l'élève, qui a parfois un projet bien différent de celui de ses parents. Lui demander comment il envisage la suite de sa scolarité et son avenir.
Le faire parler de son projet permet aussi de voir si sa démarche est cohérente, et de s'assurer qu'il n'existe pas d'autres solutions, ou des blocages, car certains élèves perdent confiance en eux suite à des problème de violence,
de racket, dont ils ont beaucoup de mal à parler avec les
adultes.
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Que faire en cas de difficultés scolaires?
Avant toute action, il faut faire attention à ne pas culpabiliser l'enfant pour ses mauvais résultats, et surtout il ne faut pas les comparer avec ceux, meilleurs, de ses frères et sœurs. Il faut savoir que l'enfant est fragilisé et peut développer des sentiments d'échec, d'infériorité, d'impuissance et surtout d'humiliation.
Tout d'abord, il faut essayer d'agir dès que la difficulté apparaît, car il faut être conscient que les choses s'arrangent rarement d'elles mêmes. La première démarche est de demander un rendez-vous avec l'enseignant. L'enfant doit pouvoir assister à tout ou partie de ce rendez-vous. Il verra ainsi que ses parents et ses enseignants se mobilisent autour de son problème et qu'il ne va pas rester seul devant ses difficultés.
Cela va l'aider à reprendre confiance en lui-même, c'est un facteur très important qui sera un atout majeur pour résoudre son problème. Ensuite, il faut essayer de réfléchir à deux aux causes de cet échec et rapprocher les points de vue des enseignants. Enfin, il faut responsabiliser l'enfant en lui laissant une part active dans son travail, tout en le soutenant : être ouvert à la discussion, s'intéresser à ce qu'il fait et le rassurer.
Ainsi, la meilleure façon de le rassurer est de l'aider à identifier ses points forts : il faut tirer profit des qualités de l'enfant pour qu'il prenne conscience que sa personnalité a une certaine valeur malgré son échec scolaire.