Fête du Trône 2006

Une volonté royale et un enthousiasme populaire

Entre vendredi dernier, date de son lancement, et aujourd'hui, la 7e édition du «Festival Mawazine, rythmes du monde» a déjà reçu près de 200 000 visiteurs qui, chaque soir, se répartissent dans les différentes scènes. Du coup, la ville de Rabat ne cesse de se métamorphoser, de se transformer. Elle vit et vivra jusqu'à samedi prochain au rythme de la fête, surgie d'un quasi-silence, ouvrant ses portes à des centaines de spectateurs qui viennent des autres villes et de partout.

20 Mai 2008 À 16:56

Il faut dire d'emblée que le thème de cette 7e édition est placé sous le signe fédérateur des musiques du monde. Il faut aussi ajouter qu'il incarne les grandes ambitions affichées d'une capitale transformée depuis deux ans maintenant en chantier permanent et dont le visage ne cesse de changer et de s'ouvrir à une modernité exigeante. A coup sûr, Mawazine constitue un événement majeur pour la population de la capitale. A l'évidence aussi, il traduit la volonté de S.M. le Roi Mohammed VI d'enraciner la ville de Rabat dans un socle de culture et d'ouverture internationale et d'en faire le miroir du Maroc moderne. Il faut partir de ce principe de départ que S.M. le Roi est le porteur initial et principal de ce qui est en train de devenir la plus grande manifestation culturelle et artistique du Royaume.

Mais aussi l'événement dont la dimension populaire s'affirme de jour en jour pendant cette semaine. Depuis le concert d'ouverture de George Benson sur le Bouregreg, l'enthousiasme du public est monté en crescendo, et l'adhésion des populations à ce qui est maintenant leur festival s'est faite sur le mode d'une poussée, comme un puissant courant marin qui charrie et emporte son public à son passage. Lundi soir, au stade Nahda, ce fut carrément le délire d'un public venu de partout, de Casablanca, de Fès, de Meknès, de Tanger et qui s'est mêlé, comme on ne peut l'espérer, à Nass Al-Ghiwane, fredonnant les chansons, chantant, dansant. Ce public diversifié mais fédéré autour du groupe mythique connaît tout le répertoire, ancien et moderne, et ne se fait pas faute de l'accompagner dans l'enthousiasme.

Nass Al-Ghiwane intervenaient après les groupes du même mouvement musical, Jil Jilala et Lemchaheb. Et la scène a été comme sanctifiée pour la musique populaire où la nostalgie se conjuguait à la ferveur. Au Théâtre Mohammed V, c'est le guitariste, probablement le plus grand dans le jazz, Al Di Meola qui avait fait salle comble. Et pour ne pas être en reste, les groupes venus d'Espagne, «Los Delinquentes» et «Amparanoia» ont littéralement transformé la scène enluminée du Bouregreg, attenante à un océan calme et splendide.

La même scène n'avait-elle pas abrité l'un des plus grands compositeurs, dont l'art n'a d'égal que son talent reconnu mondialement et qui nous a livré les plus émouvantes musiques de films: Goran Bregovic, venu tout droit de la Croatie.
Des Oudayas jusqu'au Pont Moulay El Hassan, ce fut une file de voitures interminable, une foule immense et colorée qui était venue, samedi dernier, écouter le maître de la musique douce, secouée par de légers flots océaniques. Ou encore, sur la scène populaire enflammée de Qamra, un Ziggy Marley, repreneur de l'héritage musical, poétique et rythmique de son père Bob Marley, qui a emporté les cœurs et revivifié les âmes nostalgiques fidèlement accrochées à l'art du reggae.

De la musique de tous les goûts, de la danse et des rythmes. De la convivialité nourrie entre des différents publics, fédérés autour d'un même idéal, celui du partage et de la fraternité.
C'est à quoi l'on peut résumer l'esprit de Mawazine qui, cette année, a placé, comme on dit, la barre très haut en termes de choix programmatiques, de groupes et d'artistes.
Mais aussi, qui s'est fait un point d'honneur de démocratiser la scène, permettant au grand public d'approcher ses idoles et de les découvrir de visu. Des scènes partout aménagées et des concerts qui démarrent à la fin de l'après-midi et se succèdent jusqu'à des heures tardives, conférant à la capitale une autre dimension, celle de la fête et de la communion.

Les étrangers, présents à cette 7e édition, s'étonnent de l'importance qui lui est donnée et qui a fait la plus riche moisson d'artistes prisés, à travers le choix exigeant de musiciens et de figures emblématiques comme Witney Houston appelée à clôturer huit jours de musique pleins. On leur rétorquera en effet qu'à ambitions aussi grandes d'une ville qui n'en finit pas de bouger et de se métamorphoser, un festival à sa mesure et digne de son statut. Rabat n'est pas une capitale assoupie, elle est aujourd'hui l'étendard de la modernité, comme Washington, Madrid ou Paris le sont pour leurs pays. Lumineuse, orgueilleuse aussi, elle est à la pointe de ce qui existe au Maroc en termes d'aménagement ou de réaménagement infrastructurel, architectural, urbanistique et patrimonial ! Peu de villes possèdent un «Musée virtuel» d'une si rare et grande dimension technologique.

Il a nécessité un travail titanesque et, avec la Villa des Arts, propulse à coup sûr la capitale dans le giron des cités modernes.
Si exigeants puissions-nous être, si attentifs à comparer les réalisations, il convient de souligner que le «Festival Mawazine, rythmes du monde» est un événement fédérateur, d'autant plus qu'il regroupe toutes les musiques-avec un accent mis sur la Méditerranée, restée notre viatique –, qui réunit hommes et femmes venus d'horizons divers et parfois lointains et qui offre au peuple marocain des moments de communion et de ferveur.

La musique est aujourd'hui au cœur d'une refondation sociale et humaine. On le doit à n'en pas douter à la volonté de Sa Majesté le Roi Mohammed VI qui reste l'initiateur d'une manifestation de partage et de solidarité, mais aussi à l'engagement du comité d'organisation dont le souci majeur est une quête irrésistible de la qualité et de l'exigence, d'une réponse également aux attentes d'un public qui se réconcilie avec l'art comme avec sa ville.
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