Selon Ibn Abbas, un homme, venu voir le Prophète Sidna Mohammed, que la bénédiction et le salut de Dieu soient sur lui, a dit :R>O Messager de Dieu, ma mère est décédée et devait le jeûne du mois de Ramadan, dois-je le jeûner pour elle ? -Oui, répondit le Prophète, il est un devoir d'acquitter des dettes contractées envers Dieu.” > Traduction : Association Al Imam Al Boukhari
LE MATIN
17 Septembre 2008
À 13:35
(suite)
De retour à Médine, ces six personnes parlèrent aux gens des tribus d'Aous et de Khazradj, leur exposèrent la religion musulmane et leur récitèrent ce qu'elles avaient appris du Coran, et leur dirent : Ce Mohammed est ce Prophète dont le nom est constamment dans la bouche des juifs, en qui ils ont cru, et en qui ils espèrent. S'ils entendent parler de lui, ils l'emmèneront. Prévenez-les, en l'amenant au milieu de vous. Cette religion, le Coran et les paroles du Prophète firent une bonne impression sur les habitants de Médine, et un grand nombre d'entre eux se convertirent. Il y eut peu de maisons à Médine où l'on n'apprit pas ces quelques versets du Coran que les six personnes avaient retenus.
Les habitants de Médine attendaient avec impatience, cette année, le retour de l'époque du pèlerinage. Alors ils se réunirent et désignèrent comme messagers les mêmes personnes, au nombre de six, en leur associant six autres personnes de la tribu de Khazradj, dont voici les noms : Mo' âds, fils de Hârith, Abbâs, fils d'Obâda; Abou l'-Haïtham, fils de Taayyahân ; Dsakwân, fils d'Abd-Qaïs ; Obâda, fils de Çâmit ; Yezid, fils de Tha'laba. Ils les firent partir, en leur disant: Allez, prenez envers Mohammed l'engagement et ramenez-le avec vous : car nous tous, à Médine, nous nous sommes engagés envers lui, et nous sommes à sa disposition, corps et biens.
Ces douze hommes arrivèrent à La Mecque, à l'époque du pèlerinage, et s'arrêtèrent sur la colline Aqaba, près des Minâ. Mohammed se rendit auprès d'eux. Lorsqu'ils Le virent, ils furent remplis de joie, Lui témoignèrent de la déférence et Lui transmirent les hommages des habitants de Médine. Le Prophète en fut charmé ; Il reçut leur engagement sur leurs corps et leurs biens, tant en leur propre nom qu'au nom de leurs compatriotes.
Ce serment est appelé le premier serment, parce qu'il y en eut un autre plus tard, ou serment des femmes, parce qu'il n'y était pas question de la guerre qu'ils promirent de soutenir avec le Prophète contre les habitants de La Mecque. D'ailleurs cet autre serment contenait les mêmes obligations que le serment des femmes, à savoir de n'adorer que Dieu, de ne pas dérober, de ne pas tuer leurs filles, de ne pas mentir, de ne pas désobéir au Prophète et de Le protéger comme leurs propres corps. Après avoir reçu cet engagement, le Prophète forma le dessein de partir secrètement avec eux pur Médine.
Abbâs était connu parmi tous les Qoraïschites comme l'homme le plus expérimenté et le plus pénétrant. Il avait succédé à Abou Tâlib dans le commandement des Qoraïschites, mais il était sans énergie. Son autorité ne s'étendait que sur les Beni-Haschim, comme celle d'Abou-Tâlib, tandis que le tribu d'Omayya reconnaissait comme chef Abou-Sofyan, fils de Harb, et la tribu de Makhzoum, Abou-Djahl.
Chaque tribu avait son chef particulier. Abbâs n'était pas en état de protéger le Prophète, quelle que fût l'amitié qu'il eût pour lui ; mais son intelligence et son expérience lui étaient très utiles, et le Prophète le consultait en toutes choses et lui confiait ses secrets. Mohammed vint donc le trouver et lui dit : "O mon oncle, Je voudrais te confier un secret et te demander un conseil ; garde-moi le secret". Parle, mon fils, lui dit Abbas. Le Prophète dit : "Tu sais combien d'injures et de violences J'ai essuyées depuis la mort d'Abou-Tâlib, et avec quelle patience Je les ai supportées, ainsi que le mépris et les outrages des Qoraïschites. A présent, Je suis las de La Mecque. Depuis plusieurs années, Je m'étais présenté, à l'époque du pèlerinage, aux différentes tribus arabes, mais personne n'a cru en moi ni en ma religion. J'avais désiré que quelqu'un d'entre ces étrangers m'emmenât dans sa patrie, afin que J'y pusse exercer ma religion. Mais Je n'ai trouvé personne, si ce n'est les habitants de Médine et du territoire de Yathrib, dont il est venu, l'année dernière, six personnes, qui se sont engagés envers moi, ils m'invitent à aller avec eux, et Je veux les suivre. Qu'en penses-tu?" Abbas répliqua : "Je ne veux pas te refuser mon conseil. Je ne crois pas qu'il soit bon que tu ailles à Médine avec douze personnes.
