Fête du Trône 2006

Les populations des bidonvilles en réduction continue

Le Programme Villes sans bidonvilles est entré dans une phase cruciale. Plusieurs évaluations ont été réalisées comme celle récente de l'UE qui a estimé le programme «globalement positif».

25 Juillet 2010 À 12:40

Une évaluation qui est à la fois une appréciation, une évaluation d'impact et une analyse des politiques. Obligatoire pour les programmes nouveaux ou reconduits conformément aux règles en vigueur à la commission de Bruxelles, cette évaluation a été la deuxième du genre après celle appliquée à la politique de l'eau. Elle porte sur la pertinence, l'efficacité et l'efficience de la politique de résorption de l'habitat insalubre par référence à des objectifs clarifiés, hiérarchisés et en partie quantifiés qui avaient été annoncés par la plus Haute autorité du pays. Les conclusions de cette étude confortent la politique menée et demande une meilleure prise en compte de la ville inclusive. C'est la même conclusion auquel aboutit Jean Yves Barcelo conseiller interrégional à ONU Habitat, qui a récemment séjourné au Maroc. Les progrès sont visibles depuis le lancement par le Souverain du programme de villes sans bidonvilles en juillet 2004. Le programme s'étalait sur la période 2004-2010 concernait 83 villes et 280 000 ménages résidant dans près de 1000 bidonvilles.

Ce programme devait mobiliser 21,4 milliards de DH dont une subvention du Fonds Solidarité Habitat estimé à près de 8 milliards. L'idée d'évaluation sous forme d'étude ou de classement comme c'est le cas aujourd'hui avec ONU Habitat est intéressant à plus d'un titre car elle peut devenir demain si l'on en a la volonté politique, une véritable culture et un outil d'aide à la gestion publique. Elle peut améliorer la qualité, la pertinence d'un programme, aider à plus d'efficience, les bénéfices devant résulter de tout programme étant à la hauteur des moyens mis en œuvre. De passage au Maroc, Jean Yves Barcelo, conseiller interrégional d'ONU Habitat rappelle que «Le Maroc en réduction de nombre de personnes logées dans des taudis et les bidonvilles a eu à travers le programme Villes sans bidonvilles un impact fort. Concernant l'indicateur relatif aux bidonvilles, le Maroc est classé deuxième après l'Indonésie concernant le taux de réduction de la population des bidonvilles pour la période 2000-2010, soit 45,8%, considéré comme un bon indicateur au plan quantitatif.

Ce sont là des chiffres internationaux qui sont la traduction des efforts réalisés par votre pays. Le Maroc est devancé par l'Indonésie (47,5%), suivi par l'Argentine (40,7%), la Colombie (39,7%) et l'Egypte (39,2%). Il s'agit du «TOP 20» des pays retenus par UN-HABITAT qui concourent à la réduction de la fracture urbaine par l'amélioration des conditions de vie des bidonvillois, en réponse à la Cible 11 des Objectifs du Millénaire pour le Développement qui vise à «Améliorer sensiblement la vie d'au moins 100 millions d'habitants de taudis, d'ici à 2020».

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«Le Maroc classé deuxième concernant le taux de réduction de la population des bidonvilles»

LE MATIN : On sait qu'aujourd'hui ONU Habitat plaide pour une stratégie de développement des villes. Pouvez-vous nous présenter cette institution ?

Jean Yves Barcelo :
Dans Onu Habitat, il y a Habitat ; ONU-Habitat c'est l'agence spécialisée des Nations unies pour les villes, grandes et petites.
Elle a été créée en 1978 et actuellement quelque 150 experts internationaux, plusieurs centaines de consultants sur le terrain recrutés au cas par cas, selon les projets, et des experts nationaux qui se comptent en milliers travaillent sur le terrain.
Le mandat d'Onu Habitat est de promouvoir par des conseils aux gouvernements et par des formations institutionnelles, des villes durables c'est-à-dire économiquement productives, socialement inclusives et environnementalement saines. Cette organisation internationale appuie les gouvernements dans leurs politiques avec deux thèmes d'entrée, la ville inclusive et un logement adéquat pour tous.

Comment une institution comme ONU Habitat perçoit-elle les avancées du Maroc dans le domaine du développement urbain ?

A travers mes différents séjours effectués au Maroc, j'ai pu constater un certain nombre d'évolutions.
Il y a dans un premier temps, la prise en compte du rôle positif des villes, moteur de développement et une certaine réconciliation avec toutes les villes, grandes, moyennes et petites villes, c'est-à-dire avec l'ensemble du réseau urbain. C'est important car tout est lié, ne pas traiter la pauvreté dans les petites villes crée des phénomènes d'exclusion qui sont non seulement des facteurs de déstabilisation à l'intérieur des petites villes mais aussi dans les périphéries des grandes villes qui sont elles aussi touchées par l'exode. Nous sommes très heureux à ONU Habitat que le gouvernement marocain ait impulsé cette prise en compte des villes qui doivent être inclusives grâce à des grands programmes comme Villes sans bidonvilles, le programme de création de villes nouvelles, l'ensemble permettant d'améliorer le niveau de vie de la population dans le milieu urbain et rural.

Quels sont les progrès qu'il faut entreprendre et quels sont les champs qui restent à investir ?

