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Un vent électronique souffle sur le Maroc

Véritable vague auditive, la musique électronique a connu un essor important ces dix dernières années et fait partie du quotidien des jeunes et moins jeunes du pays. Zoom sur une musique qui fait du bruit.

10 Août 2011 À 13:40

«La musique électronique n'est pas à proprement parler "définissable”. Elle est un outil pour les incompris, les marginaux, les hippies, les jeunes, les moins jeunes… » Telle est la définition de Zara Kadiri pour qualifier cette musique si chère à son cœur et à son corps qu'elle a décidé d'en faire son sujet de mémoire. « Elle est née dans les villes de Chicago et Détroit dans les années 80. À Détroit, elle était un mouvement de protestation, de mobilisation, dans une ville en proie à de gros problèmes économiques, une montée du chômage et de la violence au quotidien. La techno de Détroit est d'ailleurs imprégnée d'une sonorité mélancolique, sombre, métallique.»
Sonorités métalliques connues uniquement pour danser et associées directement à la fête et au monde de la nuit. « Il n'y a pas de lieu où écouter de la musique électronique. Si tu veux en écouter, tu dois aller en boîte de nuit, ou attendre des soirées privées. Et là, l'amalgame est vite fait : la musique électronique est une musique bruyante, adaptée à la nuit, à la danse ou encore à la drogue », ajoute Zara Kadiri.
Un monde de la nuit qui donne naissance à une DJ mania sans précédent puisque les DJs poussent comme des champignons : « Le problème actuel de la musique, c'est sa démocratisation. Avec un logiciel comme Virtual DJ, ou Traktor, n'importe qui peut se prendre pour un DJ. Résultat des courses : trop de DJ au rabais, pas assez de DJ de qualité. Les cachets sont bradés et les DJ vraiment bons ne peuvent plus vivre de leur passion…», témoigne la même personne. La passion c'est quelque chose qu'Amine K,1er DJ marocain à monter sur la scène de Mawazine, connaît puisqu'il décide de faire carrière au Maroc après avoir sillonné les clubs du monde et fait danser toutes les nationalités. Il a fait le tour des clubs pour se concentrer aujourd'hui sur la mise en place d'événements dédiés à la musique électronique.

Ce DJ compositeur peut se féliciter de contribuer à l'essor de la musique électronique dans son pays : «J'ai décidé de revenir à mes premières amours et de contribuer à l'essor de la nouvelle scène underground au Maroc.» Scène underground enrichie grâce à des concepts comme le "State of mind”, 1er festival de musique électronique au Maroc ou encore la "Moroko Loko”, rendez-vous des amoureux de cette musique que le DJ impliqué a commencé à financer par ses propres moyens : «Nous sommes une équipe de passionnés. À à la base, cela a commencé avec un financement à 100% de notre poche et l'entrée était gratuite, puis nous avons commencé à faire payer l'entrée, uniquement pour pouvoir inviter des guests internationaux».
Dans un tout autre genre, Kali G a commencé au Maroc pour continuer à l'étranger et apporter sa touche marocaine à la musique électronique : «J'ai commencé dans des clubs à Barcelone et petit à petit j'ai réussi à me faire un petit nom», explique le DJ connu pour ajouter des tonalités du folklore marocain dans ses sons "electro”. «Après 4 ans, je décide d'aller à Ibiza, la destination idéale pour tout DJ. C'est là où on trouve les meilleurs. J'apprends auprès d'eux et je crée mes opportunités. La musique électronique me permet de voyager et de vivre de ma passion».