Les habitants de Médine sont au nombre de dix à vingt mille, qui sont en lutte entre eux ; on ne peut pas, d'après le dire de douze personnes, compter sur toute une ville renfermant une si grande population. Aujourd'hui Tu es dans ta ville natale, au milieu de ta tribu et de tes compatriotes. Si dix personnes te disent des choses désagréables, deux autres te parlent avec bonté. Mais si Tu vas dans cette ville-là et que l'on ne t'y reçoive pas comme protégé, Tu t'y trouveras étranger, sans assistance et sans parents, et Tu ne pourras plus revenir à La Mecque. Je crois donc convenable que Tu y envoies quelqu'un des tiens sur lequel Tu puisses compter, pour te remplacer et appeler les gens à ta religion. S'ils croient, alors Tu pourras partir, ayant lieu de penser qu'un grand nombre croiront en toi. Mais s'ils ne croient pas, au moins n'auras-Tu as pas été séparé de ta tribu et exilé à l'étranger". Après avoir entendu ces paroles, le Prophète dit à Abbas, en l'embrassant : «Que Dieu te récompense pour ton bon conseil». Mohammed fit partir pour Médine, avec les douze messagers, Moç'ab, fis d'Omaïr, fils de Haschim, fils d'Abd-Manaf, qui savait tout ce que a été révélé jusqu'alors du Coran, et qui avait appris les cérémonies religieuses de l'Islam. Le Prophète le chargea d'appeler les habitants de Médine à l'Islam et leur enseigner le Coran. Moç'ab, arrivé à Médine, se logea dans la maison d'As'ad, fils de Zorâra. Le lendemain, les habitants de Médine vinrent le trouver.
Moç'ab les appela à la religion du Prophète et leur récita tout ce qu'il savait du Coran. Tous ceux qui l'entendirent devinrent croyants. As'ad conduisait Moç'ab, chaque jour, dans quelques enclos où les hommes venaient pour entendre ses discours, et où ils adoptaient l'Islam.
A Médine, chaque enclos est nommé d'après la tribu qui a l'habitude de s'y réunir. As'ad choisit chaque jour un nouvel enclos pour Moç'ab. Le plus grand de tous était celui des Beni-Abdou A-Aschhal, où se réunissait le plus grand nombre de personnes. Le chef de cette tribu était Sa'd, fils de Mo'âd, fils de No'mân, fils d'Imrou'l-Qaïs, qui était à la tête de la ville de Médine. Il était cousin d'As'ad, fils de Zorâra, du côté de sa mère. Sa'd dit à un homme nommé Osaïd, fils de Hodhaïr, l'un des principaux chefs de Médine : Va trouver As'ad et dis-lui que, s'il n'y avait pas de liens de parenté entre nous, je le ferais mourir à l'instant même. Dis-lui qu'il fasse sortir de notre enclos cet homme, car nous ne sommes pas partisans de la religion nouvelle qu'ils ont apportée à Médine ; et que, s'il ne s'en va pas, j'irai moi-même et je lui ôterai la vie ainsi qu'à cet homme.
Osaïd prit une pique et se rendit auprès d'As'ad, qu'il trouva en compagnie de Moç'ab. Il lui transmit le message de Sa'd, puis il ajouta de lui-même : Si S'ad ne le fait pas, je le ferai, moi ! Allons, quittez à l'instant cet enclos. As'ad lui dit : Nous ne nous y opposons pas ; si vous le désirez, nous nous en irons ; mais viens assieds-toi et écoute ce que dit cet homme et ce qu'il veut. Tu as raison, dit Osaïd. Alors Moç'ab se mit à réciter le Coran. Osaïd en fut charmé et dit : Que faut-il dire et faire pour entrer dans cette religion ? – Se baigner la tête et le corps, répondit Moç'ab, se repentir des péchés que l'on a commis, et faire la profession de foi : «Je déclare qu'il n'y a pas d'autre dieu qu'Allah, et je déclare que Mohammed est le Prophète d'Allah». Osaïd se leva, se purifia, se repentit de ses péchés et prononça la formule de foi entre les mains de Moç'ab. Ensuite il dit à As'ad : Tu sais quelle est la position élevée de Sa'd, fils de Mo'âd. Je vais aller et faire en sorte qu'il vienne te trouver. Peut-être, en entendant, lui aussi, ces paroles, en serait-il charmé et deviendra-t-il croyant.
Osaïd vint auprès de Sa'd, qui lui demanda ce qu'il avait dit et fait. Osaïd répondit : J'ai trouvé As'ad et cet homme entourés de beaucoup de personnes. J'ai craint que celles-ci, en apprenant tes paroles, ne les tuassent à l'instant même. Sa'd dit : Je ne veux pas que l'on tue quelqu'un dans mon enclos ; ma propriété est à moi. Il se leva, prit la pique d'Osaïd et vint trouver As'ad, qui était assis auprès de Moç'ab et au milieu d'une foule de gens. En voyant Sa'd, ils se levèrent. Sa'd dit à As'ad : Fais sortir cet homme de cet enclos paisiblement, afin d'éviter, lui et toi, la mort. Si je ne prenais pas en considération notre parenté, je te frapperais. As'ad répliqua : En effet, nous allons partir d'ici. Mais quel mal y aurait-il si tu écoutais un peu ? Sa'd dit : Parle. Moç'ab récita la surate N'avons-nous pas ouvert ? (Sur. XCIV). Sa'd la trouva très belle, il s'assit et dit : Répète-la.
