Soixante dix personnes, des chefs et des principaux habitants de Médine, tels que (Berâ), fils de Ma'rour, Abdallah, fils d'Amrou, Abou-Djâbir, et Djâbri fils d'Abdallah, et les autres chefs qui étaient devenus croyants, accompagnèrent Moç'ab, afin de ramener avec eux le Prophète. Les douze personnes qui avaient prêté serment à Mohammed lors du pèlerinage avaient fixé un rendez-vous où elles se réuniraient avec Lui, à Aqaba, pour Lui prêter serment (de nouveau) et pour L'emmener à Médine. Le Prophète en parla à Abbas, qui dit : J'irai avec toi, et verrai ces hommes. La nuit du rendez-vous étant arrivée, les soixante et dix hommes de Médine se réunirent sur la colline d'Aqaba ; Abbas et le Prophète s'y rendirent de leur côté. Abbas adhérait encore à la religion des Qoraïschites ; mais il voulut confier lui-même le Prophète entre leurs mains. Lorsqu'ils apparurent au haut de la colline, tous les hommes se levèrent et leur témoignèrent du respect. Le Prophète prit le premier la parole, et leur exposa les dogmes de sa religion. Ils répliquèrent : Nous avons accepté cette foi, et nous sommes venus pour t'emmener avec nous, afin que Tu y sois à ton aise, et que nous ayons le plaisir de t'avoir. Le Prophète leur fit prêter le même serment qu'Il avait reçu des douze, en y introduisant seulement l'obligation pour eux de combattre ses ennemis, de Le protéger comme eux-mêmes, et de sacrifier leurs corps et leurs biens, jusqu'à ce que la religion soit répandue partout. Ils acceptèrent toutes les clauses de ce serment, qui est appelé serment de la guerre ou second serment. Puis le Prophète tendit la main pour recevoir l'engagement, et le premier qui mit sa main dans celle de Mohammed fut Berâ, fils de Ma'rour, d'autres disent As'ad, fils de Zorâra : d'autres encore, Abou' I-Haïtham, fils de Tayyahân. Tous, au nombre de soixante dix, prêtèrent le serment.
Ensuite Abbas, fils d'Abdou l-Mottalib, prit la parole et dit : O hommes d'Aous et de Khazradj, vous êtes tous des hommes notables et d'un rang élevé. Vous êtes venus ici, supportant des fatigues, et moi je suis venu pour bien établir nos conventions. Il est vrai que je ne suis pas partisan de la religion de Mohammed ; mais Il est le fils de mon frère, mon enfant, ma chair et mon sang. Sachez que Mohammed est, à La Mecque, au milieu de ses compatriotes, bien à son aise ; personne n'ose Le toucher ; car de toutes les tribus, celles des Beni-Haschim est la plus puissante. Mais Il a détourné son coeur des Qoraïschites et désire se rendre au milieu de vous. Aujourd'hui, les Qoraïschites Le respectent, mais demain, quand Il les aura quittés et qu'Il aura rompu tout lien avec eux, ils se sentiront humiliés, et une guerre sanglante éclatera entre eux et Lui. Tous les Arabes du monde se joindront aux Qoaïschites et seront avec eux, ils tireront leurs épées et se trôneront contre vous. Si alors vous deviez abandonner Mohammed, il vaudrait mieux Le laisser aujourd'hui au milieu de ses compatriotes.
Les soixante dix hommes de Médine acceptèrent ces paroles et renouvelèrent leur serment, en engageant de nouveau leur vie. Ils dirent à Abbas : Nous L'avons reçu d'abord de Dieu, maintenant nous Le recevons de tes mains. Nous sacrifierons notre sang et nos biens pour Dieu, ensuite toi, qui est l'oncle du Prophète. Ensuite le Prophète parla ainsi : «Vous n'avez ici pour garant que Dieu. Désignez parmi vous des mandataires (nâqiban) qui s'engagent pour vous». Alors douze hommes d'entre les soixante dix furent désignés, neuf d'entre les Khazradj et trois d'entre les Aous. Voilà nos chefs, dirent-ils ; tous les habitants de Médine obéissent à leurs ordres ; voilà nos mandataires. (à suivre)