Spécial Marche verte

La plage de Rabat ne «craint» plus l'hiver

Il est 15h30 sur la plage de Rabat. C'est un après-midi type de la capitale, un de ces après-midi qui se ressemblent par leur monotonie et leur paix imperturbable.

10 Décembre 2009 À 16:28

Une fois sur la plage, l'air patelin de la mer vous remplit les narines. Les vagues grises s'écrasent bruyamment sous les pieds des gens épris par le charme du lieu. Ils sont indifférents face au vent glacial et aux gouttelettes d'eau qui commencent à tomber et continuent à contempler avec extase les troupeaux blancs des cigognes qui s'envolent dans le vaste ciel. Les fameuses felouques de la vallée du Bouregreg oscillent tranquillement au rythme du flux et du reflux de la mer, totalement vides par ce temps d'hiver.

Une mer, des cultes
La plage, bourrée de gens il y a à peine quelques mois, est presque déserte cet après-midi. Quelques rares jeunes couples sont éparpillés ici et là sur les bancs bordant la plage. Les uns gardent le silence, peut-être jugeant le lieu trop majestueux pour le profaner par des paroles. D'autres sont totalement insensibles au charme de la mer, lui tournent carrément le dos, enchevêtrés dans de longues conversations.

Une légère brume couvre l'horizon, embrouille la vision, isole la plage du monde extérieur et en fait un espace clos qui recèle de la magie. Rien ne rompt le silence somptueux qui plane sur le lieu, à part le bruit des vagues, pareil à des chuchotements. La plupart des «visiteurs» sont des étudiants, des couples amoureux ou encore des gens venus d'autres horizons. Ils sont là pour la même raison: respirer un grand bol d'air frais et prendre congé du train-train quotidien. La mer leur procure la fraîcheur, la sérénité et le bien-être dont ils ont besoin pour "recharger leurs batteries".

Trois étudiantes, Soumaya, Karima et Houda s'assoient calmement sur un banc et contemplent rêveusement la mer. «Une fois nous avons terminé nos cours à la fac, nous nous sommes accourues ici pour nous défouler un peu et pour oublier le stress des études, ne serait-ce que durant une bonne heure», explique Soumaya. «D'ailleurs, c'est la première fois qu'on arrive ici par un tel temps.
On ne le regrette pas: c'est charmant», renchérit Houda, la voix émue et les yeux attendris. «L'air frais de la mer nous fait du bien. L'endroit est calme et il n'y a pas trop de visiteurs comme pendant l'été.

C'est ce qui nous encourage à y venir fréquemment: ici on se sent parfaitement à l'aise», ajoute Karima, souriante. Juste à côté, un garçon et une fille s'entretiennent intimement sur un banc. La conversation semble prendre une tournure importante et les isole peu à peu de leur entourage. Ils viennent d'arriver et ne comptent déguerpir qu'après le coucher imminent du soleil. «Les gens viennent l'été pour nager, jouer et s'amuser. Nous, on vient l'hiver nous détendre et profiter de ce calme infrangible qu'on ne retrouve plus l'été», s'explique le garçon, la fille souriante et hochant la tête en signe d'acquiescement.

Métamorphose
Il n'y a pas longtemps que la plage de Rabat était entièrement dépourvue des services les plus élémentaires tels que les kiosques, les cafés, les restaurants, les toilettes…
Pendant les temps de basse température, la plage était un espace de détente charmant certes, mais trop inconfortable et très mal équipée pour pouvoir y passer de longues heures. Aujourd'hui, tout cela semble appartenir au passé.

Avec la mise en place de l'espace marina dans le cadre des travaux de réaménagement de la vallée du Bouregreg, la plage de Rabat s'est complètement métamorphosée et a gagné la réputation d'un espace chic et luxueux. De célèbres enseignes de cafés-restaurants ont été implantées sur les lieux, offrant une belle vue panoramique sur la mer et même sur l'autre rive où s'étend, à perte de vue, la ville de Salé.

Ces équipements ont, à vrai dire, changé la face de la plage. Aujourd'hui, elle ne désemplit pas, surtout pendant la nuit.
C'est devenu même un endroit tout indiqué pour passer une soirée haute en couleurs, en couple ou en famille.
Sauf qu'il faut penser à baisser la barre des prix de la restauration qui ne conviennent pas encore à toutes les bourses.
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Plage by night

Il est 17h30. La nuit est déjà tombée. Le rouge saignant du ciel rencontre dans le vaste horizon le bleu pâle des vagues, formant un chatoyant tableau de couleurs. Le hurlement du vent et le bruit assourdissant des vagues composent une symphonie bizarroïde mais agréable à entendre. Le froid est insoutenable, pourtant l'espace fourmille de gens, couples, enfants, adolescents, familles… Les cafés sont pleins à craquer, une lumière tamisée et une musique douce s'en dégagent, augmentant le romantisme du lieu. L'endroit est paisible. Une paix nouvelle, inhabituelle, étant donné que, par le passé, la plage était prise d'assaut par les ivrognes, les toxicomanes et les sans-abri qui y trouvaient refuge une fois la nuit tombée. Au-delà de 18 heures, être encore sur la plage de Rabat était une aventure extrêmement périlleuse. Aujourd'hui, c'est pendant la nuit que les gens affluent sur la plage. Les gamins peuvent déambuler ou s'essayer à leurs trottinettes en toute sécurité. A minuit, la plage est encore animée. Elle sait accueillir ses visiteurs le jour comme la nuit, l'été comme l'hiver.
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