Moç'ab la récita une seconde fois, et Sa'd y trouva le plus grand plaisir. Il devint croyant et adopta la foi musulmane. Ensuite il s'en retourna, convoqua les hommes de la tribu des Beni-Aschhal et leur dit : Que suis-je pour vous ? – Tu es, répondirent-ils, un homme distingué, respecté et sûr, et tu es notre chef. Sa'd dit : j'ai embrassé cette religion, et je ne l'aurais pas fait si elle n'était pas véritable. Je cesse toute relation avec tous ceux qui n'embrasseront pas cette religion. Le jour même, tous les Beni-Abdou L-Aschhal, sans exception, devinrent croyants. As'ad continua alors d'introduire Moç'ab dans tous les lieux de réunion des différentes tribus ; et bientôt il n'y eut pas une seul tribu à Médine dont plusieurs membres ne fussent croyants, sauf celle des Aous. Ceux-ci, moins nombreux que les Khazradj, se croyaient cependant supérieurs aux autres, et s'appelaient Aous-Monât. Ils avaient pour chef Abou-Qaïs, fils d'Al-Aslat, qui était poète, et qui détourna de l'Islam les gens de sa tribu, en leu disant : Les discours que débite cet homme sont beaux, mais je vais vous réciter des vers plus beaux encore. Il n'y eut des croyants dans cette tribu qu'après l'arrivée du Prophète à Médine, après une résidence d'un an ou deux dans cette ville, après les combats de Badr, d'O'hod et la guerre du Fossé.
Trois ou quatre ans après, les hommes de cette tribu furent croyants comme les autres, firent la prière et récitèrent le Coran. Au bout de cette année, Moç'ab retourna à La Mecque, pour rendre compte aux Prophète de ces événements. Soixante dix personnes, des chefs et des principaux habitants de Médine, tels que (Berâ), fils de Ma'rour, Abdallah, fils d'Amrou, Abou-Djâbir, et Djâbri fils d'Abdallah, et les autres chefs qui étaient devenus croyants, accompagnèrent Moç'ab, afin de ramener avec eux le Prophète. Les douze personnes qui avaient prêté serment à Mohammed lors du pèlerinage avaient fixé un rendez-vous où elles se réuniraient avec Lui, à Aqaba, pour Lui prêter serment (de nouveau) et pour L'emmener à Médine.
Le Prophète en parla à Abbas, qui dit : J'irai avec toi, et verrai ces hommes. La nuit du rendez-vous étant arrivée, les soixante et dix hommes de Médine se réunirent sur la colline d'Aqaba ; Abbas et le Prophète s'y rendirent de leur côté. Abbas adhérait encore à la religion des Qoraïschites ; mais il voulut confier lui-même le Prophète entre leurs mains. Lorsqu'ils apparurent au haut de la colline, tous les hommes se levèrent et leur témoignèrent du respect. Le Prophète prit le premier la parole, et leur exposa les dogmes de sa religion. Ils répliquèrent : Nous avons accepté cette foi, et nous sommes venus pour t'emmener avec nous, afin que Tu y sois à ton aise, et que nous ayons le plaisir de t'avoir. Le Prophète leur fit prêter le même serment qu'Il avait reçu des douze, en y introduisant seulement l'obligation pour eux de combattre ses ennemis, de Le protéger comme eux-mêmes, et de sacrifier leurs corps et leurs biens, jusqu'à ce que la religion soit répandue partout. Ils acceptèrent toutes les clauses de ce serment, qui est appelé serment de la guerre ou second serment. Puis le Prophète tendit la main pour recevoir l'engagement, et le premier qui mit sa main dans celle de Mohammed fut Berâ, fils de Ma'rour, d'autres disent As'ad, fils de Zorâra : d'autres encore, Abou' I-Haïtham, fils de Tayyahân. Tous, au nombre de soixante dix, prêtèrent le serment.
Ensuite Abbas, fils d'Abdou l-Mottalib, prit la parole et dit : O hommes d'Aous et de Khazradj, vous êtes tous des hommes notables et d'un rang élevé. Vous êtes venus ici, supportant des fatigues, et moi je suis venu pour bien établir nos conventions. Il est vrai que je ne suis pas partisan de la religion de Mohammed ; mais Il est le fils de mon frère, mon enfant, ma chair et mon sang. Sachez que Mohammed est, à La Mecque, au milieu de ses compatriotes, bien à son aise ; personne n'ose Le toucher ; car de toutes les tribus, celles des Beni-Haschim est la plus puissante. Mais Il a détourné son cœur des Qoraïschites et désire se rendre au milieu de vous. Aujourd'hui, les Qoraïschites Le respectent, mais demain, quand Il les aura quittés et qu'Il aura rompu tout lien avec eux, ils se sentiront humiliés, et une guerre sanglante éclatera entre eux et Lui. Tous les Arabes du monde se joindront aux Qoaïschites et seront avec eux, ils tireront leurs épées et se trôneront contre vous. Si alors vous deviez abandonner Mohammed, il vaudrait mieux Le laisser aujourd'hui au milieu de ses compatriotes. Les soixante dix hommes de Médine acceptèrent ces paroles et renouvelèrent leur serment, en engageant de nouveau leur vie. Ils dirent à Abbas : Nous L'avons reçu d'abord de Dieu, maintenant nous Le recevons de tes mains. Nous sacrifierons notre sang et nos biens pour Dieu, ensuite toi, qui est l'oncle du Prophète. Ensuite le Prophète parla ainsi : "Vous n'avez ici pour garant que Dieu.
Désignez parmi vous des mandataires (nâqiban) qui s'engagent pour vous". Alors douze hommes d'entre les soixante dix furent désignés, neuf d'entre les Khazradj et trois d'entre les Aous. Voilà nos chefs, dirent-ils ; tous les habitants de Médine obéissent à leurs ordres ; voilà nos mandataires. Ceux-ci affirmèrent de nouveau par serment qu'eux et tous les hommes présents, comme tous les habitants de Médine, étaient d'accord. Ils ajoutèrent : Nous allons envoyer un messager,afin que tous les habitants de notre ville viennent avec leurs armes ; Tu n'y trouveras aucun adversaire ; et s'il y a quelqu'un qui te fasse opposition, nous le tuerons immédiatement. Le Prophète fut très heureux et les remercia. Ensuite Il dit à Abbas : "O mon oncle, J'espère que Dieu conduira à bien cette affaire, et propagera ma religion parmi ces gens ; car ces chefs et naqib qui ont fait acte d'acceptation sont au nombre de douze, comme étaient les disciples de Jésus, par lesquels Dieu a répandu la religion de Jésus dans le monde entier.