Opportunités trouvées au-delà des frontières marocaines puisque le DJ s'est déjà essayé à une expérience marocaine qui a vite avorté : «Dans un club où je jouais, on me demandait à plusieurs reprises de faire des choses plus commerciales, de la musique orientale ou de la salsa. Chose qu'on n'oserait jamais faire en Espagne, par exemple. Je préfère rester un petit ambassadeur de la scène underground marocaine à l'étranger, je n'ai pas vu d'avenir pour moi au Maroc où la musique électronique est considérée comme un business». Un business qui rapporte selon Mehdi, gérant d'une boîte de nuit de renom à Marrakech : «Le choix du DJ résident est primordial puisque c'est grâce à lui qu'on va préférer un endroit à un autre. Je reçois tous les jours des maquettes de DJ, il y en a de plus en plus.
Ce n'est pas forcément mauvais, sauf quand des pseudos musiciens le font pour de l'argent et non pour l'amour du métier». En effet, être DJ est un métier à part entière. Mais ces artistes ne trouvent pas les producteurs adéquats afin de contribuer au développement de la nouvelle scène marocaine et de la musique électronique.
Une musique qui grandit et commence à toucher les cœurs et les corps, une aubaine pour les uns, une passion pour les autres. Heureusement qu'elle est encouragée par les initiatives de la nouvelle génération. La musique underground, ou «taht el ground» comme s'amuse à l'appeler Amine K, est bien là et ne demande qu'à se faire entendre, mais elle reste étouffée par la chose commerciale et le souci du retour sur investissement.

Le «Sunrise Generation Festival» de Marrakech s'éteint…

Le festival international de musiques électroniques au Maroc «Sunrise Generation Festival» de Marrakech se ventait d'être le premier festival du genre, alors qu'il y en a eu d'autres avant lui, et promettait une programmation des plus alléchantes. Plusieurs DJs venus du monde entier s'étaient donné rendez-vous à la Plage Rouge et au Pacha les 19 et 20 juillet dernier afin de donner un spectacle digne de ce nom. Un plateau artistique marocain et international composé de DJ/producteurs et en collaboration avec des agences de bookings et des promoteurs étrangers. Médiatisé depuis des mois, les réservations étaient déjà en cours, les artistes contactés et les flyers distribués dans les rues de Marrakech. Deux jours avant l'événement, les artistes du monde entier commençaient à se plaindre du manque d'organisation, n'ayant toujours pas reçu leurs billets d'avion et leurs réservations d'hôtel comme promis. Pire, les organisateurs du festival étaient impossibles à joindre, quatre jours avant l'événement. MAR 1, un des DJ participants, n'a reçu ni cachet ni frais de transport comme préalablement négocié et il n'est pas le seul. Résultats des courses : le festival a été annulé deux jours avant la date du début et les touristes venus pour l'occasion sont dépités.

Vous avez dit musique électronique ?

La musique électronique est un type de musique qui a été conçu à partir des années 1950 avec des générateurs de signaux et de sons synthétiques. Avant de pouvoir être utilisée en temps réel, elle a été primitivement enregistrée sur bande magnétique, ce qui permettait aux compositeurs de manier aisément les sons, par exemple, dans l'utilisation de boucles répétitives superposées. La particularité de la musique électronique de l'époque est de n'utiliser que des sons générés par des appareils électroniques. Les premières recherches musicales expérimentales se sont servies du matériel des divers laboratoires de musique et des techniques d'enregistrement radiophoniques qu'ils ont détournés de leur fonction première. C'est à cette époque que se sont constituées dans les studios d'enregistrement et dans les institutions musicales (notamment les radios) des entités spécialisées dirigées par des musiciens et consacrées à la musique électronique. Dans les années 60, il y a eu beaucoup d'innovation dans le développement des instruments de musique électronique. Les synthétiseurs analogiques ont fait place aux synthétiseurs numériques et aux sampleurs. Les premiers sampleurs, comme les premiers synthétiseurs, étaient chers et encombrants.
Plus tard, la musique house à Chicago, des sons techno et electro à Détroit dans les années 1980, le mouvement acid house de Chicago et de la scène anglaise de la fin des années 1980 et du début des années 1990 ont tous contribué au développement et à la diffusion de la musique électronique. Elle a évolué vers un style plutôt calme dans les années 90.
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