On les appelle communément les «snipers de la toile». Leurs armes: leurs webcams ou leurs téléphones portables. Leurs proies: des filles respectables qui ne méritent pas d'être humiliées… >
LE MATIN
16 Mars 2009
À 15:35
«Méfiance est mère de sûreté», c'est un adage qu'on dirait inventé pour certaines internautes marocaines qui n'ont commis aucune faute sauf avoir créé une page sur Facebook, Myspace ou sur des sites communautaires du même genre. Quoi de plus légitime et naturel que de vouloir garder le contact avec ses proches et amis sur la toile ? «C'était l'appel le plus traumatisant de toute mon existence quand mon oncle avait trouvé sur Youtube ma photo en tenue légère prise à la plage lors de mes vacances et ce, dans un diaporama intitulé «les prostituées de Rabat». Lequel diaporama a été monté par un voleur de photos sur Internet», témoigne Oumnia, une jeune femme qui n'a fait que publier un album photo sur sa page personnelle référenciée sur le site communautaire Myspace, pour qu'il soit commenté par ses amies les plus proches. Cette jeune est tout de même chanceuse. «Sur le champ, j'ai envoyé le lien en question à tous mes contacts pour leur demander d'envoyer un message d'alerte à l'administrateur de Youtube. Sans l'aide et l'amabilité de mes amis, je ne m'en serai jamais sortie. Car fort heureusement, le diaporama a été supprimé, après plusieurs jours d'affolement et de panique totale», se souvient-elle. Et d'ajouter: «Désormais, je me méfie comme de la peste de ces sites communautaires. Je n'ajoute sur mes listes que mes vraies amies et quelques uns de mes proches».
Le cas d'Oumnia n'est, hélas, pas unique. Beaucoup de «Slide Shows» circulent en toute quiétude sur le net, faisant fi de l'honneur de nos compatriotes de sexe féminin. A en croire certaines vidéos du site Youtube, visiblement truquées, toutes les Marocaines seraient assimilées à des êtres sans gêne! Curieusement, les «snipers de la toile» ne se sont pas contentés de ces jeunes filles. Des dames, à l'air vénérable, n'ont pas échappés à ce syndrome qui s'est emparé de notre pays (exempt de textes qui régissent le web). Un exemple des plus édifiants, est celui de cette vidéo sur Youtube très commentée qui montre une dame, habillée en caftan, chignon à l'ancienne, en train de tchater par webcam sur MSN. Autrement dit, rien d'incongru. Toutefois, les commentaires en disent long sur les amalgames et faux panachages que beaucoup de misogynes se font sur une femme qui utilise le "tchate". Cependant, un des commentaires remet les pendules à l'heure.
Son auteur affirme que la personne sur la vidéo est l'une des dames les plus respectables de sa ville et que certainement son "sniper" ne voulait que de sa réputation. Autres victimes, autre supercherie: L'indécence des pervers du net est parfois tellement poussée que de jeunes filles se trouvent filmées par vidéotéléphonie ou "à l'aide" de la webcam. Après, ces "snipers" n'hésitent pas à faire des montages avec ces vidéos en émettant de vulgaires appels téléphoniques qui leur servent de «fond musical». Ainsi, ces vidéos sont référenciées, sans hésitation aucune, sur Youtube ou sur Dailymotion (un autre site du genre). Désuet ou en vogue, ce phénomène promet de jouer les prolongations au grand dam de ces filles ou ces dames qui ne veulent que garder le contact avec les leurs et optent pour Internet, accessibilité oblige. En effet, le droit sur l'image semble avoir omis la toile. Sous d'autres cieux, les châtiments sont draconiens.
Or, dans notre pays, pénétrer dans un commissariat pour porter plainte contre un "criminel électronique" relève du surréel, voire du ridicule. Preuve en est que les quelques avocats que nous avons contactés sont d'emblée tombés dans les discours moralisateurs libérés de toute explication juridique. Comme cet avocat de la ville d'Agadir qui se cantonne à dire qu'une fille ne doit pas publier ses photos sur la toile (quelles que soient ses raisons) ou cette avocate casablancaise qui affirme qu'un tel supplice ne vaut pas plus qu'un «fait divers juridique inclassable, car virtuel». Par ailleurs, les filles qui s'adonnent à ces moyens de communication (tchat, webcam, sites communautaires…) sont systématiquement assimilées, par certains, à des filles à la recherche d'un futur conjoint. Ne cherchez surtout pas à comprendre! ------------------------------------------------------------------
Internautes du Golfe
Les "snipers" pervers ne sont, décidément, pas tous d'origine marocaine. Héros du site Youtube, un certain Azouz, originaire d'un pays du Golfe, est connu pour être derrière beaucoup de diaporamas et vidéos de filles marocaines qui "refusent de lui céder", d'après les dires de l'une de ses victimes. De même, cette dernière n'a pas hésité à créer un profil sur ledit fournisseur de vidéos dans le but de se venger de son bourreau. Ainsi, elle y a mis l'adresse e-mail de ce dernier, et ce, pour que les utilisatrices du net se méfient désormais de lui, ainsi que de ses semblables… Autre détail de taille, aucune vidéo ne montre le soi-disant séducteur dans des situations compromettantes avec l'une de ses proies. Cela en dit long sur la perversion injustifiable de ce Azouz.