Abou‘l-Haïtham, fils de Tayyahân, était l'un des naqibs de la tribu d'Aous ; mais c'était un des principaux d'entre eux ; il était un allié des Benï-Abdou'l-Aschhal. Il dit à Abbas : O homme excellent ; il reste quelque chose à dire que personne n'a encore dit et que je ne peux pas passer sous silence. Parle, lui dit Abbas. L'autre reprit : Toutes les conditions que l'apôtre de Dieu nous a posées ont été acceptées par nous : nous y avons mis comme prix nos existences.
Nous aussi, nous avons une condition à poser. Quelle est-elle ? demanda Abbas. Abou‘l-Haîtham répondit : Il existe depuis longtemps, du temps de nos pères, entre nous et les Qoraïschites et tous les Arabes du désert des relations d'amitié. Nous acceptions toutes ces obligations, et nous défendrons le Prophète. En faisant cela, nous aurons pour ennemis tous ces hommes, et le fléau de la guerre éclatera entre nous et les Qoraschites et les Arabes. Il ne faudra pas que, lorsque le Prophète aura triomphé, qu'Il aura le pouvoir et qu'Il régnera sur tous les Arabes, Il forme le désir de retourner dans sa patrie, et qu'Il revienne à La Mecque, au milieu de ses compatriotes, en nous abandonnant en butte aux hostilités des Arabes. Le Prophète dit : "Je suis un des vôtres, Je veux vivre et mourir parmi vous". Ces paroles leur causèrent une grande joie. Ensuite ils se disposèrent au départ.
Le bruit s'était répandu à La Mecque que les gens de Médine avaient pris un engagement avec Mohammed. Les Mecquois se réunirent et expédièrent aux soixante dix un message ainsi conçu : Nous avons entendu dire que vous voulez emmener avec vous Mohammed à Médine, et que vous vous êtes engagés envers Lui à nous faire la guerre. Quoique nous soyons en état de vous résister, nous éprouverions de la peine à combattre contre vous ; car vous êtes nos voisins. Les gens de Médine répondirent par des dénégations, en disant qu'ils n'avaient de cela aucune connaissance. Les messagers rapportèrent cette réponse aux Mecquois.
L'un des naqibs de Médine, Abbas, fils d'Obada, fils de Nadhala, remarqua aux pieds de l'un des grands personnages de La Mecque, Hârit, fils de Hischâm, fils de Moghaïra Al Makhzoumi, frère d'Abou-Djahl, une paire de souliers fort beaux. Abbas dit en plaisantant à l'un des Ançar, Djâbir, fils d'Abdallah : Tu es l'un des plus grands personnages de Médine. Mais tu n'as pas à tes pieds de si beaux souliers que Hârith. Celui-ci, ayant entendu ces paroles, ôta ses souliers, les jeta à Abbas, et s'en alla pieds nus. Djâbir dit à Abbas : il n'est pas convenable qu'un homme considérable aille nu-pieds ; il faut courir après lui et lui rendre ses souliers. Abbas répliqua : Je ne les lui rendrai pas ; j'en tire un présage : Si Dieu fait réussir notre pacte, nous enlèverons aux Mecquois tous les biens, comme je viens d'enlever ces souliers.
Outre les soixante dix, beaucoup d'autres pèlerins de Médine étaient venus à La Mecque, avec un chef, qui était l'homme le plus considérable de Médine. Celui-ci n'était pas informé de l'alliance entre les gens de Médine et Mohammed. Les habitants de La Mecque se rendirent auprès de lui et l'interrogèrent. Il répondit : Je n'en ai aucune connaissance ; ces hommes n'oseraient pas faire une telle chose sans moi. Les Mecquois se fièrent à ces paroles. Ensuite, le Prophète partit avec ces hommes et arriva à Médine.
Mohammed Ben-Djarir rapporte un fait qui est fort peu croyable. Il dit : Lorsque Mohammed arriva à Médine, Il fit construire une mosquée sur l'emplacement d'un verger de dattiers et d'un cimetière, qu'Il avait achetés. Il fit arracher les arbres et retirer les cadavres de leurs tombeaux, ensuite Il y fit bâtir. Mais cela ne peut pas être ; c'est un fait inouï, et il ne faut pas croire une telle chose du Prophète. Quoique ces morts fussent des infidèles, un lieu d'adoration n'a cependant pas assez d'importance pour qu'on arrache des morts de leurs tombeaux et pour qu'on détruise un champ cultivé. Les hommes intelligents rejettent un tel fait. On raconte aussi que, lorsque le Prophète voulut se rendre à Médine, Il vint d'abord avec Abou-Bakr dans une caverne, et que c'est de là qu'Il partit pour Médine, accompagné seulement d'Abou-Bakr.
