Tout dire, tout montrer, jusqu'où peut-on aller ?
La déclafication des documents historiques invite à une autre lecture de l'Histoire.
LE MATIN
03 Décembre 2010
À 19:34
Le «11 septembre diplomatique» provoqué par le site Wikileaks qui publie quelque 250 000 télégrammes «secret défense» montre, qu'au-delà de l'onde de choc provoquée dans les chancelleries, nous sommes à la fin d'un monde et au début d'un autre. La fin d'un monde, celui de la diplomatie traditionnelle et de tout ce qui la sous-tend, désormais dans le domaine public. Avec la révolution des nouvelles technologies et la société de l'information, l'on ne pourra plus garder de secret. L'inflexion est là, synonyme d'une transformation en profondeur ; et comme le souligne notre confrère Henry Lauret, dans le nouvel économiste, «tout ce qui se dit et s'écrit peut être écouté reconstitué. La lame de fond banalisée à travers les sites d'échanges et de communication, les réseaux a précipité l'humanité dans une dimension inconnue de son histoire .
Tout dire, tout montrer, tout connaître. Puisque rien ne peut être caché, ce modèle culturel surfe sur un principe de droits acquis et un mythe de transparence. Il modifie en profondeur et à grande vitesse les comportements de la société et génère des risques politiques et sociaux consubstantiel ». Les bouleversements provoqués sont à l'échelle du temps et de l'espace inconnus et posent le postulat que dorénavant aucun gouvernement ou puissance ne pourra contrôler ou réguler l'information, mais l'autre question toujours soulignée par Henry Lauret est éthique et renvoie à l'exercice démocratique.
Dans un monde d'intrusions, où tout risque de tomber un jour dans le domaine public, d'être déclassifié, le discernement et la responsabilité des acteurs pourraient utilement tenir lieu de régulation ». Imaginons par exemple que certains documents actuellement dans les archives de bibliothèques et centres de recherche de Madrid, d'Aix-en-Provence, du château de Vincennes ou de l'Assemblée nationale française sur la République sahraouie algérienne soient déclassifiés et rendus publics ? Ce passé permettrait à l'opinion internationale de mieux comprendre, les tenants et aboutissants de la conquête coloniale du Sahara marquée par des accords internationaux de partage de l'Afrique. Une des séquences à retenir de l'empire colonial c'est sans nul doute le dépeçage du Maroc au profit de l‘Espagne et de la France et la tentative de création en Algérie d'une entité spécifique « Sahara français » directement rattaché à la France métropolitaine.
Cette question avait fait l'objet d'un ouvrage au titre évocateur « Faut-il partager l'Algérie ? » d'Alain Peyrefitte, ancien ministre français des Affaires étrangères publié aux éditions Plon aujourd'hui introuvable. Dans son plan d'action, ce ministre évoquait le Sahara français qui bénéficierait souligne l'auteur, d'une magnifique infrastructure mise en place par la France. Cette entité avait intérêt, dit-il, à se trouver en bons termes avec tous ses voisins.
Ceux-ci, le Maroc et la Tunisie comprendraient sans doute qu'ils ont avantage au maintien de cet Etat, plutôt qu'au rattachement exclusif de ce territoire du Sahara algérien à une Algérie révolutionnaire, qui voudrait garder égoïstement ses ressources énergétiques pour gagner la course au développement sur ses voisins pour mieux les satelliser ».
L'histoire en témoigne, le projet vigoureusement condamné par le Maroc et la Tunisie n'a pas vu le jour mais l'Algérie indépendante, portée par une irréductible volonté de satelliser la région veut dépecer aujourd'hui le Maroc en l'amputant de ses provinces du Sud, en le coupant de ses racines africaines et en créant à l'instar du problème kurde, les racines de la confusion et du conflit pour un très long terme… La déclassification des documents historiques de cette période montrerait une histoire sous un autre jour, méconnue par les générations actuelles… Il faudrait rapidement demander aux historiens de s'atteler à cette tâche.