«Nous voulons accroître la contribution de la femme au développement du Maroc»
L'Association des femmes chefs d'entreprises du Maroc (AFEM) fête ses 10 ans d'existence cette semaine. En plus du bilan d'une décennie d'activités, cette association, qui milite pour l'entrepreneuriat féminin, projette de mettre un très grand nombre de projets en place. Une étude entre autres permettra de connaître la contribution de la femme chef d'entreprise à l'économie nationale.
LE MATIN
05 Décembre 2010
À 11:39
LE MATIN : Comment jugez-vous, madame Badraoui, le bilan d'une décennie d'activités de l'Afem ?
SORAYA BADRAOUI DRISSI : Effectivement, notre association fêtera, le jeudi 9 décembre 2010, ses a dix ans d'existence. A cette occasion, nous organisons un forum sur le thème « Innover, entreprendre: un challenge au féminin » et au cours duquel les premiers résultats de l'étude sur l'entrepreneuriat féminin seront présentés. Notre bilan est globalement positif. En une décennie, notre association a fait un beau parcours. Nous avons élargi la base de nos adhérentes. Nous sommes aujourd'hui plus de 500, alors que nous étions au démarrage à peine quelques dizaines. En dix ans, nous pouvons dire que nous avons acquis une reconnaissance aux niveaux national et international. Nous avons renforcé notre représentativité au niveau régional avec 6 délégations : Rabat, Tanger, Fès, Marrakech, Agadir et El Jadida. Nous avons développé de nombreux partenariats privés et institutionnels au Maroc et à l'étranger. Evidemment, notre association est encore jeune et nous avons encore du pain sur la planche. Nous avons initié de nombreux chantiers durant ces dix ans qui nous confortent dans notre rôle d'association locomotive pour une plus grande contribution de la femme au développement économique de notre pays.
Pouvez-vous nous citer quelques faits marquants de ce parcours de l'Afem ?
Le parcours de notre association durant ces dix ans a été marqué par la réalisation de nombreux projets. L'un des plus importants pour moi reste le chantier incubateur de ''Casa pionnières''. C'est à mon avis une contribution concrète à l'entrepreneuriat féminin, puisque nous encourageons et accompagnons la création de projets. Il a permis de démontrer la capacité de notre association à mettre en place des projets concrets et constructifs. Depuis, plus d'une cinquantaine d'entreprises gérées par les femmes ont été créées. C'est un challenge qui nous a amenées à nouer des partenariats avec des institutions puisqu'il fallait trouver des locaux et des partenaires pour nous accompagner financièrement et en expertise aussi. Le deuxième fait marquant, c'est l'édition d'un guide de modélisation du projet reprofilage. Ce projet consiste à former de jeunes femmes diplômées au chômage pour les intégrer dans le monde du travail avec une forte contribution des entreprises membres de l'Afem. Grâce à ce projet en partenariat avec l'Université Hassan II et l'Université Qadi Ayad, une centaine de jeunes diplômés ont pu trouver un emploi. Un autre fait marquant, c'est la signature d'une convention avec la Chambre des conseillers qui a coïncidé avec le début de mon mandat. Il y a également notre participation aux événements des grandes instances internationales comme l'OCDE et qui nous donnent la fierté d'être femmes chefs d'entreprises marocaines.
Quelles seront les grandes lignes, sinon les grandes orientations, de l'action de l'association pour les années à venir ?
Il y a de grandes lignes qui me semblent évidentes comme l'élargissement de la base de nos adhérentes et le renforcement de notre représentativité au niveau régional. Nous avons également prévu de démultiplier les autres projets-phares tels que le modèle incubateur dans les autres grandes villes comme Tanger, Fès, Marrakech… pour booster la création d'entreprises par les femmes dans les régions. Nous avons également la volonté de pousser les femmes chefs d'entreprises à s'impliquer dans l'export et investir les marchés à l'international. Une autre orientation est de faire siéger l'Afem dans les conseils d'administration à vocation économique. Nous poussons également nos petites entreprises à se regrouper pour soumissionner dans les appels d'offres sous forme de GIE. Nous avons mis en place pour cela un projet d'accompagnement. Et enfin, il est important pour nous de multiplier les partenariats et les réseaux pour permettre à notre association de rayonner davantage. L'objectif étant de positionner la femme chef d'entreprise sur l'échiquier économique afin d'accroître sa contribution au développement du Maroc. En revanche, nous aurons, sans doute, des orientations nouvelles qui nous seront dictées par les résultats de l'étude que nous avons initiée. Elles nous insuffleront certainement d'autres grandes lignes à suivre.
L'entrepreneuriat féminin est-il arrivé à percer au Maroc ?
A mon avis, oui mais encore insuffisamment. Au début de l'Afem, le taux d'entrepreneuriat ne dépassait pas les 9%; aujourd'hui, il est de au-dessus de 12% et l'étude en cours d'élaboration devrait nous éclairer un peu plus sur ce sujet. Nous souhaiterions en effet qu'il y ait encore plus de femmes chefs d'entreprises dans les régions, telles que l'Oriental et le Sud. Nous voudrions aussi les voir dans les différents secteurs d'activités et surtout au niveau des industries et des activités de niches telles que les NTI et les énergies renouvelables. Les femmes chefs d'entreprises doivent être plus entreprenantes et percer les marchés de l'export. A ce niveau, notre rôle en tant qu'association est d'encourager ce mouvement. Nous développons, d'ailleurs, un projet en partenariat avec la Banque mondiale dans ce sens. Nous en faisons un de nos axes stratégiques pour les années à venir.
Enfin, l'Afem lance une étude sur l'entrepreneuriat féminin au Maroc. Pour quel objectif et quand est-ce qu'elle sera prête ?
L'Afem a lancé une étude sur l'entrepreneuriat féminin et son évolution au cours de ces dernières années. Cette étude devenait d'autant plus nécessaire que la dernière étude date de 2004. Elle s'impose donc pour nous permettre d'évaluer nos choix et le cas échéant entreprendre des actions correctives dans nos orientations. Cette étude comme la précédente va servir à l'ensemble de la collectivité. Elle nous permettra de connaître la contribution véritable de la femme chef d'entreprise à l'économie et au PIB, mais aussi sa contribution à la création d'emplois. Nous aurons une meilleure vision de la cartographie régionale et des secteurs d'activités où elle opère ainsi que sa part à l'export. Cette étude devrait être finalisée bientôt et les premiers résultats seront présentés lors de la cérémonie d'anniversaire de 10 ans et nous serons heureuses de partager cet événement avec les entrepreneurs et nos partenaires.
Problématique du financement
Pour mener son travail, l'AFEM a fait face, selon sa présidente, à des problèmes de financement. « Evidemment comme toutes les associations le nerf de la guerre est le volet financier. A chaque fois que nous avons un projet nous devons pour le concrétiser prendre notre bâton de pèlerin pour le rendre finançable et surtout lui trouver les financements », explique-t-elle. Toutefois, l'Association ne manque pas de soutien, avec « l'apport précieux des forces vives de l'AFEM qui se mobilisent pour initier les projets et pour assurer leur succès », selon Mme Badraoui, qui ajoute que l'Afem a aussi l'appui de son réseau qu'il soit national ou international et celui des partenaires. Par ailleurs, l'AFEM est membre de l'Association des femmes chefs d'entreprises mondiale (FCEM), de l'Association des femmes chefs d'entreprises Méditerranée et l'Association des femmes chefs d'entreprises de la région MENA, membre de ANIMA.