On rapporte que, dans la première année de la Fuite, le premier chez qui le Prophète se logea à Médine fut un homme nommé Kolthoum. D'autres prétendent que ce fut chez As'ad, fils des Zorâra, surnommé Abou-Omâma, appartenant à la tribu des Naddjjâr, et l'un des douze qui avaient prêté le premier serment d'Aqaba. As'ad, fils de Zorâra, mourut, et les Beni-Naddjar dirent à Mohammed : O apôtre de Dieu, donne-nous un naqib. Le Prophète répondit : Désignez vous-mêmes quelqu'un, car Je suis un des vôtres, vous êtes mes oncles. Encore aujourd'hui, les Beni-Naddjar se font gloire de cette parole. Mohammed les appela ses oncles, parce que sa mère Amina était la fille de Wahb, qui avait épousé une femme des Beni-Naddjâr de Médine. Lorsque Amina reçut son fils âgé de cinq ans, des mains de Halima, elle l'emmena à Médine, pour le présenter à ses oncles, les Beni-Naddjar, ensuite, en le ramenant à La Mecque, elle mourut, comme nous l'avons rapporté.
Lorsque le Prophète vint à Médine, Aïscha, qu'il avait épousée deux ans auparavant à La Mecque, avait neuf ans. Il ordonna Abou-Bakr de faire venir sa famille à Médine. Abou-Bakr fit parvenir à son fils Abdallah, à La Mecque, l'ordre d'amener à Médine sa mère et ses sœurs Aïscha et Esmâ Dsât en-Natâqaïn, femme de Zobaïr, fils d'Awwâm. Quand Zobaïr arriva à Médine, sa femme Esmâ était enceinte, et Abdallah, fils de Zobaïr, naquit à Médine. Les juifs de Khaibar prétendaient avoir jeté un sort sur tous les partisans de la religion de Mohammed, tant sur ceux qui étaient venus de La Mecque que sur ceux de Médine.
Il ne leur naîtra pas d'enfants, avaient-ils dit ni mâles, ni femelles ; et ils avaient fait dire aux habitants de La Mecque : Soyez contents, nous avons enrayé la descendance de Mohammed et de ses adhérents : quand Il mourra, sa race sera éteinte. Les Mecquois en furent très heureux, tandis que les compagnons du Prophète, étant informés de cela, furent affligés. Mohammed leur dit : Ne vous affligez pas, car Dieu m'a donné la promesse que ma religion durera jusqu'au Jour de la Résurrection ; vous aurez des enfants et des descendants. Or, cette même année, naquit, parmi les réfugiés, Abdallah, fils de Zobaïr, ce que les musulmans firent valoir très haut ; car les paroles de Mohammed furent justifiées parmi eux, tandis que les juifs reçurent un démenti. Dans cette même année, le Prophète conduisit Aïscha dans sa maison.
Aïscha a dit : il y a sept points par lesquels je me distingue de toutes les femmes du Prophète, et qui font ma gloire. C'est que, d'abord, Gabriel est venu trouver le Prophète en empruntant ma figure. Ensuite, je n'avais que sept ans lorsque le Prophète m'a épousée, et neuf ans lorsqu'Il m'a conduite dans sa maison. Troisièmement, Il a eu en moi une vierge, personne ne m'ayant possédée, tandis que toutes ses autres femmes avaient eu des époux avant Lui.
Quatrièmement, quand Gabriel venait Lui apporter une révélation pendant qu'Il était couché avec une de ses femmes, le Prophète sortait, se purifiait en versant de l'eau sur sa tête, et écoutait ensuite la parole de Dieu ; tandis que, quand Gabriel venait pendant qu'Il était couché avec moi, Il ne me quittait pas, et écoutait la révélation, tout en restant auprès de moi. Aussi a-t-il dit que de toutes les femmes celle qui Lui était la plus chère était Aïscha, et le plus cher de tous les hommes, le père d'Aïscha, Abou-Bakr, cinquièmement, lorsque Abdallah, fils d'Obayy et les hypocrites m'avaient calomniée, Dieu a révélé pour ma justification quinze verstes du Coran, que l'on récitera jusqu'au Jour de la Résurrection.
Sixièmement, moi seule, de toutes les femmes du Prophète, j'ai vu Gabriel, qu'aucune autre personne n'a vu. Septièmement, c'est dans ma demeure que le Prophète est mort; c'est là qu'Il était venu lorsqu'Il tomba malade. Ces distinctions, dont s'est glorifiée Aïscha, ne sont pas contredites par d'autres traditions, sauf en ce qu'elle dit de Gabriel, qui serait venu trouver le Prophète sous la forme d'Aischa. Il y a, à cet égard, un désaccord que Mohammed Ben-Djair n'a pas mentionné. Cependant il est dit dans d'autres traditions que Gabriel est venu trouver le Prophète sous la forme de Di'hya le Kelbite, qui était le plus bel homme parmi les Arabes.
Dans cette même année, Dieu ordonna la prière de quatre rak'at (inclinations), tandis que, à l'origine, à La Mecque, elle ne fut que de deux rak'at. Dans l'année même de l'arrivée du Prophète à Médine, Dieu ordonna pour la première et la deuxième prière, et pour la prière du coucher, quatre rak'at, et deux pour la prière du matin et celle du voyage, comme à l'origine.
Dans l'année même de la Fuite, le Prophète ordonna de dater les lettres et les actes à partir de cette année-là, comme point de départ d'une ère. L'usage de compter les années à partir d'une ère est très ancien chez les Arabes et chez les Persans, comme chez toutes les nations dans toutes les contrées. Quand il se passait un événement, par exemple l'avènement d'un roi ou une guerre entreprise par un roi, ou une famine, ou quelque autre fait important, dont la renommée s'était répandue dans le monde, on le prenait comme point de départ d'une ère, et l'on datait les lettres et les actes, tel jour, tel mois et telle et telle année depuis tel grand événement, qui servait d'ère. Puis, s'il se passait un autre fait important, on comptait à partir de ce dernier fait, en abandonnant le précédent. Tel était l'usage des habitants de la terre. Cette manière de compter est très ancienne, parce qu'il est absolument nécessaire de connaître l'époque où chaque écrit a été fait.
