Les Marocains de Melilia lassés de la politique «discriminatrice»
Des jeunes issus des quartiers périphériques de Melilia occupée, théâtre depuis mardi d'affrontements violents entre police espagnole et manifestants, affirment n'avoir plus confiance dans le discours des partis et des autorités, dénonçant leur attitude «discriminatrice».
MAP
31 Octobre 2010
À 14:44
Contactés vendredi par la MAP, des Méliliens se sont dits «marginalisés» et «abandonnés à leur sort» par les partis politiques formant la scène politique espagnole locale, qui «nous bernent à coup de promesses et de slogans» à l'occasion de chaque campagne électorale. «Nous sommes las qu'on nous considèrent comme de simples voix à exploiter le temps d'une campagne électorale pour nous abandonner par la suite à notre sort», a lancé Souleimane, père de famille sans emploi.
«Depuis le début de la crise, la situation s'est empirée. Personne ne prend la peine de demander de nos nouvelles parce qu'ils nous traitent en tant que citoyens de 2e degré», a-t-il dit. Même son de cloche chez Ahmed, également sans emploi. Ce père de deux enfants a confié à la MAP que la dernière liste des bénéficiaires du programme de l'emploi n'est que la goutte qui a fait déborder le vase, en référence au climat de tension prévalant, depuis des années, dans la ville occupée en raison des attitudes «racistes» des autorités espagnoles envers les Marocains de Melilia.
«Il suffit de s'appeler Marta, Juan ou José pour décrocher facilement un emploi et accéder à un logement et à l'aide sociale», a-t-il soutenu, ajoutant qu'au sein des écoles réservées aux Marocains «se sont des Espagnols qui éduquent nos enfants contre la volonté des parents qui ont, en vain, réclamé le recrutement d'enseignants musulmans et l'élaboration de programmes d'éducation respectant les valeurs des Meliliens». Cantonnés dans des quartiers périphériques où le chômage a atteint des seuils élevés depuis le début de la crise économique, les Meliliens d'origine marocaine arrivent à peine à survivre au moment où des centaines d'Espagnols, venus d'Espagne, parviennent facilement à bénéficier des avantages sociaux et des postes d'emploi créés dans la ville.
Sur la dernière liste des bénéficiaires du programme d'emploi élaboré par la délégation du gouvernement, il est facile de relever les noms de ces étrangers à la ville occupée, qui sont venus accentuer l'état de crise que vivent les Méliliens en s'accaparant leur droit à l'emploi et à l'aide sociale. Selon le Réseau de lutte contre la pauvreté à Melilia (EAPN), qui se base sur une enquête menée par l'Institut espagnol de la statistique (INE) sur les conditions de vie, près de 37 % des foyers de Melilia vivaient en dessous du seuil de pauvreté en 2009.
La pauvreté s'est accentuée de plus de 4 % par rapport à 2008 avant de passer à un niveau critique avec la crise économique qui frappe de plein fouet l'Espagne. Le préside occupé vit principalement des échanges économiques avec le Maroc et les seuls emplois disponibles sont ceux proposés par les administrations et qui nécessitent un niveau de scolarisation ou de formation qui fait défaut à ces jeunes, victimes d'un système d'enseignement défaillant.
La ville occupée vit, depuis mardi, au rythme des affrontements entre la police espagnole et des jeunes Méliliens suite à l'annonce par le gouvernement local de la liste des bénéficiaires du programme d'embauche ayant exclu des dizaines de jeunes, en majorité des Marocains.
Un important dispositif de sécurité a été mis en place pour imposer «un véritable état de siège» aux quartiers de la ville occupée. Tous les véhicules désirant entrer ou sortir du secteur gagné par les troubles sont soumis au contrôle par de nombreux barrages érigés par les autorités locales, depuis le début des événements.
Dix-huit manifestants ont été arrêtés, dont huit ont été déférés ce vendredi devant un tribunal de la ville. Les affrontements entre la police espagnole et des jeunes méliliens ont débuté mardi dans certaines zones de la ville occupée avant de s'étendre mercredi à d'autres quartiers, suite à l'annonce par le gouvernement local de la liste des bénéficiaires du programme d'embauche ayant exclu des dizaines de jeunes, en majorité des Marocains. Pour faire face à cette situation de tension que la ville n'a pas connue depuis des années, des renforts des forces de l'ordre ont été envoyés depuis l'Espagne au préside occupé.
Les manifestants accusent les autorités locales de les avoir exclus dudit programme d'embauche, et qui prévoit l'emploi de près de 1.500 personnes à compter du mois de décembre prochain. Ces évènements traduisent le désarroi des jeunes Méliliens en proie au chômage qui sévit dans la ville occupée depuis le début de la crise économique en Espagne.