Expédition de Dsât-oul-‘Oschaïra
LE MATIN
21 Août 2011
À 14:40
(Suite)
Ayant entendu le Prophète dire à deux ou trois personnes : ne tuez pas mon oncle ‘Abbâs, Abou-hodaïfa dit en murmurant en lui-même : Nous tuons nos pères, nos frères et nos oncles, et lui dit : Ne tuez pas mon oncle.
Par Dieu si je rencontre Abbâs, je lui donne le premier un coup de sabre sur la tête.
Ensuite Abou Hodaifa est parti avec les musulmans à la poursuite des infidèles.
Le Prophète, qui avait entendu ces paroles, dit à Omar, fils d'Al-Khattâb, présent à cette scène : As-tu entendu, Omar, ce qu'a dit Abou-Hodaïfa ? Omar répliqua : Ô apôtre de Dieu, autorise-moi à le tuer ; il est devenu infidèle et hypocrite.
Le Prophète dit : il n'est pas devenu infidèle, ni hypocrite, il parle ainsi dans la douleur qu'il éprouve de la mort de son père, de son frère et de son oncle. Omar insista et voulait à toute force que le Prophète lui permit de le tuer. Le Prophète, qui auparavant n'avait jamais appelé Omar par son surnom, lui dit : Ô Abou Hafç, ne le tue pas ; car peut-être Dieu lui donnera-t-il le martyre, qui sera une expiation de ses paroles et qui les portera dans le paradis.
Quelqu'un avait entendu cette parole du Prophète et l'avait rapportée à Abou-Hodaïfa.
Celui-ci se repentit. Il continua sa course, craignant le châtiment de Dieu, et disant : Peut-être serai-je tué et trouverai-je le martyre, pour expier mes paroles criminelles, comme l'a dit le Prophète.
Mais Abou-Hodaïfa ne fut pas tué le jour de Badr. Il suivit le Prophète dans toutes les autres batailles et combattit avec ardeur, dans la pensée de trouver la mort et le martyre.
Chaque fois, il priait Dieu de lui accorder la grâce du martyre dans le combat, afin d'expier les paroles qu'il avait prononcées. Après la mort du Prophète, lorsque les musulmans combattaient Mousaïlima l'imposteur. Abou Hodaïfa fut tué et trouva le martyre.
Après avoir envoyé les musulmans à la poursuite des infidèles, le Prophète entra dans la cabane, pria et rendit grâces à Dieu. Saad, fils de Moads, et ses compagnons se tenaient à l'entrée tous armés, sur leurs chameaux, afin de protéger le Prophète contre toute attaque.
Les croyants, acharnés à la poursuite des infidèles, les tuèrent ou les firent prisonniers. Un homme nommé Kaab, fils d'Amrou, surnommé Abou'l-Laïth, de la tribu de Solaïm, fit prisonnier Abbâs et lui attacha les mains, en lui disant : le Prophète m'a défendu de te tuer.
Abbâs fut très heureux. Il avait sur lui vingt dinars. Kaab les lui prit et l'emmena au camp. Moudhadsar, fils de Dsiyâd, client des Ançar, rencontra Abou'l-Bakhtari, fils de Hâschim, avec un de ses amis, nommé Djounâda, fils de Molaïha. Moudjaddsar dit à Abou'l-Bakhtarf : va ô infidèle, auprès du Prophète de Dieu, qui m'a défendu de te tuer.
Mais je ne peux pas laisser la vie à ton ami. Abou'l Bakhtari répliqua : ma vie est liée à la sienne ; je ne laisserai pas tuer mon ami. Malgré les efforts des Moudjadsar, Abou'l-Bakhtari lutta avec lui, pour défendre son ami, jusqu'à ce qu'il fût tué par Moudjaddsar, qui vint en rendre compte au Prophète, en lui racontant le fait et en s'excusant. Le Prophète agrée ses excuses.
Abder-Ra'hman , fils d'Aouf, qui avait reçu ce nom du Prophète en se faisant musulman, et qui auparavant s'appelait Abd-Amrou, avait été, avant l'islamisme, lié d'amitié avec Omayya, fils de Khalaf, et était resté son ami même après avoir embrassé la religion musulmane, quoique Omayya fût incrédule. Celui-ci continuait à l'appeler Abd Errahman, serviteur de Dieu. Omayya répondit : je ne connais pas Ra'hman, je ne sais qui il est. Appelle-moi alors Abdellah. Je ne connais pas Abdellah ; je t'appellerai Abdou'l Ilah.
J'y consens, répondait Abd Errahman. Omayya l'appelait donc ainsi. Or, le jour de Badr, Omayya et son fils Ali se trouvaient dans l'armée qoraïschite.
Lorsque son armée fut en déroute, Omayya, qui était âgé, ayant perdu son cheval, et ne pouvant pas courir, resta en arrière. Lui et son fils Ali, qui était un jeune homme et qui ne pouvait pas quitter son père, étaient dans le camp, debout, cherchant quelqu'un à qui ils pussent se rendre prisonniers pour échapper à la mort.
Abderrahman, fils d'Aouf, qui aimait les armures, était entré dans le camp, avait ramassé deux cuirasses et les emportait sur son dos. Omayya, l'apercevant de loin, le reconnut et lui cria : O Abdou'l-Ilah, vient et fais-nous prisonniers, moi et mon fils, nous valons mieux que ce que tu tiens.
