Le mariage des cultures en musique

Voilà un concert qu'on ne peut pas oublier de sitôt pour l'image qu'il aura donné d'un vrai métissage entre Orient et Occident; entre chefs-d'œuvre musicaux contemporains et médiévaux. Le tout porté par la voix cristalline de Samira Kadiri. C'était époustouflant ! C'est le moins que l'on puisse dire pour cette présentation des plus majestueuses qui a réuni des Mouwachah andalou, des chants sacrés, des longas, des chants séfarades, des œuvres de Georges Bizet et d'autres des grands maîtres de la musique libanaise, notamment les frères Rahabani, avec leurs mythiques titres «Li Beyrouth», «La Yadoum Ightirabi», puis «Zahrat Al Mada'en».

Ce dernier étant répertorié comme le succès le plus extraordinaire du monde arabe. Une chanson qui n'a pris aucune ride malgré les différents mouvements et styles qui lui ont succédé. Ce soir-là, ce chef-d'œuvre des frères Rahabani et de la super-star libanaise Fayrouz a été interprété d'une manière magistrale par Samira Kadiri.
Avec ce programme de choix, la chanteuse Samira a fait revivre public un moment musical inoubliable. «L'idée de ce projet a germé lors de ma participation au Festival Les Nuits d'Orient à Dijon.
Thierry Weber, qui a été émerveillé par le travail qu'on a présenté, m'a proposé de monter un projet ensemble. On s'est mis d'accord, après plusieurs propositions, de travailler sur des œuvres de compositeurs arabes qui se sont inspirés de thèmes occidentaux et vice versa.

D'où le choix de Carmen, de Bizet, puis des frères Rahabani. Ce qui est nouveau dans ce projet est ce dialogue fin qu'on a pu relever entre les deux cultures malgré leur différence, puis ce mariage parfait qui s'est installé entre ces œuvres choisies, entre les deux formations musicales qui ont pourtant des sonorités distinctes», souligne Samira Kadira.

L'artiste a d'ailleurs su avec maestria faire voyager à travers ce mélange des plus raffinés rassemblant des créations musicales de grands maîtres aussi bien contemporains que ceux des temps passés. «Pour ne pas brusquer le public marocain, on a essayé d'introduire, au fur et à mesure, les œuvres occidentales adaptées d'une manière très subtile pour qu'il puisse l'accepter et la savourer à sa juste valeur.
Ce qui est aussi merveilleux est ce dialogue musical très fin qui s'est installé entre les instrumentistes de l'Orchestre d'Harmonie et celui d'Arabesque», précise la chanteuse. En effet, entre la force créative des œuvres et la voix cristalline de la soprano, le public ne pouvait qu'être enchanté et transporté, le temps de cette soirée, vers les plus beaux chefs-d'oeuvre de l'histoire musicale. Heureusement que cette louable initiative culturelle ne s'est pas arrêtée qu'à la ville de Tétouan, puisqu'elle a pu aussi conquérir les publics des deux autres villes avoisinantes : Chefchaouen et Tanger, avec la promesse d'une plus longue tournée en France et dans d'autres villes marocaines.

Un métissage musical réussi

«Dialogue de l'amour» est une subtil mélange entre musiciens marocains de l'ensemble Arabesque et ceux de l'Orchestre d'Harmonie de Chenôve. L'ensemble arabesque a été fondé par Samira Kadiri et Nabil Akbib (chef d'orchestre) dans le but d'interpréter et de conserver la tradition andalouse des trois cultures dans les pays de la Méditerranée.
Son objectif étant de réhabiliter la période médiévale et de la Renaissance à travers une interprétation créative des règles de jeu, tout en respectant les éléments techniques et spécifiques à une musique modale.
L'Orchestre d'Harmonie de Chenôve est, quant à lui, une formation qui a derrière elle plus de 140 ans d'existence, d'un travail méthodique, patient et exigeant. Se composant de musiciens essentiellement amateurs, cet orchestre, dirigé depuis 2001 par Thierry Weber, s'est donné pour mission de promouvoir un répertoire original et attractif, ouvert à toutes les formes musicales de qualité.