L'humain au centre de l'action future

L'artiste de sable aux mains d'argent

Sur une avenue principale de Casablanca, Hassan Thioune, un Sénégalais, vend ses toiles pour gagner sa vie. Un artiste nomade dont les œuvres ont un étrange ... d'ailleurs.

À la fois mature et rebelle, l'artiste peint un univers pour le moins subtil et naturellement africain, aux confins de la figuration ou encore de la bande dessinée. Ph. SAOURI

31 Août 2011 À 15:33

En plein centre-ville de la métropole, au milieu des marchands ambulants qui se complaisent à vendre des vêtements, des produits de beauté ou encore des bijoux, Hassan Thioune se démarque en vendant son art, en toute discrétion. Recroquevillé, pinceau à la main, il exprime son exil et son attachement à sa terre par la peinture. Arrivé du Sénégal il y 4 mois, il tombe amoureux du Maroc et décide de vendre ses toiles simples et d'une finesse certaine. « Je fais cela depuis maintenant 7 ans », confie l'artiste sans demi-mesure. « J'ai commencé dans mon pays et une fois arrivé ici, j'ai décidé de continuer à vivre de mon art ».

Un art particulier, mélange de nostalgie de la mère patrie et de fascination pour la terre d'exil. Plusieurs types de sable de couleurs et de calibres différents sont appliqués sur une planche de bois où l'artiste représente des scènes de la vie quotidienne, comme pour ne pas oublier d'où il vient. « Chez moi, nous disposons de plusieurs sortes de sables naturels : le sable blanc, rouge ou jaune clair. J'utilise ces mélanges dans mes toiles et le contraste des différentes matières que je colle et que j'assemble jusqu'à donner une forme ». Une forme ou des formes chargées d'histoire et empreintes d'une vie passée entre le Sénégal et le Maroc.

En effet, l'Afrique est omniprésente dans l'œuvre de l'artiste à travers l'image de la mère africaine ou du chameau, symbole du désert. Un résultat qui vaut le détour et une inspiration qui lui vient naturellement : « Je peint ce que je ressent ». Miroir de l'âme, son art en dit long sur son vécu et parle pour lui. Derrière ce sourire et cette joie de vivre, se cache la douleur de l'exil et le déchirement de la séparation.
«Je peins surtout pour gagner ma vie et aider ma famille. Nous sommes très pauvres, ma mère est âgée et malade, j'ai beaucoup de frères et surtout deux épouses et sept enfants à charge», confie Hassan. Oiseau migratoire, cet artiste qui peint le sable, complète ses œuvres par des oiseaux comme pour symboliser la liberté ou figurer la représentation des envols de la pensée. Une liberté limitée, puisque Hassan ne peut pas rester plus de 3 mois sur le territoire marocain, obligé de sortir de la frontière pour ne pas être en situation irrégulière. Prisonnier de son statut, il n'en demeure pas moins créatif et libre dans son art.

Énigmatique et envoutant, il utilise le contraste des couleurs et joue sur le noir et blanc afin de transformer ses personnages à la plastique généreuse. À la fois mature et rebelle, il peint un univers pour le moins subtil et naturellement africain, aux confins de la figuration ou encore de la bande dessinée. Un graphisme original, une lumière intéressante donnent aux tableaux de Hassan Thioune une empreinte bien à lui, reflet d'une histoire et d'un passé qui alimentent son souffle créateur. Mouvements, tendances, couleurs, sables, Afrique noire, Maroc, femmes, mères, animaux, objets traditionnels représentent l'univers de l'artiste à l'âme d'enfant, le nomade aux idées éparpillés mais au talent bien fixe.
Dans les rues de la ville blanche, la création fuse au rythme effréné de la cadence casablancaise. Une cadence qui se voit enrichie par la créativité d'autres horizons, d'oiseaux ayant défié les fils barbelés de leurs frontières pour voler librement au pays des merveilles…

Le Sénégal ou le pays des artisans

Le Sénégal est un pays d'artisans. L'imagination des créateurs de tous poils est sans limite. Une grosse partie de cet artisanat est aujourd'hui à destination des touristes qui en apprécient l'originalité. Vous trouverez cependant au Sénégal le pire comme le meilleur. L'artisanat le plus intéressant ‒ et le meilleur marché est bien sûr celui qui est réalisé pour les Sénégalais pour leur usage quotidien. C'est le cas des ustensiles de cuisine, des outils agricoles ou des poteries. Les régions les plus rurales sont à l'origine de la plus grande partie de l'artisanat sénégalais d'utilisation courante. Dans un petit village du Sénégal oriental, 100% des objets utilisés sont artisanaux, y compris les récipients d'eau qui sont encore souvent des jarres en terre. Du bin-bin au patchwork, en passant les poteries, la peinture naïve, les poupées noires ou la peinture sous verre, le pays représente une mine de trésors à découvrir.
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