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Élections : le piège de l'incurie...

24 Août 2011 À 20:48

À regarder, l'œil neuf, les préparatifs liés au calendrier qui devrait fixer définitivement la date des élections législatives - en principe le 25 novembre prochain -, à voir comment les partis politiques et le gouvernement s'agitent et s'opposent le cas échéant, on se prend à rêver d'une époque où un tel processus ne posait nul problème.

ans toutes les démocraties, que l'on sache et sauf ignorance de notre part, la date des élections est fixée par le ministère de tutelle, autrement dit de l'Intérieur. Et jusqu'à nouvel ordre, ce fut le cas au Maroc, les partis politiques, les instances concernées, gouvernementales ou autres, les candidats indépendants et « isolés », bref la nation s'y adapte, accepte et entérine une décision souveraine.

Non que celle-ci fût imposée de manière unilatérale et violente. Elle supposait un certain accord tacite, implicite, voire automatique, le ministère de l'Intérieur prenant en charge l'organisation et la mise en œuvre des opérations électorales, au plan logistique, technique et humain. Aujourd'hui, nous semblons verser dans on ne sait quel capharnaüm avant d'arrêter une date, nous sommes et à tout bout de champ en quête d'un consensus qui, telle l'Arlésienne, nous glisse des mains et échappe quasiment à notre volonté. Près de huit semaines sont passées après que le Maroc eut adopté sa nouvelle Constitution et qu'une décision implicite a été prise pour accélérer le processus des élections, procéder aux réformes qui l'accompagnent, notamment celle des listes électorales, celle portant sur le statut de la première Chambre et « tutti quanti »… À travers plusieurs de ses interventions, Sa Majesté le Roi n'a eu de cesse de rappeler l'impératif d'un timing qui devrait être respecté dans sa forme comme dans son fond.

La quête du consensus à propos de tout sujet devient une quête désespérée, car les partis ont désappris forcément la règle initiale de rigueur et de ponctualité. Pour avoir bénéficié d'un préjugé favorable, et surtout trouvé en face d'eux de nouvelles dispositions d'esprit, une administration rompue jusqu'aux ongles au débat démocratique, un État plus ouvert que jamais et une irréductible détermination à les associer à la réflexion démocratique, ils sont tentés de perdre le sens des réalités. C'est peu dire que leurs revendications – légitimes si l'on veut – ne peuvent à présent s'accommoder d'une évolution rapide, à la fois au niveau des textes et des institutions et à celui des psychologies collectives. Les querelles byzantines sur la date définitive du scrutin législatif, sur le seuil des 10 ou 6 voire 3%, sur la liste nationale ou autre critère, non seulement n'intéressent guère l'opinion, ébaubie et consternée, mais restent des chamailleries de chapelle… Elles sont d'autant plus incompréhensibles, confuses qu'elles relèvent d'un caprice désenchantant. Les partis politiques et tous ceux dont l'objectif est de participer aux élections, d'y gagner des sièges et, au-delà, de gouverner, mesurent-ils le temps perdu dans les afféteries et les débats scabreux, voire douteux ?

Et puis, dans le cadre de cette fameuse liste des 90, métamorphosée en liste de 70, il y a comme ce fameux « serpent de mer » qui surgit et nargue à la fois le débat académique et ceux qui s'y adonnent avec cette déplorable et inconsciente jubilation propre aux autosatisfaits. Les femmes, les premières en effet y verraient comme une mise à l'écart méthodique, le contraire de la morale et de la réalité sociologique et politique du Maroc. Les jeunes, de leur côté, seraient « a priori » les victimes désignées d'un processus qui, à la longue, deviendrait une sorte de partie de poker, privilégiant notamment les connaisseurs, désavantageant les néophytes, quand bien même le jeu serait d'une transparence irréprochable et comporterait les mêmes règles pour toutes et tous.

La nouvelle démocratie marocaine, celle qui vient de naître en l'An 11 du troisième millénaire, ne pourrait résister sans réagir aux fastidieux débats prolongés pour fixer une date aux élections législatives, un seuil de représentativité, un nouveau statut pour la Chambre des représentants, une réforme moderne et adéquate des listes électorales, etc. Dussent-ils être nécessaires, ces débats – au louable prétexte qu'ils doivent associer les partis et les forces vives – ne peuvent prendre en otage l'un des cycles les plus significatifs de notre histoire électorale, celui d'une transition politique majeure.
Le Roi a mis son propre poids et sa crédibilité dans la balance afin de doter notre pays d'institutions représentatives et de mécanismes pertinents, il a insufflé l'une des plus importantes dynamiques de notre histoire. Aux autres partenaires d'en mesurer les enjeux… et d'assumer leur mission comme il sied.
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