Les Arabes et la tentation du repli
LE MATIN
14 Février 2010
À 15:05
Le bras de fer qui oppose depuis quelques jours le gouvernement iranien aux pays occidentaux, en particulier, constitue une autre étape caractéristique de l'inconséquence de ces derniers par rapport au dossier nucléaire.
En annonçant avoir enrichi de 20% son uranium, l'Iran a suscité une vaste polémique qui, pour être aussi grave, n'en reste pas moins dérisoire, voire même ridicule.
A Téhéran, les dirigeants iraniens ne semblent pas pour autant offusqués des gesticulations auxquelles les ont habitués aussi bien les Etats-Unis que la Grande-Bretagne ou la France. « Nous travaillons avec les Chinois, les Russes, les Américains, les Anglais et (...) un certain nombre de pays qui sont relativement proches, en tout cas parfois admiratifs (du président iranien Mahmoud) Ahmadinejad ». Le propos est de Bernard Kouchner, ministre français des Affaires étrangères.
Autant qu'un relatif embarras, il exprime un désarroi des Occidentaux, mais aussi la difficulté de réaliser un consensus au niveau des membres du Conseil de sécurité. Pour ces derniers, à tort ou à raison, « Téheran organise une stratégie de tension hors de ses frontières qui inquiète ses voisins arabes ».
On estime que chacun des conflits du Moyen-Orient détient ses causes particulières et sa logique propre. Tant et si bien que l'on assiste à une «articulation de tous ces conflits, où l'élément-clé est l'émergence de l'Iran comme grande puissance régionale à potentialité nucléaire ».
Les Etats-Unis, soutenus par la majorité des Etats européens, le Japon et autres pays arabes, focalisent leur regard sur ce dossier, parce qu'il conditionne l'avenir de la région du Moyen-Orient où l'Amérique ne s'est jamais départie de son leadership et entend l'assumer.
La crise palestinienne, ravivée l'année dernière par l'agression israélienne contre Gaza et l'aveuglement belliqueux qui a caractérisé la politique de l'ancien président Georges Bush, est à présent mise en veilleuse. Si les gouvernements occidentaux ne s'agitaient pas pour défendre leurs intérêts, les Etats arabes demeureraient impassibles et quasi indifférents. La crise du Moyen-Orient est devenue une crise à géométrie variable, parce qu'elle se déplace et change de nature.
Le gouvernement israélien, composé pour l'essentiel de faucons, fait la pluie et le beau temps en Cisjordanie et ne se heurte à aucune opposition, Barak Obama voyant ses promesses se volatiliser face au radicalisme d'un Netanyahu.
D'un pays arabe à l'autre, c'est le repli sur soi et la question palestinienne, qui faisait autrefois office de fédérateur, est aujourd'hui éclipsée, renvoyée aux calendes grecques, parce qu'elle ne peut plus servir d'exutoire aux politiques intérieures des gouvernements arabes.
C'est en quelque sorte le « chacun pour soi »...Le centre de décision s'est ainsi déplacé vers les capitales européennes, notamment aux Etats-Unis et comme vient de le montrer la petite tempête dans un verre d'eau, à propos de l'Iran, la situation restera autant que faire se peut figée.
Il reste que l'immobilisme arabe, sa propension à rester isolé constituent plutôt un mauvais signe...