Or on ne connaît pas exactement l'espace de temps qui s'est écoulé depuis que Dieu a créé le monde. On avait établi un comput depuis l'apparition d'Adam sur la terre jusqu'à sa mort, ensuite depuis le déluge de Noé ; car ce sont des événements importants dans le monde. On aurait bien pu compter à partir de cette époque ; mais on ne sait pas exactement depuis combien de temps ces événements ont eu lieu ; il y a désaccord sur chacun d'eux. Par conséquent, il est nécessaire pour tous les hommes et tous les peuples de prendre comme point de départ d'une ère quelque grand événement qui s'est passé parmi eux.
On dit que les descendants d'Abraham comptaient les années à partir de l'époque où il fut jeté dans le feu. Plus tard, parmi les Arabes, chaque événement important survenu parmi eux servait de point de départ d'une ère. Or, au temps de Qoçayy, fils de Kelâb, il survint, parmi les Beni-Nezar et les Beni-Ma'add ben-Adnan, un événement mémorable. Il y avait, à cette époque, chaque année, à un endroit nommé Okazh, une foire de sept jours, où se réunissaient tous les Arabes du Hedjaz, de Syrie, du désert, du Ba'hraïn, du Yemama, du Yémen et de toutes les autres contrées. Une certaine année, lors de cette réunion, il éclata une guerre parmi eux, dans laquelle un grand nombre d'hommes furent tués. C'était un événement important, dont le bruit s'était répandu dans le monde entier, jusque dans le pays de Roum, dans la Perse et dans la Mésopotamie. Les Arabes donnaient à cette année le nom de âm, et comptaient à partir de cette année.
Plus tard, ce fut l'année de l'Eléphant qui servit de point de départ d'une ère. Les Abyssins ayant amené d'Abyssinie un éléphant pour détruire le temple de la Kaâba, Dieu les avait fait périr. C'était également un événement important, dont le bruit s'était répandu dans le monde entier. Puis, lorsque le Prophète eut atteint l'âge de quinze ans, et que les habitants de La Mecque entreprirent de démolir et de reconstruire le temple de la Kaâba, cet événement, également important, servit de point de départ d'une ère parmi les habitants de La Mecque, tandis que les autres Arabes continuaient de compter à partir de l'année de l'Eléphant. Lorsque le Prophète vint à Médine, il ordonna de compter le temps à partir du jour de la Fuite, parce que cet événement était important, et que ce jour l'Islam se manifesta. Ce jour est devenu mémorable, et cette ère, et il n'arrivera jamais qu'elle soit changée?
Mohammed ben-Djarir, dans cet ouvrage, dit que, d'après une tradition, ce n'est pas le Prophète lui-même qui établit cette ère, que du temps du Prophète, on ne comptait pas les années, et que cette ère fut établie après Lui. Quelques-uns prétendent qu'elle fut fixée du temps d'Abou-Bakr, par son lieutenant dans le Yémen, nommé Ya'la, fils d'Omayya. D'autres disent qu'elle a été établie par Omar, fils d'Alkhattab, dans les circonstances suivantes : Abou-Mousa Al Aschari lui écrivit un jour que les lettres du prince des croyants lui arrivant toujours sans être datées, il ne savait pas à quelle époque remontaient ses ordres, et pour qu'il sût, il faudrait dater les lettres.
Omar, trouvant qu'Abou-Mousa avait raison, établit alors l'année de la Fuite et fait observer que c'était l'usage des Perses de dire : tel jour de tel mois, en telle année depuis l'année où tel événement mémorable s'est passé. Omar, trouvant cette coutume très bonne, réunit tous les compagnons du Prophète et leur dit : Nous allons compter nos années à partir de l'année de la naissance du Prophète, car il n'y en a pas de plus sacrée pour les musulmans. Quelques-uns répliquèrent : Comptons à partir de l'année où Il reçut sa mission prophétique, qui est plus sacrée ; car c'est le moment de l'origine et de l'apparition de l'Islam. Omar dit : Comptons à partir de l'année où se manifesta le pouvoir de l'Islam, la vérité s'affermit et l'erreur fut confondue, aucun fait plus important que celui-là n'est survenu dans le monde. Par conséquent, l'année de la Fuite fut établie comme ère.
Les traditionnistes et les chronologistes regardent avec raison la première version comme plus vraie. En effet, une ère est une chose généralement connue, qui ne peut être ignorée par personne, et Omar en connaissait l'usage. Il est constant, d'après des traditions avérées, que les Arabes comptaient anciennement à partir de l'année de l'Eléphant et à partir de la reconstruction de la Kaâba. Il n'est donc pas possible que le Prophète ait négligé cet usage, et qu'Omar ait dû en être informé, pour l'établir. On rapporte une parole du Prophète, que nous allons transcrire, quoi qu'elle ne se trouve pas dans cet ouvrage (de Tabari), qui est inexact en ce qui concerne l'établissement de l'ère de l'Hégire. Le Prophète a dit : «Certes, le temps est revenu en sa révolution ou au jour où furent créés les cieux et la terre. L'année se compose de douze mois, et chaque mois a trente jours. Quatre de ces mois sont sacrés : rajeb et trois autres consécutifs : dou'lqa'da, dou'l-hidja et moharrem». --------------------------------------------------------
Expédition de Dsât-oul-‘Oschaïra
Plusieurs jours après, un homme de La Mecque, nommé Kourz, fils de Djâbir, le Fihrite, avec une troupe de Qoraïschites, vint faire un incursion sur le territoire de Médine, enlever le troupeaux des habitants qui se trouvaient éloignés de la ville à trois journées de marche et les emmener par des chemins détournés, à La Mecque. Le Prophète, averti trois jours après, se mit aussitôt avec plusieurs Mohadjir à sa poursuite. Le Prophète resta trois jours à Badr puis Il entra à Médine. Ce fut Ali qui porta le drapeau du Prophète dans cette expédition. Zaïs, fils de Haritha, avait été laissé comme lieutenant à Médine. Badr est un droit, au milieu du désert, où il y a un grand nombre de puits qui ont été creusés anciennement par un Arabe nommé Badr.
