L'humain au centre de l'action future

L'boulevard, détonant !

La culture urbaine conforte sa place au soleil
>N'en déplaise à ceux qui n'y croient toujours pas, la nouvelle scène musicale marocaine est aujourd'hui une réalité incontournable ! L'boulevard confirme d'une édition à l'autre que c'est une vérita

04 Juin 2007 À 15:32

La bande à Momo et Hicham a frappé encore plus fort cette année ! Avec plus de 30 groupes venus des quatre coins du royaume, 17 formations étrangères, des ateliers de création en musique, en art vidéo, un festival du film documentaire musical, des tables rondes sur la place et la pertinence de la «darija» dans l'ancrage de l'identité marocaine, des expos photos et bien d'autres activités, l'EAC-L'boulevart poursuit le chemin de la construction d'un vrai mouvement créatif sur le plan national.

Pour Amale Samie, alias Tonton, «...ces jeunes, qui sont disséminés dans tout le pays, osent crier leur différence, ils sont le mouvement. La mentalité, ils la changent tous les jours... quelque part, ils sont l'alternative à une réalité qui pousse d'autres jeunes dans le gouffre du nihilisme qui mène à l'explosion...» Ce rendez-vous annuel a drainé plus de 150.000 spectateurs venus de tout le Maroc.

On y trouve toutes sortes de looks déjantés, toutes sortes d'attitudes à la limite de la provocation, face à un conservatisme qui persiste à donner une image folklorique stéréotypée de notre identité culturelle. Les «Rappeurs», les «Metallos», les «Fusionneurs» voient L'boulevard comme un tremplin nécessaire, et commencent à envisager leur art en termes de carrière et non plus comme un simple hobbie.

L'boulevard a réussi là où d'autres ont échoué. Il a pu rendre compte de la réalité d'une jeunesse fière de sa marocanité, et parfaitement intégrée dans son époque, à l'image du groupe Celsius (Metal) qui crie haut et fort : « Nmout ana ou t3ichi nti ya bladi !» (Je suis prêt à mourir pour que vive mon pays).

Son succès a dépassé les frontières, d'autres événements similaires en Europe, comme «Garrorock» en France, collaborent étroitement avec l'équipe qui a transformé la scène artistique dans notre pays. D'ailleurs, l'échange artistique a pour but de permettre aux artistes des régions de Casablanca et d'Aquitaine d'échanger leur savoir artistique et de jouer devant de nouveaux publics. Chaque année, 10 jeunes du boulevard sont envoyés au Garorock pour des stages d'observation dans les métiers du spectacle : son, lumière etc.

De façon à découvrir de l'intérieur le mode de fonctionnement d'un tel festival. ,Farida Belyazid, cinéaste qu'on ne présente plus, affirme que «ces jeunes ont du talent à revendre, ils le démontrent en toute liberté, et ne se plaignent pas !» Dans le but de développer les pratiques musicales et de favoriser les rencontres entre musiciens de cultures différentes, L'Boulevard a accordé, cette année, une grande place de sa programmation aux spectacles nés pendant des résidences musicales.

Organisés par différents organismes tels que l'EAC, le British Council, ou encore l'Institut français d'Agadir, ces résidences sont l'occasion pour le public et les artistes marocains de découvrir d'autres horizons musicaux. Par ailleurs, des invités de marque ont pris part à la fête. Macaco, pour ne citer que lui, est plus qu'un simple groupe, c'est une explosion musicale. Créé en 1997 à Barcelone par Dani «El mono loco», ce groupe réunit des musiciens de différentes origines : le Brésil, le Cameroun et le Venezuela. Côté Hard, le groupe Paradise Lost qui est considéré comme le pionnier du Gothic Metal, a répondu présent aussi.

Créé à Halifax (GB) en 1988, et ayant à son actif douze albums, ce groupe dont le nom est tiré du poème de John Milton étonne encore la critique et les fans par son goût pour l'innovation et l'expérimentation. La preuve que L'boulevard est convainquant même à l'exérieur du Maroc !
De cette expérience qui conjugue l'audace à la créativité, est issue une génération de stars. Bigg, Darga, Hoba Hoba Spirit, H-kayne, Barry, Casa Crew, DJ Zayane Free Man, Mazagan, Amarg Fusion, Fès City Clan, Kachla, Mobydick, Fnaire et bien d'autres encore sont devenus des noms avec lesquels s'identifie toute une génération.

Ce n'est pas pour rien que certaines formations politiques ont voulu les instrumentaliser à des fins électoralistes ! La scène alternative attire beaucoup plus de monde que ces «artistes» en costard cravate ou en robe longue, qui passent leur temps à se plaindre, plutôt que de faire preuve d'inventivité. Itoube !
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Un festival citoyen

Plus qu'un simple festival qui privilégie le spectaculaire, L'boulevard est le véhicule d'une culture citoyenne. Des stands de l'ALCS, d'ATTAC, et même du CCDH étaient présents pour sensibiliser la jeunesse sur ses droits, sa santé et sa capacité à changer son réel. Preuve que ces jeunes aux looks bizarres, et aux comportements «pas comme il faut» ont une conscience de ce qui les entoure.

Si des institutions comme le CCDH cherchent une place dans cet événement, c'est que, quelque part, ils ont compris que ce phénomène socio-culturel possède désormais une influence certaine sur les jeunes générations. En fait, l'EAC-L'boulevart a pu donner la preuve éclatante que le changement par la culture et les arts est possible, que la volonté et la créativité peuvent déplacer des montagnes.

Le message qui semble découler du festival est qu'avec une plus grande ouverture d'esprit, un autre Maroc est bel et bien possible.
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