Quoi de plus ingénieux que d'ouvrir un festival du calibre de Mawazine avec la Diva de la chanson arabe, la Libanaise Majda Roumi. Celle qui se respecte et respecte l'art dans son vrai contexte.
LE MATIN
21 Mai 2010
À 15:51
Une artiste qui a pu conquérir les cœurs de différentes générations grâce à son dévouement vis-à-vis de son art et sa persévérance malgré les multiples courants qui ont envahi la scène artistique arabe. Car pour elle, il n'y a que le meilleur qui persiste. Le reste n'est qu'un nuage passager et très éphémère. «C'est triste de voir des artistes faire des concessions aux dépens de l'art. Celui-ci étant devenu une industrie à travers laquelle on fait du commerce. La situation est déplorable et le plus dangereux dans tout cela c'est que l'art est l'image de tout pays. Des remèdes. Il y en a. Mais il faut un vrai engagement de la part des gouvernements et des institutions de l'information qui doivent jouer leur vrai rôle pour la préservation de notre art de toute défaillance. Cela va de notre honneur, de notre identité et notre dignité. L'artiste a besoin d'être entretenu et soutenu. Il n'y a que l'Etat et les grandes institutions qui peuvent faire cela. Les festivals, les télévisions, les médias ont aussi leur part de responsabilité. C'est comme le cas de Fairouz, Oum Kaltoum, Abdelwahab, Abdelhalim et autres leaders de la chanson arabe qui furent bien couvés par leurs gouvernements», affirme cette artiste engagée qui estime que l'art est la langue spirituelle avec laquelle peuvent communiquer les peuples.
La veille de son fabuleux concert sur la scène, Nahda, qui a envoûté ses nombreux fans venus de plusieurs villes du Royaume, Majda Roumi a donné une conférence de presse au cours de laquelle elle a montré, encore une fois, sa position et son éternel engagement artistique. «Ma position envers mon pays le Liban a toujours été très claire. Je serai tout le temps avec le gouvernement officiel que je soutiendrai avec force. J'essaye d'être une bonne citoyenne et de jouer le rôle qui m'incombe. Si chacun de nous fait de même, nous gagnerons beaucoup de terrain», souligne l'artiste Majda qui a été très émue de revenir sur la scène marocaine. Un pays qu'elle estime énormément. «Je suis très contente de revenir chez vous, dans ce beau pays que j'aime énormément ainsi que son peuple qui me rend généreusement cet amour».
En effet, ses concerts au Maroc furent toujours une belle réussite et un beau cadeau pour les Marocains qui l'apprécient à sa juste valeur et pour son talent qui a fait d'elle une grande artiste ayant su s'imposer par sa voix mélodieuse et le choix de ses poésies et compositions.
Cette même voix pure et unique invite au rêve et à l'émerveillement. C'est une femme qui laissera, sans aucun doute, son nom écrit par des lettres d'or, car elle est la seule de sa génération à avoir su préserver son authenticité. Elle constitue le lien entre un passé glorieux de la chanson arabe et un présent douloureux où la musique est devenue un pur commerce. Mais elle a beaucoup de foi en l'avenir. «Je ne sais pas ce que me réserve l'avenir. En tout cas, j'essaye de donner de jour en jour le meilleur de moi-même, de choisir les bonnes paroles et les belles mélodies. Je suis optimiste et très confiante dans le futur. Même si les grands partiront, il y aura sûrement une relève de jeunes de la trempe de leurs prédécesseurs», renchérit-elle.
Cette confiance, Majda nous la démontre concrètement avec les œuvres déjà réalisées en compagnie de jeunes talents. «Je suis très contente de ma collaboration avec Kadem Saher et bien d'autres que je trouve très doués pouvant aussi marquer l'histoire de leurs empreintes». Son passage à Mawazine ne sera pas oublié de sitôt.
Un parcours bien tracé
Ayant entamé sa carrière artistique au début des années 70, Majda Roumi s'est construit, à pas sûrs, un univers des plus respectables dans le monde de la musique jusqu'à devenir Ambassadeur des bonnes volontés de l'ONU. Influencée, depuis son jeune âge, par les grandes figures de la chanson arabe, notamment Fairouz, Oum Kaltoum, Abdelwahab, Wadiî Assafi, Asmahan, Abdelhalim,… Majda Roumi a, dès sa première apparition à la télévision, séduit le public libanais et particulièrement son cousin, Raymond Safadi, qui l'a encouragée à se lancer dans la chanson, malgré les réticences de son père qui n'a donné sa bénédiction qu'avec la condition de poursuivre ses études supérieures en parallèle de sa carrière musicale. Son répertoire musical s'est enrichi, ainsi, d'année en année avec de belles œuvres, dont elle tenait toujours de choisir minutieusement aussi bien les textes que les compositions. Son premier album sorti en 1977 a eu un énorme succès public. «Kalimat», «koun sadiki», «Habibi» et bien d'autres ont fait le bonheur de ses fans, dont certains ont eu le privilège de les apprécier en live dans de grands festivals comme celui de Beiteddine, Jarash, Bosra et de Carthage ainsi que le théâtre de l'opéra du Caire où elle s'est produite à plusieurs reprises. Considérée comme la princesse du chant oriental, Majda Roumi est la première, de la nouvelle génération, à avoir collaboré le célèbre Nizar Qabbani au début des années 90.