Les vêtements usagés ne sont plus l'apanage des pauvres, d'autres bourses emboîtent le pas >Dans la plupart des villes marocaines, le marché de la friperie a gagné du terrain. A des prix à la limite dérisoires, plusieurs ménages peuvent s'offrir
LE MATIN
04 Août 2007
À 22:48
Regroupant toutes sortes de marchandises, souk Laarbâa ne cesse d'attirer de nouvelles clientèles. On déballe par-ci, des ballots contenant vestes et pantalons par-là des colis renfermant des chemises, des robes, ailleurs, des souliers, des bottes chiffonnées. Là-bas encore, les fripiers étalent des sous-vêtements féminins, des bas, des pulls, tout froissés mais attirant des foules de clients, toutes à la recherche du «bijou rare». A Souk Laarbâa, tout se vend 6h30: les premiers vendeurs déchargent leur fourgonnette bourrée de balles de fringues, tout doit être trié avant l'arrivée des clients matinaux.
En effet, cette catégorie qui vient s'approvisionner le matin est surprenante, car il s'agit des acheteurs riches, venant chercher la perle rare ou le vêtement signé, de quoi se démarquer des autres. «Si au petit matin, les plus riches viennent chercher l'habit unique et signé, les retardataires de classe moyenne se bousculent avec les plus pauvres tout au long de la journée», affirme Salah, vendeur depuis 4 ans.
Cependant, à Souk Laarbâa, il faut être un lève-tôt, le mercredi, pour pouvoir dénicher une bonne pièce. C'est vers 7 heures du matin que les vendeurs commencent à étaler la marchandise. Les clients les plus avertis viennent à cette heure de la matinée et commencent à chercher dans les balles avant même que les marchands ne terminent la mise en place de leurs éventaires. Pour les vendeurs, il n'est pas question de balancer tous les articles au même prix.
Une fois les balles ouvertes, ils font le tri des articles par catégorie. Le premier choix, le deuxième et le troisième. Pour une chemise de la première catégorie, le prix est de 60 DH, la deuxième catégorie est entre 30 et 40 DH, tandis que la troisième, elle, est vendue à 20 DH. Au marché de la friperie, l'ordre est maître du lieu. Certes les vêtements sont entassés pêle-mêle, mais par catégories : les pantalons avec les pantalons, les tee-shirts avec les tee-shirts et ainsi de suite pour ce qui est des sous-vêtement, vestes, chaussures, slips, ceintures, pyjamas et même couvre-lits... «Je dois tout organiser sinon je risque de ne pas avoir une bonne marge de gain, lorsque j'achète une balle, je sais ce qu'elle contient comme vêtement, chemise, pantalon ou autre, mais j'ignore la marque, le niveau d'usure et la gamme. Alors, je dois trier pour vendre chaque classe à un prix précis», explique Salah, vendeur.
Les clientes «In» cherchent des jupes, des robes et des foulards en soie signés. «Souvent, elles avancent qu'elles sont là juste pour acheter des habits à leur bonne ou pour faire des achats au profit d'une association caritative», témoigne Salah ironiquement. En revanche les plus franches affirment chercher des marques signées, car dans les balles, «on trouve des articles de très grande qualité presque neufs et même des articles totalement neufs, avec leur étiquette», déclare cette cliente. Il s'agit des fins de série dont se débarrassent parfois les grandes surfaces ou les grands magasins occidentaux.
Pour les ménages de la classe populaire, leur seul intérêt est le prix. «Il faut que j'habille mes quatre enfants », avance cette femme. Quoiqu'il en soit, au marché de la friperie, tout le monde trouve son compte. «Aujourd'hui, plus personne n'hésite à venir rechercher un habit encore portable ». En effet, des hommes et des femmes, accompagnés de leurs enfants, ne se gênent pas de fouiller dans les tas de vêtement, entreposés ici et là sur des étales de fortune.