Mohamed El Yazghi et les agents d'autorité
Ce que d'aucuns n'hésitent pas à appeler la « sortie » de Mohamed El Yazghi lors du Conseil de gouvernement du jeudi 18 septembre surprend plus d'un observateur.
LE MATIN
21 Septembre 2008
À 16:42
Maître d'œuvre des idées de la gauche pendant quelques années, l'ancien premier secrétaire de l'USFP a cru contester séance tenante un Dahir sur le statut particulier des agents d'autorité sans pour autant, et de toute évidence, l'avoir jamais lu. Le 30 juillet dernier, S.M. le Roi a reçu Chakib Benmoussa et Saad Hassar, respectivement ministre de l'Intérieur et secrétaire d'Etat à l'Intérieur. Décision a été prise alors de modifier l'article du Dahir qui remonte à 1963 et portant sur le statut particulier des agents d'autorité. Ceux-ci, tout comme les membres de la famille des Forces Armées Royales – et M. El Yazghi ne devrait guère l'ignorer – sont nommés par Dahir. Assimilés à des militaires et considérés comme des officiers de réserve, ils « participent en cas de guerre à l'organisation générale du pays », comme le stipule la charte communale en son article 49. De plus, la modification apportée le 30 juillet dernier a suivi scrupuleusement la procédure réglementaire.
En d'autres termes, elle s'est conformée au cheminement laborieux, strict et sans concession du secrétaire général du gouvernement (SGG), en l'occurrence ici feu Abdessadeq Rabîi, dont on ne saurait mettre en doute ni l'intégrité ni la rigueur intellectuelle. Or, Mohamed El Yazghi a choisi le dernier conseil de gouvernement, soit deux mois après les faits, pour s'en prendre à un texte d'une légalité indéniable et d'une pétrifiante clarté. C'est peu dire la gravité d'une telle attitude pour un homme de loi qui feint ignorer la règle constitutionnelle à ce niveau et à ce point. L'ancien premier secrétaire de l'USFP, tout à sa volonté de reconquérir le parti, quitte à se tromper et à induire les autres en erreur, a cru néanmoins fixer lui-même l'opportunité de sa « sortie » médiatique. S'il occulte la dimension contextuelle du Dahir, autrement dit le fait qu'il ne s'agit que d'une simple modification, s'il passe sous silence l'irréfragable réalité que le statut des agents d'autorité est fixé et réglementé par un Dahir, c'est pour mieux faire une fixation sur une prétendue entorse à la Constitution, monter sur ses ergots et surenchérir.
Une telle attitude est adoptée alors que le champ politique, livré à une guerre de chefs et à une infernale conspiration d'égos, ne cesse de s'agiter et que son parti n'en finit pas de se préparer à l'ultime congrès de vérité. Elle dénote, chez lui, une volonté de récupération évidente. Souhaiterait-il un retour en force à la tête de l'USFP, qu'il ne se comporterait pas autrement ! Voudrait-il se positionner pour les prochaines étapes ? Le respect de la loi fondamentale est la règle commune de tous, gouvernement, parlement, partis politiques, leaders et citoyens. Nul n'est en droit de voiler ou d'instrumentaliser une évolution constitutionnelle à des fins politiques. Mohamed El Yazghi s'est emparé de la modification apportée dans la transparence totale à un article du Dahir sur le statut particulier des agents d'autorité pour se distinguer et se refaire une virginité politique. Il l'a fait apparemment à un moment où l'USFP amorce un tournant, celui de la refondation nécessaire avec des hommes nouveaux.