Grève déguisée ou pur hasard, that is the question. Le nombre «anormalement» important (selon l'expression utilisée dans le communiqué de la Royal Air Maroc (RAM)), d'absences des pilotes qui ne se sont pas présentés pour effectuer les vols pour lesquels ils étaient programmés, n'est pas près pour passer inaperçu et sans conséquences.
LE MATIN
07 Juillet 2008
À 15:31
En effet, les services de la Compagnie aérienne nationale, qui se disent être surpris, le 03 juillet dernier, par ce nombre d'absences (une vingtaine), ont immédiatement engagé une enquête pour en identifier les causes réelles. «Nous avons saisi les délégués du personnel navigant technique, l'inspection du travail et l'Association marocaine des pilotes de ligne afin de nous apporter leur assistance dans le cadre de cette enquête», indique Rajae Saoud, directrice de la communication et des relations publiques à la RAM. Selon un communiqué de la RAM, les raisons avancées «verbalement» par les pilotes concernés seraient liées à l'état de santé et à la maladie des intéressés. Cette attitude manifestée par certains pilotes a entraîné des retards importants de plusieurs vols programmés par la compagnie et d'autres ont été annulés.
Pour pallier ce problème, une cellule de crise a été mise en place afin que les moyens matériels et humains soient mobilisés pour assurer l'acheminement des passagers. «Si l'enquête engagée révèle que les absences enregistrées sont injustifiées, la compagnie prendra les mesures de tout ordre et notamment disciplinaires qui s'imposent, pour éviter la répétition d'une pareille situation», prévient la RAM.
Les «menaces de mesures disciplinaires» de la RAM n'ont pas été sans déplaire à l'Association marocaine des pilotes de ligne (AMPL), qui les qualifie de déplacées et «préjudiciables à la sécurité des passagers et à l'économie nationale», indique Najib Al Ibrahimi, membre de l'AMPL. «Les lois internationales de l'aviation imposent qu'un membre d'équipage n'exerce pas un service à bord d'un avion s'il sait qu'il est fatigué ou susceptible d'être fatigué ou s'il ne se sent pas en état et que la sécurité du vol pourrait en être affectée», lit-on dans le communiqué de l'AMPL, publié en réponse à celui de la RAM.
Selon Al Ibrahimi, les défaillances des pilotes sont prévues par toutes les compagnies aériennes à hauteur de 7% de l'effectif. L'absence des pilotes de la RAM n'a concerné que seulement 5% de l'effectif global. «Les retards des vols de la RAM sont innombrables et ne datent pas d'hier. La Compagnie ne devrait pas se cacher derrière ses pilotes pour parler d'atteinte à son image ou à celle de notre pays», lit-on dans le communiqué de l'AMPL. La RAM essaye de chercher un bouc émissaire pour ses défaillances qui sont chroniques et qui sont le résultat d'une mauvaise gestion, indique le membre de l'AMPL.
Selon lui, la maladie des pilotes est tout ce qu'il y a de normal vu que leur activité est très soutenue, particulièrement le travail de nuit qui représente plus de 50% de l'activité totale, suite au développement du trafic vers l'Afrique. Le temps de récupération imparti est relativement court, ce qui entraîne une accumulation de la fatigue. «Il n'y a qu'à consulter les résultats des statistiques des contrôles semestriels qui font état de la hausse enregistrée dans les certificats d'inaptitude temporelle», ajoute Al Ibrahimi. ------------------------------------
Défaillances ?
Selon le communiqué de l'AMPL, l'effectif des pilotes actuels de la RAM reste très réduit malgré la présence d'une quarantaine de pilotes étrangers. La fermeture de l'Ecole nationale des pilotes de ligne pendant plusieurs années, les mauvaises projections en termes de ressources humaines, la mauvaise anticipation des départs en retraite ainsi que la non-considération de la pyramide des âges en sont les raisons essentielles.
La RAM accorde très peu de congés à ses pilotes, laisse-t-on entendre. Toujours selon le communiqué, la RAM a interdit les arrangements mutuels entre pilotes, qui leur permettaient de se faire remplacer (à l'initiative du pilote concerné), en cas de fatigue ou de maladie par un autre collègue, sans être obligé de présenter un certificat médical. Ces dernières années, le corps des pilotes a vécu l'institutionnalisation du travail en heures supplémentaires pour les pilotes de la RAM.