Un répertoire des plus raffinés où Al Gharnati et autres chants médiévaux nous ont fait voyager le temps d'une soirée mémorable.
LE MATIN
25 Mai 2010
À 15:58
A côté des grandes scènes qui offrent au public de multiples formes musicales, trois espaces fermés sont là pour faire découvrir d'autres genres et styles dont le Tarab est à l'honneur dans la Villa des arts. Lundi dernier, nous avions rendez-vous avec la chanteuse lyrique Samira Kadiri et son répertoire des plus raffinés où Al Gharnati et autres chants médiévaux nous ont fait voyager le temps de cette soirée mémorable, en compagnie d'un public élitique qui sait apprécier les belles voix et les précieuses mélodies. Tel un oiseau de paradis, sa voix angélique a empli le ciel de la Villa des arts pour le bonheur du public qui fut extasié par la qualité de son chant et la finesse de son timbre vocal.
Sans oublier sa maîtrise de plusieurs langues anciennes du Bassin méditerranéen. «Que je chante en arabe, espagnol ou hébreux, le message est le même. Celui de la musique, la langue universelle», renchérit S.Kadiri qui nous a emportés avec elle dans son voyage des plus merveilleux où les anciens chants andalous de la Méditerranée étaient à l'honneur d'une voix sublime et une interprétation professionnelle. Se basant beaucoup plus sur les rythmes, pour ne pas sortir du contexte de Mawazine, le projet «Mosaïque mudéjart» de Samira Kadiri a fait impression sur l'assistance présente qui fut subjuguée par son charisme et son savoir-faire. Cette culture que maîtrise parfaitement la chanteuse lyrique Samira Kadiri, menant, à chaque fois, son public dans de beaux périples, tout en le subjuguant avec sa voix pure et sa sensibilité profonde, dénotant d'un grand talent artistique. Son slogan est de donner le meilleur d'elle-même dans tout ce qu'elle entreprend dans sa vie, car pour Samira la femme a beaucoup de compétences qu'elle doit mettre au service des autres.
C'est aussi bien en arabe, en castillan ancien, qu'en turc que Samira Kadiri a fait son périple avec des textes de femmes faisant partie des trois religions monothéistes. Ainsi, nous avons eu droit aux balades et romances séfarades en ladino (ancien parler des juifs andalous) que Samira a interprétées avec énormément de douceur. Pas étrange pour une artiste qui a très bien su gérer sa carrière artistique et son choix musical, en faisant des recherches très approfondies pour mieux s'imprégner de ce riche patrimoine méditerranéen. Une militante acharnée ayant voué sa voix et son temps pour le patrimoine ancestral et le vrai Tarab auquel peuvent prétendre seules les belles voix.
En compagnie de son orchestre arabesque, réunissant des musiciens virtuoses, elle termine son concert avec deux morceaux inédits, notamment la Nouba «Ayna Al Qalbou Yansa» (Là où le cœur oublie), écrite par l'Algérien, le docteur Noureddine Saoudi, et que Samira Kadiri considère comme un plus dans le répertoire andalou, puis un autre constituant un dialogue entre Ibn Ammar et Don Juan Alfonso datant du 16e siècle (autour de Grenade) et retrouvé au 19e siècle à Mellilia. Une exclusivité de Mawazine que la chanteuse lyrique nous a fait vivre en s'accompagnant d'instruments à cordes classiques, comme le violon et le violoncelle, et d'autres orientaux tels le oud, le qanun, le nay et la percussion. Un brassage des plus exceptionnels entre l'Orient et l'Occident.
Un parcours tracé à pas sûrs
Samira Kadiri occupe une place considérable dans le monde de la musique lyrique. Dotée d'une voix cristalline et d'un timbre chaleureux, développé dès l'enfance, du fait qu'elle a commencé à chanter les œuvres de Fayrouz dès l'âge de neuf ans. Ses études profondes du chant classique, médiéval et baroque ont forgé sa carrière artistique. Chanteuse lyrique, comédienne et chercheuse en musicologie, cette soprano de renommée internationale occupe plusieurs postes de responsabilité, notamment directrice de la Maison de la culture de Tétouan et présidente de l'association «Ecume au Maroc» pour favoriser les échanges intellectuels en Méditerranée. Son travail laborieux et sa voix rare lui ont permis d'être consacrée en 2008 par le Prix «Al Farabi» pour la musique antique ; une distinction du Comité national de la musique du Maroc relevant du Conseil international de la musique de l'Unesco. Sa programmation à la Villa des arts lui a fait vraiment plaisir, car Samira Kadiri considère ce lieu adéquat pour son style et son public