Spécial Marche verte

Les ingénieurs face à l'éthique

Même en l'absence d'un code en la matière, les ingénieurs sont appelés à assumer leurs responsabilités éthiques et citoyennes.

L'ingénieur citoyen de demain doit savoir concilier entre l'exigence professionnelle, c'est-à-dire le souci d'efficacité, et l'exigence sociale qui se traduit par un engagement éthique.

08 Mai 2011 À 13:03

Pour leur 8e forum GENI-Entreprises organisé les 4 et 5 mai à Rabat, les étudiants des grandes écoles nationales d'ingénieurs relevant de l'Université Mohammed V Souissi ont choisi un thème de grande actualité : «L'ingénieur face aux défis mondiaux : éthique et responsabilités». Ainsi, les étudiants de l'Ecole nationale supérieure d'informatique et d'analyse des systèmes (ENSIAS), de l'Institut national de statistique et d'économie appliquée (INSEA) et de l'Institut national des postes et télécommunications (INPT) font preuve d'une conscience de plus en plus développée de l'importance de la dimension éthique dans la formation et l'exercice du métier, partant du principe selon lequel « science sans conscience n'est que ruine de l'âme ». « L'éthique est devenue incontournable dans l'environnement d'entreprise d'aujourd'hui.

Par cette manifestation, nous aimerions présenter les prémices d'une éthique personnelle, professionnelle et sociale de l'ingénieur marocain. Cela permettra de développer le sens communautaire, le respect des droits et des lois d'une part et de mettre les compétences acquises au service de la société et de l'environnement d'autre part », indiquent les organisateurs. Aux yeux d'Ilham Berrada, le devoir de l'ingénieur vis-à-vis de sa communauté a la suprématie sur son devoir professionnel. « Avant d'être ingénieurs, nous sommes des humains qui mettons notre savoir-faire au service de la société », insiste-t-elle, s'exprimant lors de la cérémonie d'ouverture du Forum.

Dans le même ordre d'idées, Radouane Mrabet, président de l'Université Mohammed V Souissi, considère que l'enjeu majeur est de «mettre la technicité et l'éthique ensemble pour que notre société aille de l'avant». Faut-il tout de même reconnaître que, longtemps, les établissements de formation donnaient la priorité à l'aspect professionnel et ne se souciaient que peu de l'aspect éthique. Ceci s'applique davantage aux établissements formant des profils pointus et largement sollicités comme les ingénieurs.

Cette situation est entérinée par, d'un côté, l'absence d'un code d'éthique spécifique à la profession comme c'est le cas dans d'autres pays du monde et, de l'autre côté, par l'absence même d'un ordre marocain des ingénieurs capable de veiller au respect de l'éthique et de la déontologie du métier et d'infliger des sanctions aux contrevenants. Aujourd'hui, on relève d'importants signes de changement ne serait ce qu'au niveau du débat : on commence de plus en plus à parler des engagements sociaux et éthiques des ingénieurs comme étant un tampon de sécurité prémunissant la profession contre les dérapages qui nuisent à sa réputation. Le Forum a donc le mérite de sensibiliser les étudiants à leurs engagements moraux afin d'en faire, selon les termes d'Abdessalam Aboudrar, «des ingénieurs, des vrais, et pas de simples technocrates».

Pour le président de l'Instance centrale de prévention contre la corruption, invité de marque du Forum, le savoir-faire et le professionnalisme ne sauront à eux seuls faire un bon ingénieur. «L'ingénieur citoyen de demain doit savoir concilier entre l'exigence professionnelle, c'est-à-dire le souci d'efficacité, et l'exigence sociale qui se traduit par un engagement éthique et une plus grande attention portée aux autres. En d'autres termes, il est appelé à travailler aussi bien ses facultés rationnelles que relationnelles». Si la filière d'ingénierie est prise en ligne de mire durant la 8e édition du forum GENI-Entreprises, cela ne doit pas cacher le besoin ressenti au niveau d'autres disciplines pour l'ancrage des valeurs éthiques dans la vie estudiantine. A cet égard, M. Mrabet fait savoir qu'une charte de valeurs spécifique à l'Université Mohammed V Souissi est en cours d'élaboration. «Elle va définir les engagements moraux de toutes les parties : étudiants, professeurs et personnel administratif», précise-t-il. C'est toujours dans le cadre du débat autour du devoir citoyen des étudiants que la même université organise, les 24 et 25 juin à la Faculté des sciences juridiques, économiques et sociales de Rabat, le 1er Forum de l'emploi sous l'intitulé «université et entreprises : ensemble pour accompagner les grands chantiers du Maroc». Il fera participer, outre la faculté hôte, les facultés des sciences de l'éducation, de médecine et de pharmacie. «Ce sera un espace de rencontre entre les étudiants, les lauréats des licences professionnelles et des Masters, et les employeurs à la recherche de profils intéressants», explique le président.

Les acteurs économiques présents en force

Une forte présence des acteurs économiques se fait remarquer pendant ce 8e Forum de GENI-Entreprises. Ainsi, Mounir Ferram, directeur délégué de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), et Omar Balafrej, directeur du Technopark de Casablanca, animent une table ronde sur «la responsabilité de l'ingénieur dans l'ère de la concurrence : prospérité de l'entreprise et carrière future».
Le 5 mai, les étudiants-ingénieurs ont rendez-vous avec les «success stories» de trois lauréats des écoles d'ingénieurs qui occupent actuellement des postes-clés dans de grandes entreprises.
Dans les stands, de nombreux opérateurs économiques dans les secteurs bancaire, de télécommunications et des technologies de l'information et de la communication sont représentés. Les étudiants intéressés peuvent déposer sur place leurs CV auprès des recruteurs et effectuer des simulations d'entretiens d'embauche.
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