Le mot et la matière

Qualifié de très productif, l'artiste peintre Khourassani a, depuis son jeune âge, porté un vif intérêt à la peinture. Ses expositions se sont très vite multipliées, malgré sa récente apparition dans l'univers des Arts Plastiques, et ses sujets ont toujours impressionné les professionnels grâce à leur singularité et leur richesse créative.

Pour cette nouvelle prestation à Agadir, l'artiste a fait le choix sur un instrument musical aussi noble et ancien qu'est le violon, avec de brèves apparitions du luth et du ney dans quelques-uns de ses tableaux. En abordant le thème de cet instrument, Khourassani a voulu nous plonger dans une vision où l'objet rappelle les mutations du temps et de l'espace qu'il a parcourues en compagnie de son propriétaire, utilisant la matière comme élément de communication par excellence. Comme l'a signalé le critique d'art Noureddine Fathy, « Khourassani traite l'instrument musical pour le doter d'une esthétique visuelle qui instaure un dialogue avec l'œil à travers des concepts plastiques essentiels. Des concepts dont le centre de gravité est la matière alors qu'elle est sujet à une réaction chimique au sein d'un espace historique qui ne dresse point de frontières entre ses étapes, autant qu'il n'érige nullement de bornes entre ses genres expressifs ».

En prenant ces instruments comme objets de base, Khourassani estime régénérer une mémoire enfouie dans le passé. Un souvenir qu'il a déterré pour nous rendre compte de tous ses secrets. « Il nous révèle, simultanément, les mutations des idées, des attitudes et des appartenances, ainsi que la dislocation qui les affecte et l'impact de l'air du temps sur elles. Dislocation et impact qui écornent les idées, attitudes et appartenances autant de droite que celles de gauche, en amalgamant leurs cartes et en les redistribuant selon une doctrine autre, une vision autre et une société autre agencée chaque fois à nouveau et perpétuellement », explique N.Fathy. Le maître mot de tout ce travail n'est autre que la matière, dont l'évolution, dans la démarche de Younes, met en relief l'acte créateur de l'artiste basé sur le mot. Deux énoncés essentiels dans le travail de Khourassani pour faire valoir sa quête et sa créativité. En effet, « entre les deux énoncés de l'artiste se situent le labeur, l'interférence, l'interpénétration, l'analogie, la mitoyenneté, la dissémination, l'anéantissement, l'effritement… et le souvenir de passants qui ont déclamé, ont été psalmodiés et ont légué leurs effets à un temps futur dont ils ont meublé le trottoir.

Les récits de leur temps hantent leurs objets à proximité de l'araignée, combinés à la poussière et à la rouille…Ils content l'ère d'une étape capitale. Une ère où le blanc accompagnait le noir sans confrontation ni outrance, où il le jouxtait pour, seulement, la remémoration et l'évocation du fait que tout objet possède son opposé qui lui reflète sa propre image ». Avec l'âme en ébullition, toujours prête à se fondre dans la matière, Khourassani est là pour engager ses luttes, son alchimie, ses touches audacieuses, à la quête d'une originalité et d'une autre fraîcheur dans l'univers de cet art.

Un artiste ambitieux

Natif de Casablanca, Younes Khourassani est diplômé de l'Ecole Supérieure des Beaux-Arts de la métropole. Son aventure plastique s'annonce de bon augure depuis l'année 2001 où il a entamé sa carrière en exposant à Londres, Paris, Bruxelles, Kuwait, Egypte et au Maroc. Un palmarès qui atteste de la singularité d'une palette et d'une thématique étonnamment convergentes, comptant sur son seul savoir-faire et sa seule sensibilité.
Imaginatif, indépendant, misant sur un créneau nettement différencié, Younes Khourassani est en passe
de se forger un style inédit bien à lui.