Fête du Trône 2006

Le Maroc et les logomachies du Venezuela

04 Février 2009 À 19:49

La décision souveraine du Maroc de fermer son ambassade à Caracas, capitale du Venezuela, ne semble pas seulement prendre de court les dirigeants de ce pays. Elle a le mérite de dévoiler leur duplicité et, surtout, de mettre à nu leur politique apocryphe. Un préalable s'impose au regard de ce qu'on peut appeler la mise à plat des relations entre le Maroc et le Venezuela : la clarification impérative à un moment où, croyant jouer sur deux tableaux et des principes de moralité, Caracas s'évertue à fourvoyer les esprits, curieusement relayé pour ne pas changer par la presse algérienne à la botte. Pourquoi le gouvernement de Caracas s'imagine-t-il pouvoir faire impunément et insidieusement un lien entre la fermeture de son ambassade au Venezuela par le Maroc et l'agression israélienne contre Gaza ? Pourquoi aussi, usant des mêmes arguties que la presse algérienne en mal d'arguments, insinue-t-il que la fermeture de son ambassade par le Maroc a un lien avec celle d'Israël ? Quelle malice le pousse-t-il à instrumentaliser, à falsifier et à manipuler la réalité ? L'étrange amalgame, qui nous rappelle l'époque stalinienne et les procédés de la Guépéou, entre contexte strictement bilatéral et la Palestine, est pour le moins ahurissant.

Face aux extravagances des responsables du Venezuela, un haut responsable du ministère marocain des Affaires étrangères n'a pas manqué de souligner que «le Maroc n'a laissé passer aucune occasion pour leur faire prendre conscience que leurs provocations gratuites et irresponsables, leurs prises de position gratuites contre l'intégrité territoriale du Royaume sont incompatibles avec la prétention de vouloir construire des relations salutaires, consistantes et conséquentes avec le Maroc».
Elles ne peuvent, en l'occurrence, que nous inspirer l'inquiétude, voire l'écœurement, parce qu'elles procèdent d'une volonté délibérée de porter atteinte en vain à la réputation de notre pays, à son attachement indéfectible à la cause palestinienne et, en même temps, au principe intangible de notre intégrité territoriale. Pour ne s'en tenir qu'au simple principe de souveraineté, comment ne pas voir dans la démarche des dirigeants du Venezuela une violation flagrante et inadmissible du principe de souveraineté et, au-delà, l'expression d'une volonté de manipulation ?

Ils ont décidé de rompre leurs relations avec Israël sans que personne n'y trouve à redire, invoquant la liberté et le devoir de dénoncer – ils ont raison d'ailleurs – l'agression sioniste en Palestine. Ils n'ont en revanche point admis la raison justifiée et la liberté du Maroc de fermer son ambassade à Caracas au nom de la même souveraineté nationale.

Comme le souligne une source autorisée au ministère des Affaires étrangères à Rabat, « en voulant commenter la décision souveraine du Royaume du Maroc de fermer son ambassade à Caracas, un conseiller du président Hugo Chavez a laissé libre cours à son imagination, divaguant sur le contexte et les considérations qui ont dicté la décision souveraine du gouvernement marocain ». Il est une chose pour commencer, elle ne saurait laisser indifférents ni le gouvernement ni le peuple du Maroc : le soutien avéré et actif de Caracas aux séparatistes et aux adversaires du Maroc. Ce soutien qui ne peut exister, encore moins persister sans susciter la réaction du Maroc. Notre pays a pris la mesure de cette attitude ouvertement hostile de la part des autorités du Venezuela et, en tout état de cause, la rejette catégoriquement. Il préfère à la limite rompre pour ne pas s'accommoder d'une duplicité qui ne relève pas de sa culture et de son éthique. Que le gouvernement du Venezuela renvoie l'ambassadeur d'Israël de Caracas et le déclare « persona non grata » relève encore une fois de la souveraineté du gouvernement de Hugo Chavez.

C'est son droit et personne n'y devrait trouver à redire. Le Maroc, pas plus que d'autres. Notre pays respecte la décision souveraine du Venezuela, mais ne peut se résoudre à ce que ce dernier pays imagine, en quoi que ce soit, entretenir ne serait-ce qu'un infime lien entre cette décision de souveraineté vénézuélienne et celle du gouvernement marocain de fermer son ambassade à Caracas. C'est se méprendre à vrai dire sur la moralité de notre diplomatie et ses vertus, outre l'engagement solidaire et irréfragable que notre pays, son peuple et son Roi n'ont jamais cessé d'exprimer envers la Palestine.

C'est aussi compter sans la réaction du peuple marocain, offensé et offusqué par les propos diffamatoires des responsables vénézuéliens qui, en l'occurrence, n'ont pas de leçon à nous donner en matière de solidarité avec la Palestine. Peut-être convient-il de souligner, encore une fois, que le peuple marocain a commencé à apporter son soutien politique, financier, voire militaire au peuple palestinien avant même que M. Hugo Chavez ne prenne le pouvoir en 1999 et ne se proclame « chevalier blanc » des bonnes causes ! Il convient de mettre en garde les autorités du Venezuela sur cette propension automatique et stalinienne à procéder par amalgame : d'une part en établissant un lien de cause à effet entre l'expulsion du diplomate israélien de Caracas et la décision du gouvernement marocain de fermer son ambassade au Venezuela. D'autre part, en propageant de manière rédhibitoire et mensongère des rumeurs sur notre cause nationale et notre intégrité territoriale.

Cette attitude est d'autant plus scandaleuse qu'elle s'inspire de l'hostilité délibérée, elle porte préjudice aux sentiments du peuple marocain, à la fois au niveau de son attachement à sa cause sacrée, ensuite au devoir de solidarité envers la Palestine.

La fermeture de l'ambassade à Caracas par le Maroc ne signifie ni plus ni moins qu'un signal, un rappel à plus de responsabilité du gouvernement du Venezuela qui procède par une confusion délibérée et désastreuse des principes et des devoirs. Il viole également l'esprit des résolutions pertinentes adoptées entre 2007 et 2008 par le Conseil de sécurité des Nations unies, piétine à sa guise les efforts que ces dernières déploient pour mettre en œuvre une solution politique définitive à un problème créé ex-nihilo par le gouvernement algérien. La diplomatie, comme la politique, ne se réduit pas aux envolées lyriques ou aux logomachies, fussent-elles révolutionnaires !
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