Dimanche dernier à Laâyoune, 151 personnes ont été victimes d'une intoxication alimentaire lors d'une cérémonie de mariage. Une femme, qui n'a pas été hospitalisée, est décédée, tandis que ceux qui ont reçu les premiers soins ont échappé aux complications graves liées à l'intoxication.
LE MATIN
20 Juillet 2010
À 16:05
Les analyses d'échantillons des aliments consommés ont confirmé que l'origine est due à une infection bactérienne de la viande de dromadaire servie. Il y a trois semaines, une dizaine de personnes, à Casablanca cette fois, a été admise au service des urgences pour le même motif: ingestion d'une viande avariée. Au Maroc, les cas d'intoxication alimentaire n'arrêtent pas de défrayer la chronique. Du coup, l'alimentation est devenue un véritable sujet de préoccupation.
Selon les spécialistes, les intoxications alimentaires résultent de l'ingestion d'aliments contaminés par un microorganisme nocif ou par un agent pathogène. Les microorganismes qui peuvent les causer sont les virus, les parasites et les bactéries. Ces derniers sont le plus souvent pointés du doigt dans les cas d'intoxications alimentaires. «Parmi les aliments incriminés figurent, en premier lieu, les produits laitiers et leurs dérivés, suivis des viandes et des pâtisseries. Les intoxications alimentaires occupent la troisième place, après celles dues aux piqûres des scorpions ou aux émanations de monoxyde de carbone. Parfois, elles peuvent être mortelles", souligne Sanaa Benlarabi, Docteur et membre du Centre anti-poisons du Maroc (CAPM). Selon ses propos, elles sont dues principalement aux produits de conserve périmés, à l'utilisation de pesticides, au manque d'hygiène, au non respect du stockage des aliments ainsi qu'aux achats des produits de contrebande.
Elle a rappelé que les intoxications alimentaires sont dues non seulement à la consommation d'aliments ou de boissons contaminées par des bactéries mais aussi aux allergies alimentaires. Selon Mohammed Boutaleb, spécialiste des maladies de l'appareil digestif, les symptômes d'une intoxication alimentaire débutent quelques heures à plusieurs jours après la consommation d'un aliment, selon l'agent pathogène et la quantité ingérée.
Ils peuvent être des nausées, douleurs abdominales, vomissements, diarrhées, fièvre, maux de tête, fatigue physique, anorexie, jaunisse….. Si les premiers signes débutent entre 1 et 6 heures après la consommation de la nourriture, on suspecte plus une toxine bactérienne plutôt que la bactérie elle-même pour laquelle les signes n'apparaissent pas avant 12-36 heures après le repas. Les virus, se manifestent en général après 1 à 3 jours, parfois quelques semaines.
Consommateurs, méfiez-vous
La prévention est une question de bon sens. Ne touchez aux aliments qu'après vous être lavé les mains. Quand il fait très chaud, il faut se méfier des produits qui contiennent du lait, des œufs et de l'eau non bouillie (comme les sorbets). Enfin, ne gardez pas les restes, ni la viande hachée, ni les aliments à base de lait et d'œuf, de mayonnaise ou de crème. La restauration rapide est placée en ligne de mire. Les services d'hygiène destinés à contrôler les restaurants ont un rôle primordial dans le maintien des conditions d'hygiène minimales. La propreté est devenue une denrée rare dans de nombreux snacks, fast-food et restaurateurs au rabais. Les ustensiles de cuissons sont peu ou mal lavés, l'huile de friture sert pour plusieurs mois, les frigos trop vieux pour maintenir les aliments à une température constante, les cafards et autres animaux de compagnie (chats notamment) se promènent tranquillement jusque sous les tables du restaurant. En résumé, la salubrité laisse trop souvent fortement à désirer. A force d'en entendre parler, à Casablanca et ailleurs, le phénomène est devenu banal. Et en l'absence de contrôle des services d'hygiène concernés, les restaurateurs peuvent continuer à jouer avec la santé des consommateurs.
Explication: Docteur Mohammed Boutaleb • Spécialiste des maladies de l'appareil digestif.
«La transmission directe est le mode le plus répandu»
L'été est-il vraiment la saison de prédilection des intoxications alimentaires (IA) ?
Le risque des IA existe toute l'année avec une variation selon les saisons, (30% en été, 26,7% au printemps, 22,2% en automne et 18,6% en hiver). Ceci s'explique par le mode de transmission et de multiplication des agents pathogènes avec en plus la baisse de rigueur en matière d'hygiène individuelle.
Quels sont les modes de transmission ?
Il y a un mode direct par la personne qui manipule l'aliment, c'est la source la plus répandue, et indirecte par l'eau, ou les animaux, en particulier les mouches et les rongeurs, qui servent de vecteurs.
Existent-elles des statistiques ?
Au Maroc, en 2009, l'unité de toxico-vigilance à reçu environ 700 cas intoxications par les aliments avec deux décès. Ce chiffre est en légère augmentation par rapport à celui de 2008. A noter que tous les cas ne sont pas déclarés. Selon L'Organisation mondiale de la santé, deux millions décèdent chaque année dans les pays en développement à cause des IA.
Quelles sont les mesures de prévention ?
Les services étatiques de veille vétérinaire doivent surveiller les animaux vivants, leur abattage et les produits alimentaires qui en sont issus, en mettant en place des unités d'inspection et de répression avec une obligation de traçabilité des produits avant qu'ils ne soient sur le marché. Dans chaque unité de production, les services en question doivent surveiller les mesures d'hygiène des salariés, la chaine de froid, et surveiller les risques par des examens réguliers de sang et de selles. A l'échelle individuelle, la prévention consiste au respect des conditions de conservation des aliments, de leur date limite de consommation, à nettoyer régulièrement les frigidaires, à se laver les mains avant de préparer ou consommer un repas, à bien laver les aliments consommés frais et bien cuire ceux qui se mangent chauds.