«C'est grâce au Maroc que je suis là aujourd'hui (rire)»
Harry Connick Jr., entre crooner et glamour «C'est grâce au Maroc que je suis là aujourd'hui (rire)» Standing ovation pour le crooner américain Harry Connick Jr. Accompagné de son Big Band de la Nouvellle-Orléans, l'artiste a donné un show glamour époustouflant, samedi, au Théâtre Mohammed V.
LE MATIN
26 Mai 2010
À 15:00
Le matin : Vous cumulez les talents : vous êtes chanteur, musicien, compositeur, arrangeur, réalisateur. Dans quel rôle vous sentez-vous le mieux ? Harry Connick Jr. : Musicien, je le suis depuis toujours en quelque sorte. Je suis né à la Nouvelle-Orléans, c'est tout dire ! La ville EST musique. Elle a vu l'éclosion des noms les plus prestigieux du jazz et de la soul. De plus, bien que mes parents fussent respectivement juge et procureur, ils possédaient un magasin de disques. La musique a donc toujours fait partie de ma vie depuis mon plus jeune âge. A 3 ans, j'ai commencé à jouer du piano et je me suis produit publiquement pour la première fois à l'âge de 6 ans. J'ai enregistré mon premier disque à 10 ans avec un groupe de jazz professionnel. J'ai poursuivi mon éducation musicale au New Orleans Center For The Creative Arts, tout en me produisant dans des clubs et des bars. J'ai signé mon premier album à 18 ans où je reprenais tous les standards hollywoodiens, c'est là que ma carrière a débuté. J'ai joué à Broadway car des opportunités se sont offertes à moi. J'ai écrit de la musique de spectacles. Mais même si j'ai touché à tout, je dois dire que ce qui me définit le mieux, c'est pianiste.
Vous avez tenu à jouer avec des musiciens marocains lors de votre concert. Et ont réalisé une improvisation inédite avec vous, au bendir et vos musiciens au tuba et saxo. Connaissez-vous la musique marocaine ? Et comptez-vous réaliser un futur enregistrement assorti de ces tonalités musicales ?
Je confesse que je ne connais rien à la musique arabe. Hier, pour la première fois, dans un restaurant à Rabat, j'ai découvert ces rythmes qui me sont totalement étrangers et je voulais absolument traduire ces échanges rythmiques lors de mon concert. Mais je suis irrésistiblement animé par la curiosité de découvrir ce monde musical et de me familiariser avec ces nouveaux sons, tout comme j'ai envie de découvrir ce pays et ses gens. La diversité musicale, c'est ce qui m'a bercé et c'est ce qui fait la particularité de la Nouvelle-Orléans. La musique marocaine, il est vrai, ne fonctionne pas selon le même mode et n'obéit pas aux mêmes systèmes que la musique occidentale. Aussi, ai-je besoin d'être doublement concentrée pour décrypter ce langage pour l'heure hermétique. Mais quand on aime les autres cultures, on doit s'imprégner aussi de leur culture musicale. La musique marocaine est sans doute insolite pour moi mais elle se caractérise par son rythme, l'aspect le plus important, à mes yeux, en matière de musique. Je pense qu'il n'est pas impossible que je réalise un disque avec ces nouvelles couleurs musicales.
Vous avez vendu plus de 25 millions d'albums dans le monde et reçu 3 Grammy Awards. Qu'est-ce qui vous reste à prouver musicalement, après plus de 20 ans de carrière ?
Je n'ai jamais cherché à prouver quoi que ce soit. Un jour, j'ai été remarqué par un producteur et j'ai signé mon premier album composé de standards hollywoodiens. Suite à cela, en 89, Bob Reiner m'a demandé de signer la bande originale de son film «Quand Harry rencontre Sally» avec Meg Ryan et Bill Cristal. Le film a rencontré un succès colossal et j'ai été récompensée pour la musique d'un double disque de platine. «I had to be you» que j'ai composé est devenu un classique. Ensuite, les choses se sont enchaînées. J'ai réalisé plusieurs musiques de film dont celle du Parrain III. J'ai joué aussi dans plusieurs films: «Petit homme» avec Judie Foster ou encore dans Independance Day, mais cela ne procède en aucun cas d'une stratégie de carrière. J'ai eu beaucoup de chance, voilà tout.
Vous venez d'enregistrer un duo avec la première Dame de France, Carla Bruni. Pourquoi ce choix et comment s'est passée cette rencontre ?
Tout d'abord, je dois avouer que Carla Bruni est la meilleure amie de ma femme Jill Goodacre. Elles se sont connues sur les podiums puisqu'elles ont été top models à peu près à la même époque. Lorsque Carla Bruni s'est lancée dans la chanson avec succès, ma femme a fait partie de ses premiers fans. Cela étant, ce n'est pas ce qui a présidé au choix de cette collaboration. C'est plutôt le fruit du hasard car je ne planifie jamais rien. Nous avons donc décidé d'interpréter, en y apportant notre touche, un classique des Beatles «And I love her ». Nous l'avons ensuite proposée en avant-première, lors de mon passage à la salle Pleyel à Paris, à la mi-mai et je dois dire qu'elle a remporté un vif succès. La chanson, bien sûr !
Vous entretenez une histoire particulière avec le Maroc. Pouvez-vous nous la raconter ?
C'est grâce au Maroc que je suis là aujourd'hui (Rire). Mes parents se sont rencontrés ici en 1953. Mon père occupait le poste d'ingénieur à la base militaire de Nouaceur ; à Tanger et ma mère y était secrétaire. Mes parents se sont aimés et ont convolé en justes noces à Casablanca. Ensuite, ils ont dû quitter le Maroc et se sont installés à la Nouvelle-Orléans. Mais ils ont pris avec eux une part de ce magnifique pays qu'ils nous ont légué à ma sœur et à moi, depuis notre plus tendre enfance. A la maison, nous avons toujours vécu dans cette atmosphère magique et fascinante du Maroc. Chaque partie de la maison : un meuble, un cendrier, un tableau rappelaient la culture marocaine. Ce pays a toujours été présent dans le cœur de mes parents et dans le mien. J'ai d'ailleurs conservé toutes les adresses des maisons où mes parents ont vécu, que ce soit à Casablanca ou à Tanger. Vous comprenez l'immense joie que j'ai ressentie quand on m'a fait l'insigne honneur de m'inviter à Mawazine. Je n'arrive toujours pas à croire que je suis là, dans l'un des plus beaux pays du monde.