«Je suis heureuse d'être là pour me produire pour la première fois sur une scène marocaine et rencontrer un public marocain», lance avec une voix émue Saïda Jawad.
LE MATIN
27 Avril 2008
À 12:18
La comédienne franco-marocaine vient d'offrir son nouveau spectacle «Monsieur Accordéon» à l'Institut français de Casablanca dans le cadre d'une tournée nationale. «Par malchance je suis tombée dans une période de grève dans les instituts français d'Agadir et de Marrakech, mais le spectacle de Casablanca a été un véritable succès», explique Jawad qui promet une autre tournée pour rattraper le temps perdu. Invitée dans le cadre du Festival du rire d'Agadir, la comédienne n'en est pas à son premier passage au Maroc. Il y était déjà lors du tournage du téléfilm «Ali baba et les 40 voleurs» dans lequel elle jouait le rôle de Ouria, la deuxième épouse d'Ali baba endossé par son compagnon de la ville Gérard Jugnot.
Après la critique et le public français, c'était au tour des compatriotes de la jeune actrice de partager ce moment d'intimité plein d'émotion. «Après quatre mois au Splendid, j'étais agréablement surprise par l'impact qu'a eu le spectacle. En fait c'est très particulier comme travail dans la mesure où j'y raconte une partie de ma vie, mes émotions, mes espoirs et mes déceptions», nous raconte Saïda avec sa voix chaleureuse. Esprit, émotion et tendresse sont au menu de ce spectacle autobiographique. Dans «Mr Accordéon» Saïda replonge dans son passé de petite fille. Avec un humour affecté, elle raconte son «mariage arrangé» avec cet instrument imposant par un père trop soucieux de «franciser» sa fille. «Ce spectacle raconte mon parcours et ma vie. De la fillette enfant d'immigrés marocains à une femme libérée, de la musique au théâtre, du pays minier aux plateaux parisiens, j'ai interprété et écrit ce spectacle pour vous» commente Saïda Jawad. A 7 ans déjà, l'enfant a une grande responsabilité : celle de maîtriser un instrument purement français. D'après son père, c'est sa «carte de séjour», c'est sa nouvelle identité de française accomplie.
De cours en concours, la jeune musicienne excelle et démontre un grand talent en remportant plusieurs prix. «C'était éprouvant physiquement et moralement. L'accordéon est un instrument assez lourd surtout pour la petite fille que j'étais. Les multiples compétitions auxquelles mon père me faisait participer en rajoutent également à cette souffrance» se rappelle Saïda. Mais la comédienne n'en est pas pour autant rancunière. Au contraire, elle reconnaît que c'est grâce à l'«obsession» de son père qu'elle a pris goût à la scène. A force de se produire avec son accordéon, Saïda va découvrir les plaisirs procurés par les planches. De la musicienne talentueuse à l'Antigone affranchie, Saïda a eu besoin de dix ans pour déclarer sa flamme et rompre son mariage arrangé avec l'accordéon.
L'ambition plein la tête, la jeune actrice quitte son Roubaix natal pour descendre à Paris. Là bas, c'est un autre monde qui s'offre à elle et elle n'avait qu'à franchir les obstacles pour y arriver. Elle évoque avec beaucoup d'ironie le «racisme des casting». Avec son joli minois, Saïda était à mi chemin: soit trop soit pas assez arabe. Pas facile à «catégorifier» ce petit bout de femme pleine d'énergie et d'espoir. Elle persiste et arrive aussitôt à percer dans ce milieu assez étanche. Elle fait ses premiers pas au cinéma avec un film marocain «Les Casablancais» de Abdelkader Lagtaâ en 1998 puis enchaîne avec d'autres productions françaises comme «Chemins de traversée» (1999), «C'est la vie» (2000), «kusskuss» (2003).
La télévision l'accueille avec hospitalité et lui offre plusieurs rôles et par la même occasion la rapproche plus des téléspectateurs. «Changement de cap», «l'Algérie des chimères», «les enfants de Charlotte», «la crim», «L'adieu» et dernièrement «Ali Baba»… Saïda a le vent en poupe et rien ne semble l'arrêter. Elle reste quand même fidèle à ses premières amours : le théâtre. Avec une dizaine de pièces à son compte, elle se met à l'écriture et donne jour à «Mr Accordéon».
Biographique à volonté, ce spectacle révèle un autre visage de l'espiègle Saïda. Forte et tendre à la fois, elle sait marier les genres pour dire son âme. «Car venant du c?ur ça va directement au c?ur du public» commente Saïda qui nous raconte comment son spectacle est apprécié et par les adultes et par les enfants. «Chacun s'y reconnaît à sa façon. J'ai découvert que nous tous nous sommes passés dans notre vie par des situations similaires. Soit on choisit pour nous mêmes soit nous choisissons pour les autres surtout pour nos enfants» commente Saïda. Elle n'oublie pas toutefois de rendre hommage à son géniteur. «C'est quand même grâce à lui que j'ai découvert ma véritable passion : la scène» ---------------------------------------
Plein de projets
Prolifique, Saida ne compte pas s'arrêter en si bon chemin. Elle se prépare actuellement pour le tournage d'un nouveau film «Rose et noir» aux côtés de Gérard Jugnot. «Les événements se passent en Espagne à l'époque de l'inquisition. J'y joue le rôle d'Amalya, une espagnole qui a du sang maure», annonce l'actrice. Côté théâtre, elle récidive avec un nouveau spectacle autobiographique également avec une touche humoristique intitulé, «La fille du Nord».