Abderrahman jeta les cuirasses, les fit prisonniers et les emmena. Ils furent rencontrés par Bilal, qui, d'après une version, avait été le voisin d'Omayya, à La Mecque, et qui, chaque jour, avait été frappé et tourmenté par lui. Mais, d'après une version plus exacte, Bilal avait été l'esclave d'Omayya ; comme il avait embrassé l'islamisme, il fut acheté par Abou-Bakr, et donné par lui au Prophète, qui l'affranchit.
Omayya lui avait attaché les mains et les pieds, lui avait placé sur le corps un bloc de pierre, avait torturé tous ses membres, en lui ordonnant de renoncer à l'islamisme. Bilal avait répondu: il n'y a qu'un Dieu ! Or, lorsque les infidèles s'enfuirent, Bilal sachant qu'Omayya était parmi eux, ne songea qu'à se rendre maître pour le tuer ou le faire prisonnier. En passant dans le camp, il vit Omayya et son fils conduits comme prisonniers par Abderrahman, Bilal dit :
Ô Abderrahman, où mènes-tu ces infidèles que je cherche ? Tais-toi, dit Abderrahman, ce sont mes prisonniers. Bilal répliqua: que Dieu ne me sauve pas s'ils échappent de mes mains ! Ce sont des Qoraïschites infidèles, ennemis de Dieu et du Prophète. Les musulmans accoururent avec leurs sabres et tuèrent le fils d'Omayya, Abderrahman, en couvrant Omayya de son corps, lui dit: voilà ton fils qui n'existe plus, ils vont maintenant te tuer également.
Je n'y peux rien faire. Dis : il n'y a pas de Dieu si ce n'est Allah, et Mohammed est l'apôtre d'Allah.
Omayya répondit : si je pouvais prononcer ces paroles, je ne serais pas venu à ce combat. Abderrahman dit : alors sauve-toi, car je ne peux pas te protéger.
Omayya, ne pouvant courir à cause de son âge, dit : Si je pouvais marcher, je ne me serais pas rendu à toi, moi et mon fils. Ils parlaient encore, lorsque les musulmans se tournèrent vers lui et le tuèrent.
Abderrahman dit à Bilal : que Dieu ne te punisse pas, ô Bilal, pour ce que tu as fait.
J'ai perdu mes cuirasses, et tu as fait tuer mes prisonniers, de sorte que chacun a obtenu quelque chose, excepté moi. Lorsque le Prophète donna l'ordre de rechercher Abou-Jahl, de ne pas le laisser échapper, de le chercher parmi les morts et de le lui amener mort ou vif, parce que, disait-il, c'était un homme dangereux, l'un des Anssar, nommé Moâd, fils d'Amrou Ben-Al Jmouh, ne songea qu'à chercher Abou-Jahl.
Il le rencontra enfin dans le camp des infidèles, monté sur un cheval arabe ; il était avec son fils, Ikrima. Moâd, le frappant de son sabre, lui enleva le bras droit, et Abou-Jahl tomba de son cheval. Ikrima accourut, et, d'un coup de sabre, coupa le bras de Moâd, qui se sauva. Moâd vivait encore, n'ayant qu'un bras, sous le califat d'Othman.
D'après une autre version, Abou-Jahl serait tombé de cheval, ayant une jambe coupée. Ikrima se tenait devant son père, et ne le quittait pas. Un autre homme des Anssar, nommé Moawid, fils d'Afra, vint à y passer, et, voyant Abou-Jahl assis, le sang coulant de sa jambe, il lui asséna sur les épaules un coup de sabre qui pénétra jusqu'à la poitrine. Abou-Jahl tomba dans la poussière.
Le Prophète se trouvait sur le terrain rapproché des puits, tandis que les Qoraïschites étaient sur un terrain éloigné des puits, dans la vallée, comme il est dit dans le Coran : « … Vous étiez plus rapprochés dans la vallée et les ennemis étaient plus éloignés », etc. (Sur VIII, vers. 43). Le lendemain, les Qoraïschites se mirent en mouvement, montèrent la colline de sable et firent halte près de l'armée de Mohammed, de sorte qu'ils purent voir, de leur camp, l'armée du Prophète. Quelques-uns d'entre eux gravirent le sommet de la colline pour regarder. Lorsque ‘Otba parut sur le sommet, monté sur un chameau à poils roux, le Prophète le distingua et dit: ils se sont jetés eux-mêmes dans le précipice ; personne ne les a avertis, sauf l'homme du chameau rouge. Ils feraient mieux de suivre son avis. Vue du sommet de la colline de sable, qui était grande comme une montagne, l'armée du Prophète parut très faible aux Qoraïschites, et de même l'armée ennemie semblait peu nombreuse aux yeux des musulmans, qui prirent courage, comme il est dit dans le Coran : « Dieu les fit paraître peu nombreux à vos yeux », etc. (Sur. VIII, vers 46). Après avoir fait halte, les infidèles envoyèrent un homme nommé ‘Omaïr, fils de Wahb, de la tribu de Djouma'h, pour reconnaître les forces de l'armée musulmane. (à suivre…)