J'ai eu des discussions avec de hauts responsables dont le ministre de l'Habitat et de l'Aménagement du territoire, le directeur général des collectivités locales, le directeur d'Al Omrane ; La conclusion que je peux en tirer, c'est que les choses bougent au Maroc.
C'est au plus haut niveau de l'Etat, qu'il y a une prise de conscience du rôle de moteur de la ville et de la nécessité de sa mise à niveau.
Il y a un consensus national autour de ces thématiques d'inclusion. Le Maroc en réduction de nombre de personnes logées dans des taudis et les bidonvilles a eu à travers le programme Villes sans bidonvilles eu un impact fort.
Concernant l'indicateur relatif aux bidonvilles, le Maroc est classé deuxième après l'Indonésie concernant le taux de réduction de la population des bidonvilles pour la période 2000-2010, soit 45,8%, considéré comme un bon indicateur au plan quantitatif.
Ce sont là des chiffres internationaux qui sont la traduction des efforts réalisés par votre pays.
Le Maroc est devancé par l'Indonésie (47,5%), suivi par l'Argentine (40,7%), la Colombie (39,7%) et l'Egypte (39,2%). Il s'agit du «TOP 20» des pays retenus par UN-HABITAT qui concourent à la réduction de la fracture urbaine par l'amélioration des conditions de vie des bidonvillois, en réponse à la Cible 11 des Objectifs du Millénaire pour le Développement qui vise à «Améliorer sensiblement la vie d'au moins 100 millions d'habitants de taudis, d'ici à 2020. le Rapport de UN-HABITAT sur l'Etat des Villes dans le Monde (2010-2011), qui fait état de cet indicateur, précise que de tels résultats ont été atteints au Maroc à la lumière d'une politique volontariste, d'objectifs clairement définis et de ressources budgétaires appropriées. Cette politique ambitieuse s'est faite ainsi qu'une politique, à des outils mis en place grâce à une véritable ingénierie financière. Maintenant il faut essayer d'aller plus loin, dans cette logique de ville inclusive, qui prenne en compte la question des transports, de l'emploi et intégrer toutes les dimensions tout en donnant plus de responsabilité aux communes. Il faut élargir leur champ de responsabilités.

Messages clefs du 5e Forum urbain mondial

1. Il importe d'évoluer d'un cadre de plaidoyer vers un engagement normatif sur le Droit à la ville. Davantage d'efforts seront engagés pour la mise en place des instruments institutionnels et juridiques appropriés, en intégrant les spécificités sociales et culturelles propres à chaque contexte, en vue du renforcement d'un cadre urbain viable.

2. Il est essentiel de revoir les modes de gouvernance, dans un contexte d'urbanisation accélérée, de mutations urbaines et de défis croissants, en termes de changements de comportements et de relations de pouvoir. Des appels ont été lancés à cet effet en faveur de nouvelles approches de planification, de modèles innovants, en rupture avec les pratiques d'exclusion sociale, d'évictions forcées et de privations. De nouvelles approches en matière de planification, d'accès aux services de base et de gestion locale doivent s'accompagner de cadres basés sur des politiques équitables,
à l'échelle nationale et locale.

3. Les inégalités dans la ville ne se limitent pas aux seuls revenus mais intègrent d'autres dimensions. La réduction de la fracture urbaine requiert une approche intégrée où s'articulent des formes d'inclusion économique, sociale, politique et culturelle. Si le cadre des Objectifs du Millénaire pour le Développement demeure nécessaire à une mise en oeuvre pluridimensionnelle, il importe de compléter les trois axes de la durabilité – social, économique et environnemental – par la dimension transversale de la gouvernance et des technologies.

4. Dans un monde où les villes génèrent 80% des déchets et 60% des gaz à effet de serre, s'attaquer à la pauvreté urbaine peut en diminuer les effets.
Des villes plus saines requièrent des outils plus performants en matière d'aménagement du territoire, de cadres normatifs en matière d'infrastructures, de services et de construction. Le recours à des technologies appropriées pour la réduction de l'impact écologique sur les villes doit s'accompagner de la fourniture d'infrastructures et de services publics accessibles et abordables. Mais si les nouvelles technologies constituent un réel apport, elles doivent être complétées par la mise en place de structures de gouvernance à même de mobiliser les populations, les communautés, les instances publiques et privées, pour une optimisation des ressources tout comme pour la réduction de la fracture technologique.

5. A toutes les parties impliquées en faveur de la réduction de la pauvreté, il importe de travailler avec les pauvres, et non pour eux. Alors que la Cible des Objectifs du Millénaire pour le Développement sur les taudis se trouve atteinte – 22 millions d'habitants ont quitté chaque année les bidonvilles au cours de la précédente décennie –, l'augmentation de 776 à 827 millions d'habitants des bidonvilles au cours de la même période traduit de nouveaux défis ; à cet égard, les bidonvilles représentent une violation des droits de l'Homme. Relever le défi des bidonvilles doit aussi assurer l'équitable accès à l'éducation et la sécurité pour tous les citoyens, particulièrement les femmes et les jeunes. La participation sociale doit devenir dans ce sens un modèle de démocratie et de justice, en vue de réaliser les droits à la ville.
Pour réduire la fracture urbaine, les populations pauvres seront au centre des interventions, pour un droit à la ville protégé par des lois et accompagné par la société civile.

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