Le premier jour du mois de rajeb, le Prophète appela Abdallah, fils de Dja'hsch, et lui donna le commandement de douze hommes de Mohâdjir, tels que Sa'd, fils d'Abou-Waqqaç, Otba, fils de Ghazawân, Abou-Hodsaïfa, fils d'Otba, et Wâqid, fils d'Abdallah, de la tribu de Yarbou. Quelques-uns prétendent qu'ils n'étaient qu'au nombre de sept.
Le Prophète, craignant que s'il disait à ‘Abdallah où il devait aller et ce qu'il devait faire, celui-ci, ainsi que ses compagnons, eussent peur et refusassent de marcher, lui remit un écrit cacheté en lui disant : "Marche dans la direction de La Mecque, n'ouvre cette lettre qu'au troisième jour de route, exécute les ordres que tu y trouveras et rends-toi à l'endroit qui y est indiqué par Moi. Ne force pas ceux de tes compagnons qui ne voudront pas te suivre. ‘Abdallah partit le premier jour du mois de redjeb. Après avoir marché trois jours, il ouvrit la lettre et y trouva les instructions suivantes : Avance-toi jusqu'aux portes de La Mecque, jusqu'à Batn-Nakhl, reste là en secret et cherche à épier les habitants de La Mecque, sache ce qu'ils font, ce qu'ils projettent et ce qu'ils ont fait des troupeaux qu'ils ont enlevés d'ici, s'ils les ont tués ou gardés.
Cherche à savoir ce qu'ils disent de ce que je les ai poursuivis et manqués. Après avoir accompli ces ordres, revenez. Le Prophète avait aussi enjoint à ‘Abdallah de ne pas combattre car on était au mois de redjeb où il était défendu aux Arabes de faire la guerre ; et le Prophète observait cet loi. ‘Abdallah communiqua cette lettre à ses compagnons. Batn-Nakhl est une station près de La Mecque, la première sur la route de Tâïf. Ce fut là que le Prophète, en revenant de Tâïf, passa la nuit, fit la prière et où les péris vinrent le trouver, comme nous l'avons raconté. ‘Abdallah dit à ses compagnons : Je sui sûr qu'en allant jusqu'aux portes de La Mecque, à Batn-Nakhl, nous n'en reviendrons pas vivants. Le Prophète m'a ordonné de ne forcer aucun de vous à me suivre. Que ceux d'entre vous qui désirent le martyr viennent et que ceux qui ne le veulent pas s'en retournent ! Tous le suivirent.
A la première étape, le chameau qui appartenait en commun à Sa'd, fils d'Abou-Waqqaç, et à ‘Otba, fils de Ghazawân, et qui portait leurs bagages, s'échappa pendant la nuit. Le lendemain, ne le voyant pas, ils se mirent à sa recherche, tandis qu'‘Abdallah poursuivit sa route, ils s'enfoncèrent dans le désert et vinrent jusque dans le Nedjd, et ne purent plus le rejoindre.
‘Abdallah, se rendant à l'endroit que le Prophète lui avait indiqué, s'y arrêta et prit des informations, en interrogeant tous ceux qui y passaient. ‘Okpascha, fils de Mi'hçan, l'un de ses compagnons, alla comme espion explorer tous les lieux et rapporta à ‘Abdallah des informations. Comme on était au mois de redjeb, mois sacré, où l'on ne faisait pas la guerre et où les gens venaient de tous côtés visiter La Mecque et les Lieux saints (‘Omra) il s'était rasé la tête afin de ne pas être reconnu et afin de se faire passer pour un pèlerin en état pénitentiel (i'hram). Il entrait ainsi à La Mecque et prenait partout des renseignements.
Or, une caravane mecquoise, venant du Tâïf, chargée de fruits, de raisins et d'autres marchandises, vint à passer près de l'endroit où était campé ‘Abdallah et y fit halte. Elle était escortée de quatre hommes, personnages considérables d'entre les Qoraïschites. L'un d'eux était ‘Amrou-ben Al-‘hadramî, les autres étaient : ‘Othmân, fils d'Abdalleh, fils de Moghaïra et son frère Naufal, les Makhzoumites, enfin, al-‘Hakm, fils de Kaïsân, affranchi de Mouslim, fils de Moghaïra. En apercevant ‘Abdallah, fils de Dj'hsch, et ses compagnons, ils eurent des appréhensions ; ils dirent entre eux: Mohammed a envoyé quelques hommes pour surprendre et enlever la caravane. Ils se disposèrent à faire halte à cette station et à envoyer l'un d'entre eux à La Mecque pour chercher du secours. Tout d'un coup, ‘Okâscha, la tête rasée, parut sur une élévation de sable. En le voyant, ils dirent : Nous sommes au mois de redjeb, le mois sacré, ces hommes sont (sans doute) des Arabes venus pour visiter les Lieux saints. Al-‘Hakm, fils de Kaîsân, dit : Quand même ce seraient des gens de Mohammed, celui-ci respectera assez le mois de redjeb pour ne pas ordonner de faire la guerre pendant ce mois, et de commettre des actes de brigandage. En conséquence, ils firent halte au même endroit. Le jour que précédait cette nuit était le dernier du mois redjeb.
Pendant la nuit,‘Abdallah, fils de Dja'hsch, délibéra sur ce qu'il devait faire. Il y a là, dit-il, de nombreuses marchandises : si j'attaque demain, et que je les enlève, j'aurai combattu au mois de redjeb et violé la sainteté de ce mois, si j'attends, ils gagneront La Mecque et le butin nous aura échappé. ‘Abdallah et ses compagnons résolurent d'attaquer et d'enlever la caravane, disant : Ce sont des infidèles, envers lesquels il n'y a pas lieu d'observer une interdiction sacrée. Le matin, lorsque la caravane se mit en marche, ils s'approchèrent avec leurs armes, et ‘Abdallah, fils de Dja'hsch et Wâqid, fils d'Abdallah, qui étaient d'habiles archers, tirèrent sur ‘Amrou ben-Al-l'Hadrami, le chef de la caravane, et le tuèrent. En voyant tomber ‘Amrou, ‘Othmân, fils d'Abdallah, s'enfuit et se sauva à La Mecque ; les autres, Naufal, fils d'Abdallah, et Al-‘Hakm, fils de Kaïsân, se rendirent. ‘Abdallah, fils de Dja ‘hsch, leur fit lier les mains, enleva la caravane et s'enfonça dans le désert en se dirigeant vers Médine.
A cette nouvelle, les Mecquois allèrent à leur poursuite, mais ils revinrent sans avoir pu les atteindre. Ils furent très étonnés de ce fait et dirent : Mohammed a violé la sainteté du mois de redjeb en envoyant une expédition guerrière pour verser du sang et faire du butin et des prisonniers, il ne prospérera jamais et sa religion n'aura jamais de succès. ‘Abdallah, fils de Dja'hsch, arriva à Médine au mois de scha'bân, avec son butin et ses prisonniers, et se présenta devant le Prophète. Celui-ci fut très courroucé et lui dit : Pourquoi as-tu agi ainsi? Je ne t'avais pas ordonné de commettre des actes d'hostilité au mois sacré. Les compagnons du Prophète blâmèrent tous ‘Abdallah, fils de Dj'asch, et lui dirent : Les infidèles et les idolâtres eux-mêmes s'abstiennent de faire ce que tu as fait au mois de redjeb.
Le Prophète retint les prisonniers et confisqua le butin, sans y toucher, en attendant les ordres de Dieu. Puis le Prophète demanda des nouvelles de Sa'd, fils d'Abou-Waqâç, et d'Otba, fils de Ghazawân. On Lui répondit que, à une certaine station ; nommée Ma'adan, ayant perdu leur chameau, ils étaient allés à sa recherche et que depuis lors, on n'avait pas eu de leurs nouvelles. Le Prophète fut inquiet de leur sort ; Il craignait qu'ils ne fussent tombés entre les mains des ennemis. Ensuite, Il fut informé que des Qoraïschites les blâmaient d'avoir commis des actes de violence au mois de redjeb, ce qui n'était pas permis dans aucune religion.
Les musulmans qui n'avaient pas émigré et qui étaient restés à La Mecque firent avertir le Prophète par un messager de ces propos des Qoraïschites et Lui firent demander quelle réponse ils devaient leur faire. Alors Dieu révéla le verset suivant, par lequel Il rassura le Prophète : "Ils t'interrogeront au sujet du combat dans le mois sacré. Dis : C'est un péché grave de combattre pendant ce mois ; mais détourner les hommes de la voie de Dieu, ne pas croire en Lui, chasser des hommes du saint temple où ils habitaient, est un péché plus grave devant Dieu. L'idolâtrie est un péché plus grave que le meurtre ”. ‘Abdallah, fils de Dja'sch, et ses compagnons furent très heureux de cette révélation.
Le Prophète fit parvenir le verset aux musulmans de La Mecque pour qu'ils pussent répondre aux infidèles qoraïschites. Les Qoraïschites envoyèrent quelqu'un pour racheter les deux prisonniers. Le Prophète répondit : Nous n'acceptons pas leurs prix. Nous avons perdu deux de nos gens ; Sa'd, fils d'Abou-Waqâç et ‘Otba, fils de Ghazawân, dont nous n'avons pas de nouvelles. Quand ceux-ci réapparaîtront, nous vous renverrons ces prisonniers. Mais si nous acquérons la certitude qu'on les a tués, nous mettrons aussi à mort ces deux hommes. Sa'd et ‘Otba, en recherchant leur chameau, étaient venus jusqu'à Nadjrâne. Ne l'ayant pas trouvé, ils revinrent à Médine au mois de scha'bân. Alors le Prophète, considérant les deux prisonniers comme leur rançon, les renvoya à La Macque, après en avoir reçu le prix. Dans le même mois de scha'bân, au milieu du mois, Dieu ordonna au Prophète de ne plus se tourner pendant la prière vers Al Qods, mais vers la Kaâba. Les Arabes, en priant, se tournaient vers la Kaâba, tandis que les juifs et les chrétiens se tournaient vers Al Qods où était le temple bâti par Salomon, fils de David, endroit illustre, vers lequel se tournaient également Moïse et Jésus. (à suivre…)